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vis, les volutes, les cylindres, les rhorn-
bes , &c. La fécondé clafle fournit fix familles
: favoir , les huîtres , les cames ,
les moules, les boucardites, les pétoncles
8c les couteliers.
On compte dans la troifieme clafle fix
familles, qui renferment les ourfins, les
glands , les poufle-pieds , les conques
anatiferes, les pholaaes 8c l’ofcabrion.
A l’égard des multivalves, on les divife
en trois familles , fous lefquelles on comprend
les glands de mer, les conques
anatiferes 8c les poufle-pieds.
Cette divifion des coquillages en trois
clafles principales eft d'Arifiote 3 8c M.
Dargenville eft l’Auteur de la fubdivi-
fion de ces clafles en familles. Aldrovànde n’a pu connoître que la
première divifion \ mais, fans s’y aflujet-
t ir , il s’eft attaché a décrire avec exactitude
les coquillages qu’il a connus, 8c
à découvrir leur nature 8c leur génération.
Et voici fon fentiment.
Il y a , dit- i l , dans la mer beaucoup
de parties terreftres remplies de vie \ 8c
ce font elles qui forment toutes les coquilles.
Lorfque ces parties fe trouvent
enfermées dans une portion de terre
qui fe durcit à l’entour , il fe forme un
corps qui contient les parties qui donnent
la vie.
Quant aux coquillages qui croiflent
fur les rochers, notre Philofophe attribue
leur formation à un fel volatil, qui
fe répand de la mer fur le rivage ; & il
croit qu’il n’y a aucune femence propre à
perpétuer leur efpece , & qu’à l’exemple
des plantes, ils croiflent de rejetions.
La derniere partie du Traité fur les
animaux qui n’ont point de fang *-a pour
objet les zoophytes. C ’eft le nom qu’on
donne à des corps marins dont la nature
tient de l’animal & la figure du végétai.
On les appelle auflï plantes animales ou
animaux plantes. Il y en a deux fortes î
favoir , des zoophytes immobiles 8c des
zoophytes mobiles. Les principaux font
la verge marine > l ’ortie de mer, 8c la té-
thye (i)*
VA N D E.
La verge-marine reflemble I unmettl-1
bre viril : fa couleur eft roufle, 8c foii
corps eft fans os : elle s’alonge, s’enfle 8c
fe raccourcit comme les fangfues : feS
mouvements fon lents, 8c fa peau fe ramollit
lorfqu’elle fe remue de fon plein
gré.
Il y a deux efpeces d’orties de mer,d’immobiles
8c de mobiles. Les premières ont
la forme d’un cône tronqué , dont la bafe
eft fortement attachée fur des pierres. Il
y en a de diverfes couleurs, de verdâtres,
de blanchâtres 8c de couleur de rofe.
L’ortie mobile ou errante eft une mafle
fpongieufe , ronde, creufe 8c percée au
milieu : elle eft tranfparente 8c d’un lui—
fant à éblouir : elle a fi peu de confiftance
qu’elle fond dans la main, 8c on ne croi-
roit pas que c’eft un animal, fi on ne lut
voyoit un mouvement de fyftole 8c de
diaftole, feul ligne de vie qu’elle donne.
Enfin la téthye a la figure oblongue,
laquelle eft percée de deux petits trous à
chaque extrémité, & fa couleur eft roufle
8c fafranée. C ’eft un animal quant au
fentiment 8c au mouvement, mais elle
reflemble aux plantes par la fimplicité de
fa ftru&ure 8c de fon méchanifme.
On connoît une forte de téthye fphéri-
que, dont la furface eft couverte de tubercules
inégaux, 8c qui reflemble aflezàla
racine de l’iris. Elle marche en fe roulant
lorfqu’elle eft jeune ; mais dans fa vieil-
lefle elle eft fouvent incapable de fe rouler
: elle s’attache alors à des corps étrangers
, qui l’empêchent de fe tranfporter
d’un lieu à un autre : elle devient par là
immobile j 8c alors de l’état d’animal parfait,
elle pafle à celui de planre-animale.
On peut juger par ces trois exemples
combien doit être intéreffant le livre de
notre Philofophe fur ces animaux : il n’eut:
pas la fatisfacfcion de le publier lui-meme,
& fon ouvrage parut en 16o6, un an apres
fa mort, fous ce titre : De reliquis anima-
libus exanguibus j nempe de mollibus *
cruftaeeis, tejlaceis & -{oophytU, l'ib> JF*
pojl mortetn auclçris editi,
C ’eft Je fort qu’eurent fes autres pro-
A L D R O
âu&ions ; encore ne les laifla-t-il pas
complettes quand il mourut : plufieurs
Savants les mirent en ordre, fuppléerent
à ce qui leur manquoit, 8c les firent imprimer.
