io8 MU S C H E N B R O E K .
mérito it de l ’être. C ’eft en 1 7 1 7 qu’il fit
c e v o y a g e .
D e retou r à L e y d e , il demanda le
b onnet d e D o fte u r en P h ilo fo p h ie , qui
lui fut ac cord é a v e c la plus grande
diftin& ion . Il le reçut en 1 7 1 9 ; 6c en
ce tte même a n n é e , le R o i de P ru f îe ,
p è re du grand Frédéric , a&uellement
ré g n a n t , ay ant entendu faire l'on é lo g e
p a r des perfonnes d’un premier m é r ite ,
v o u lu t fe l’attacher. Il lui fit offrir la
C h a ire de Philofophie 6c de Mathématiques
à l’Académie de D u isb o rg dans
le P a y s de C lè v e s , d’une manière fi
o b lig e an te , qu’ il accepta cette offre a v e c
reconnoiflance. Il alla donc à D u isb o rg
p o u r y remp lir la Ch a ire.
O n s’ apperçut en Hollande de la perte
qu’ on a v o it f a i t e , 6c on n’oublia rien
p o u r engager notre Philol'ophe à re tou
rn e r dans fa Patrie. C e qu’ il y a voit
de plus diftingué dans cet Etat , 6c
fes meilleurs amis ne eeisèrent de le
rapp eler pa r les foilicitations lès plus
p r en an te s , 6c par les témoignages les
plus v ifs d’efiime Sc d’amitié.
L e ca raftè re d’une belle ame e ft d’être
fenfible. M u s C H E N B R O E k fe laiffa
ém o u v o ir ; 6c lorfcju’on le v it ébranlé ,
les Curateurs de l’ U nivërfité d’Utrecht
l’appelerent pour pofeffer la Philofophie
6c les Mathématiques dans leur V ille . Il
n e put réfifter à cette v o i x , 6c quitta en
1 7 2 3 la C h a ire de D u isb o rg pour celle
d’ Utrecht. U en prit poffefïion le 13 Septembre
de cette année par un D ilco u r s
qu’ il prononça fur la v éritable méthode
d ’enfeigner la Philofop hie expérimentale.
T e l eft le titre de ce D ifcou r s :
De certa methodo Phdofophia experimen-
t'alïs. C e fut ici l’ époqu e de fon dévou
em en t à l’étude de la Phyfiqu e. Il
en fit fa principale 6c prefquè unique
occupa tion ; & il compofa un Abrégé
Elément de Phyfique, qui fut imprimé
à L e y d e en 172 6 a v e c ce t i t r e : Epi-
tome Elementorum Phyfices , in -8 ° .
(a) C e t Ouvrage a é té prefque traduit par M.
Dtfiandes , fous le titre de Traite de la manière de faire
du expériences} imprimé dans fo n Recueil de différeus
C e n’étoit pourtant qu’ un effai ; maïs
le fîiccès qu’ il eut l’engagea à prendre
les chofes plus en grand. Pendant q u ’il
t ra v a illo it à l ’exécution de c e p r o je t , il
eut d eux fujets de diftra&ion. C om m e
on ne négligeoit rien pou r le fixe r à
U t r e c h t , on lui fit entendre que la v ie
d’un homme feul étoit une v ie t r i f t e ;
qu’ un Philofop he qui ne cu ltiv o it que les
fc ie n c e s , ne p o u vo it guères s’o c cupe r de
tous les détails que les befoins de notre
co rps e x ig en t ; 6c enfin qu’une femme
.en le dé livrant de tous ces fo in s , adouc
ira it que lqu efois les fatigues de fes
v e illes . Il fe laiffa perfuader. O n lui p ro -
pofa un parti avan tageux , 6c fans dou te
q u e les charmes de fa prétendue , autant
que les autres raifons , le dé te rminèrent:
c etoit Mademoifelle Adriana Kan de
Wciter, fille de Guillaume Kan de Water ,
6c de Marie Onçiel. Il l’époufa le 16 Juillet
1 7 2 1 , 6c en eut deux enfans , une fille
qui s’eft mariée depuis a v e c M. Herman-
nus Kan Alphen, Profe ffeu r en T h é o lo
g i e , 6c Con fe ille r Eccléfiaftique de
la Principauté de Haneau , 6c un fils q ui
eft aéhiellement Con fe ille r 6c Ech ev in
de la V ille d’Utrecht. ,
L e fécond fujet de d iftra â ion eft la
dignité à laquelle l’élevèren t les C u ra teurs
de l ’U n iv e r fité d’Utrecht.
Ils le nommèrent Recteur Magnifique-
de cette U n iv er fité . C ’étoit un témo ignage
de leur eftime , 6c une ré c om -
penfe de fes foins pour l'éducation de la
jeuneffe. Il prit poffeftion de ce tte dignité
le 26 Mars 1 7 2 9 , 6c l’année fui-
v an îe en la quittant, il prononça un beau
D ifco u r s fur la meilleure manière de
faire des expérience s ( De methodo infii-
tuendi expérimenta Phyjîca ) (a).
