8p
’S G RA V E SANDE . *
UN Hiftorien doit être vrai, dit l’Orateur
Romain (a \ C’eft aufîi la loi
que je me fuis impofee dans la compofi-
tion de cette Hiftoire, 6c je tâcherai de ne
point m’en écarter dans la fuite de cette
compofition. Afin de continuer à m’y conformer
, je déclare que, quelque eftima-
ble que foit le cours de Phyfique expérimentale
de Defaguliers, dont je viens
de faire l’analyfe , il s’en faut beaucoup
que ce cours foit complet. L’Auteur s’y
eft principalement attaché à expofer fes
inventions, fes découvertes 6c fes nouvelles
vues ; 6c comme la Méchanique
étoit de fon goût, cette partie de la
Phyfique domine dans fon Ouvrage. Les
autres objets de cette fcience lui font
facrifiés. Defaguliers les a ou abfolument
omis, ou traités fort légèrement.
C’eft ce que remarqua le Succeffeur
de ce grand Phyficien. Affez verfé dans
toutes les parties de la Phyfique pour
les approfondir, il réfolut de les mettre
dans le plus bel ordre, d’en démontrer
mathématiquement les principes, & de
les prouver par l’expérience. Il chercha
à découvrir les loix de la nature par le
moyen des phénomènes; tint ces loix
pour générales, quand une raifon fuffi-
fante l’y autorifa, 6c raifonna enfuite
mathématiquement. Il compofa ainfi un
des plus favàns 6c des plus beaux Ouvrages
qu’on ait écrit fur la Phyfique générale.
Son véritable nom eft Storrn Van
’S gravesande; mais pour l’abréger,
ôn l’appeloit tantôt Storm , & tantôt
*Sgravefandc. C ’étoit deux noms pour une
feule perfonne. Afin d’éviter les incon-
véniens de cette double dénomination,
fa famille fe fixa au nom de ’Sg r a v e -
sande , fous lequel il eft connu.
Ses parens étoient nobles. Leurs ancêtres
occupoient des places de Magif-
trature à Delft dès 1419 ; mais le grand-
père de ’Sgravesande étant venu s’établir
à Bois-le-Duc, lorfque cette Ville fut
foumife aux Etats Généraux, il y obtint
divers emplois importans qui l’obligèrent
à s’y fixer. Il avoit époufé la fille
à’Otto Heurnius, perfonnage de la première
confidération, 6c d’une illuftre naif-,
fance.
C’eft dans cette Ville que naquit notre
Philofophe le 27 Septembre 1688, de
Théodore ’Sgravefande , Préfident, 6c
chargé de diverfes Commiflions, qui le
mirent en état d’élever honorablement
fa famille, qui étoit nombreufe. Il prit
un foin particulier de ’Sgravesande. Il
lui donna un Précepteur favant, nommé
Torton , qui lui infpira du goût pour
les Mathématiques.
En 1704 ce bon père l’envoya à l’Académie
de Leyde pour y étudier en Droit, 6c lui ordonna d’aflifter régulièrement
aux leçons de fon Profeffeur. Il s’étoit
apperçu que les Mathématiques avoient
beaucoup d’attrait pour lui, 6c il crai-
gnoit que l’étude de cette fcience ne
le détournât de celle du Droit. Cette
crainte étoit bien fondée; car le jeune
’Sgravesande ne penfoit qu’aux Mathématiques.
Aufîi arrivé à Leyde, il ne
manqua pas une leçon; mais tandis
que les Etudians écrivoient ce que le
Profeffeur leur di&oit , il traçoit des
figures, & travailloit à la perfpeâive.
C ’étoit de toutes les parties des Mathématiques
celle qui lui faifoit le plus de
* Dltlionnaire Hiflorique, tu Mémoires Critiques & Littéraires , contenant la vie & tes Ouvrages de diverfi»
fer font,, s qui je font difiinguées, &e. par Profter Marchand, ait. ’ SGRAVESANDE. Et fes OuTiages.
ta) Cicéron, de Orat. L. *•
M