Elles avoient pour objet l’hiftoire
des Poiflons 8c des Baleines,celledesQua*
drupedes , des Serpents 8c des Monftres. Aldrovànde ne négligea rien afin de
connoître 8c faire connoître tous les animaux
qui font fur 1a. terre. Son zele pour
les progrès de la Zoologie eft tout-à-fait
extraordinaire : il confuma à cette étude
fes biens 8c fes jours.
On définit le poiflon un animal fan-
guin, qui vit continuellement dans l’eau,
qui eft couvert d’écailles, ou d’une peau
unie 8c fans poils, qui refpirepar les poumons
ou par les ouies , 8c qui n’a point
de pieds. Il y a cinq efpeces de poiflons ;
i ° . des poiflons qui ont les nageoires mol.
le s , comme les carpes , les alofes, le ha-
areng, l’anchois, la lardine, le faumon, le
brochet, la foie , la limande , l’anguille,
&c. i p. des poiflons qui ont des nageoires
épineufes, tels que les muges, les perches
, la vive, le rouget, &c. 30. des
poiflons qui ont des nageoires cachées,
qu’on 11e connoît point dans nos mers 3
4°. des poiflons qui ont les nageoires car-
tilagineufes , comme l’efturgeon : enfin
la cinquième 8c derniere forte de poif-
fons renferme les grandes bêtes marines,
comme les baleines, le cachalot, 8cc. Aldrovànde a décrit dans un ouvrage
la plupart de ces poiflons, 8c il a
prefque toujours enrichi fes deferiptions
d ’obiervations très intéreflantes. Son livre
eft intitulé : De Pifcibus libri quinque,
& de Cetis liber unus. 11 parut en 1613
par les foins de Corneille Uterverius 8c
d ’Hiéronime Tamburin.
Ces mêmes perfonnes mirent aufli au
jour une partie du Traité des Quadrupèdes
, que compofa notre Philofophe 3
& l’autre partie fut publiée par un Savant,
nommé Ambrofin. Aldrovànde s’étant
abfolument dévoué à l’étude de la Zoologie
, il ne pouvoir fe difpenfer d’étudier
l’Hiftoire Naturelle des Quadrupèdes
, qui en eft une partie fi confidera-
Tome FUI»
F Ä N D E . ' n
ble. Aufli s’en occupa-t-il jufqu’à la fitf
de fes jours.
Il compofa l’hiftoire des Quadrupèdes
folidipedes, ou qui n’ont qu’un feul ongle
aux pieds, comme l’âne , le cheval, le
zebre , 8cc. celle des Quadrupèdes qui
ont le pied fourchu, ou bifulques , comme
le boeuf, labrebis, la chevre, le cerf3
8c l’hiftoire des Quadrupèdes qui ont des
doigts ou des griffes.
Notre Philofophe renferme dans cette
divifion un très grand nombre de quadrupèdes
, qu'il décrit avec aflez d exactitude.
J’ai déjà dit qu’il n’oublia ni dépen-
fe s , ni veilles, ni voyages pour voir lui-
même les chofes fur lefquelles il vouloit
écrire. Il marchoit accompagné de Def-
finateurs, de Peintres, de Graveurs, 8c
de Sculpteurs, à qui il donnoit de gros
appointements .Ces dépenfes le ruinèrent:
i f fe vit enfin réduit à la derniere extrémité
3 8c il mourut aveugle en 1605 à
l’hôpital de Bologne, âgé de Bo ans.
C eft un exemple bien parlant, die
Baylet de l’ingratitude du public. Voilà
une belle récompenfe pour de fi grands
fervices qu’il lui a rendus: Le P. Niceroti
trouve ce procédé fi révoltant, qu iln ofe
pas le croire : » Il ne paroît pas trop pro-
» bable, dit-il, que des perfonnes qui
a l’avoient aidé jufques là de leurs lihe-
» ralités, 8c que le Sénat, à qui il laifLt'
»» toutes les raretés naturelles qu il avoit,
» l’aient abandonné jufqu’à ce point ».
Mais il n’eft pas queftion ici de probabilité.
Tous les Hiftoriens d’ALDROVANDE
aflurent quil mourut comme je viens de
le dire ; 8c on ne détruit pas un fait pat
une conjeéture.
Le P. Niceron ajoute cependant » que
» cela s’accorde avec ce qu'Alidofi rap-
»» porte, qu’il fut porté en grande pompe
»> dans l’églife de Saint Etienne, où il fut
» enterré ». Pourquoi non ? Rien n’eft
plus ordinaire que de voir un homme de
mérite délaiflfé pendant fa v ie , 8c preco-
nifé après fa mort. C ’eft là le temps ou les
ennemis 8c les rivaux fe taifent, parce-
qu’ils ne craignent point la préférence.On
fefaitmêmeundevoirdele louer lorfqu’il
C