C e D ilco u r s fit beaucoup de bruit. Il
porta fon nom ch ez toutes les Nations
p o f c é e s , oh l’étude de la P h yfiqu e é to it
regardée comme une chofe importante
pou r l ’avantage du genre humain. En
l ’année 1 7 3 1 , le R o i de D an n ema rck
Traités de Phyfique. On trouve dans ce Recueil u ne.
lettre écrite par Musch enbroek à cet Anteiu fil*
l ’ ufage que c e lu i-c i a fa it de fa méthode*
MU S C HE
lu i propofa line C h a ire de P hilofop hie
à C o p p en h a g u e , a v e c un honoraire de
f ix mille florins d’Hollande : mais notre
P h ilo fop h e s’exeufa de ne p o u vo ir a c cep
te r fes offres. L e R o i d ’Angleterre
cru t le gagner en lui offrant une C h a ire
à G o t t in g en , 6c en lui faifant des offres
extraordina ires . Enfin le R o i d’E fp a gn e ,
inftru it de tous fes r e fu s , n’ ex ig e a de lui
qu e cinq années d e fë jo u r dans les E ta t s ,
6c au x difcours les plus féduifans il
joignit l’offre d’ un honoraire de vingt
m ille florins par année. C ’étoit une fo r tune
: mais les Philofophes ne connoif-
fent point cette d iv in ité ; 61 celui dont
j ’écris IH i f t o i r e , n ’eftimoit que les ri-
cheffes de l’e lp r i t , &c p ré fe ro it , fuivant
l’expreftion d ’un A n c ien , une goutte de
fageffe à une tonne d’or*
Il jou iffo it des douceurs du ménage
dans les bras d e la Philo fop h ie ; 6c il eu t
é té h e u reu x , s’ il y a vo it quelque ch ofe
de ftable dans c e monde. A u fein de
ce tte félicité , il éprou va un chagrin bien
cuilant : c e fut la perte de fon é p o u fe ,
morte le 8 Mars 1732* Aban donné à
lui-même a v e c deux enfans , il fe t rou v a
dans une fituation for t trifte. Les perfonnes
les plus diftinguées d’U t r e c h t ,
q ui n e le perdoient pas de vu e , fe hâtèrent
à répa rer ce tte perte. Ils ch erch èrent
d’abord à le con fole r par la part
fincè re qu’ ils prirent à fon a ftli& io n ,
6c lui propolèrent enfuite une fécondé
ép ou fe , qui offrit de p artager fa d o u le u r ,
6c de fe rv ir de mère à fes enfans.
Rien n’eft fans doute plus dou x dans
les affliction s, q u e les at entions de ceu x
q ui s’attach :nt à nous. Q u o iq u e la v ie
nous pa roiïïe alors à c h a r g e , nous fen-
tons cependant q ue nous voud rions v iv r e
p o u r eu x , parce que le bienfait affeéte
toujours une b elle ame. M u s c h e n b r o e k
v é cu t donc pour fes amis , pour cette
n o u v e lle époufe 6c pou r lès chers enfans.
O n la n ommoit M demoifelle Alftorphius;
i l l’ époufa le 6 A v r il 1 7 3 8 ,6c la perdit
au mois d - Décemb re 1 7 6 0 , fans en a v o ir
eu d’enfans.
T o u s ces événemens ne firent pas
tellement d iv e r fio n à fes é tu d e s , q u ’il
N B R O E K. loy
ne publiât en 1 7 2 9 un O u v r a g e t rè s -
cu r ie u x , intitulé : Dijïirtationes Phyfica
experimentales & Geçtnetrica de Magnete,
magnitudine terra , & coharentiâ corporum
firmorum, in-40. Parmi ces d iffertation s,
il faut d iftinguer ce lle q ui a l’aimant p o u r
o b j e t , 6c la differtation fur la coh éfion
des corps folides. E lle s font le fruit des
recherches délicates fur ces deux fujets ,
6c le réfultat d’expérien ce s très-fines :
aufti contiennent-elles des dé cou ve r te s
piquantes. C a r ( 6c c’eft ici le lieu d e le
d i r e ) à une théorie p ro fon de d e la P h y fiqu
e , n o tre P hilofop he jo ign o it un grand
art de faire des expériences. Il doit même
fur-tout à ce t art les belles d é co u v e r te s
dont il a enrichi ce tte f c ie n c e , 6c q u i
déformais l’occupè rent le refte d e fes
jours.
J’ai déjà parlé de l ’aimant dans l’Hifi*
toire de Rohault 6c ce lle dHartjoeker, de
fa nature 6c de fes p roprié té s : je ne m’arrêterai
donc ici qu’aux d é cou ve rtes qu’a
faites M u s c h e n b r o e k fur cette pie r re .
1 . Plus deu x aimans font proch es l’un
de l ’a u t r e , plus ils s’attirent réc ip ro q u e ment
; 6c les vertu s attra& iv es font en
raifon quadruplée in v e r fe des efpaces
qui font entre leur fphère.
2°. L ’aimant n’attire pas feulement le
fe r ou un autre aimant ; cette attra&ion
s’e x e rc e en co re fur l’éméril 6c fu r un
fable noir que l’on t ro u v e en dive r s endroits
de l’Allemagne 6c d e la L omb a rdie .
Il y a en core beaucoup de corps qu e
l’aimant attire , lo rfq u e ce s co rps ont é té
feulement rougis au feu , ou in co rp o ré s
a v e c les autres co rps dont nous v en o n s
de faire mention. T e ls font le b o l commun
, le b o l d’A rm én ie , la calamine ,
l’h ém a t ite , la porcelaine r o u g e , le brun
d’ A n g le te r r e , l’o c re jaune d’Allemagn e
6c de F r a n c e , la terre m orte de v it r io l -
6cc.
30. L ’aimant réduit en pou dre, 6c étant
mis dans un creufet a v e c de la limaille de
f e r , puis fur le feu , jul'qu’à ce qu’ils foient
d e ven u s roug e s , 6c qu’ ils a y en t re f té
dans ce t état pendant que lqu e tem p s ,
lorfqu ’ ils auront perdu leur ch a leu r , ils
auront a cquis ce tte p ro p r ié té , q ue le c ô té