L E T.
de travailler à ramener ce Royaume au
fein de l’Eglife : c’étoit une commiflion
très-délicate, qu’il ne crut pas par cette
raifon devoir accepter. Le Roi approuva
les motifs de fon refus, 6c lui conféra
le Confulat de Livourne, qui eft le premier
MA I L *
I L ferait avantageux pour la leâure de
cet Ouvrage, que le Philofophe qui va
nous occuper eût été Chymifte , parce
qu’on verrait de fuite les découvertes
qu’on a faites dans la Chymie depuis la
renaiflance des Lettres. Mais il faut s’affu-
jettir à l’ordre chronologique ; ôc comme
ce volume renferme les Chymiftes ôc les
Cofmologiftes, je dois placer fuivant cet
ordre 8c les uns & les autres. Je préviens
donc le Leéteur que je vais écrire la vie
d’un Cofmologifte, 6c je le prie de fe
rappeller les travaux de Burnet fur la
théorie de la T erre, afin de les lier avec
ceux que je décrirai, 6c de reprendre
ainfi le fil de l’hiftoire de la Cofmologie.
Toutes les perfonnes inflruites con-
noiffent Tclliamed ; c’eft l’anagrame de
de Maillet , qui eft le nom du fécond
Cofmologifte moderne. 11 naquit en 16 5 9
en Lorraine, d’une famille noble ôc diftin-
giiée. Son éducation fut fans doute fort
bonne ; mais il n’annonça pas dans fa jeu-
nefle ce qu’il devint dans l’âge mûr. Il la
paffa même dans une efpèce d’oifiveté.
A l’âge de 3 3 ans it fut nommé Conful
général de l’Egypte par M. le Chancelier
de. Pomchartrdin, qui le protégeoit ; 8c il
exerça cet emploi pendant leize ans 6c
demi avec beaucoup d’intelligence 8c de
fuccès. Il foutint l’autorité du Roi contre
les entreprifes des Janiffaires au péril de
fa v ie , 6c par fa fermeté affura le repos
de la Nation dans ce Pays. 11 y étendit
auffi infiniment le commerce des Négo-
cians : ce qui enrichit la Ville de Marfeille
6c accrut fa réputation.
Pour récompenfer fes fervices, Louis le
Grand le nomma fon Envoyé en Abyfli-
nie. Le principal objet de fa million etoit
6c le plus confidérable de nos Con-
fulats. Senfible à cette marque de bonté ,
il voulut en marquer fa gratitude, en
donnant desinftruâions à celui qui devoit
le remplacer, très-propres à faire réuffir
ce grand projet.
Il partit enfuite pour Livourne. Pendant
fix ans qu’il y fut Conful, il foutint
avec fermeté contre les Minillres du
Grand Duc les droits de fa charge ôc les
prérogatives de la Nation. Enfin ayant été
nommé en 1715 pour faire les vifites des
Echelles du Levant 6c de Barbarie, il
s’acquitta fi dignement de cet emploi *
qu’à fon retour le Roi lui accorda la
permiflîon de fe retirer , 8c le gratifia
d’une penfion confidérable.
Il avoit alors cinquante-cinq ans. Ce
n’étoit pas affurément l’âge propre à
commencer à cultiver la Philofophie :
mais il y avoit long-temps qu’il étudioit
la nature. Pendant fon féjour en Egypte ,
il l’avoit toujours obfervée avec loin. Il
s’y étoit auffi occupé de la leâure des
Auteurs anciens, ôc de l’étude de la Langue
Arabe, dans laquelle il avoit fait
allez de progrès. Ces lum ières 8c ces con-
noiffances l’avoient mis à portée de lire
les Auteurs Arabes, qui font en grand
nombre en Egypte, 8c de converfer avec
les habitans de ce Pays ; 6c depuis qu’il
l’avoit quitté , il avoit entretenu une
correfpondance avec le Patriarche des
Grecs, celui des Cophtes, avec l’Abbé
* Vit i t Maillet, p.r M. l'Ahht U M a r ie r , à la tctc de la dernière édition de TcllUmti , donnée par
cet Abbé. Et fes Ouvrages.