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P xxij D I S C O U R S il faut avouer auffi que le calcul n’en ont pas tant profité, parce
algébrique & les nouveaux cal- qu’elles ont pour objet le rnouveculs
n’ont rien de lumineux. Dans ment, la vîteffe, la force, &c. tou-
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ces calculs, fuivant M. de Fonte- tes çonnoiffances'métaphyfiques fur
! ■ nelle , la certitude nuit à la clarté. lefquelles le calcul a peu de prife.
1 i Cet illuftre Auteur compare ingé- Mais une fcience qui n’eft éta-
1 1 nieufementle calcul à l’expérience. blie que fur le calcul, c’eft la Chro-
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L e calcul n’eft guère en Géomé- nologie, ou la fcience des temps.
l^fl trie , dit-il, que ce qu’eft l’expé- Les Mathématiciens ont bien don- 1
■ 1 1 rience en Phyfîque, & toutes les né les principes de cette fcience
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vérités produites par le calcul, on qui eft une partie de l’Aftronomie ;
1 pourroit les traiter de vérités d’ex- mais ils ne font point entrés dans
périence (a). les détails qui dépendent de la con-
IBH 1 Voila ce qu’on appelle favoirap- noiffance de l’Hiftoire. Ge font les
1 J précier les chofes. Ilfauts’en tenir
là , & convenir que comme ce calérudits
qui ont fait cet ouvrage.
j Comme elle tient cependant aux
cul demande plus de patience & de Mathématiques, j’avois réfolu d’a-
temps que d’invention, il a dû être bord de joindre à l’hiftoire des Ma- fl ,[ ! plus cultivé que toute autre bran- tliématiciens celle d’un Chronolo-
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B i1 che des cor.noifïances humaines, gifle : mais la vie d’un Chronolo-
I B parce qu’on trouve plus de gens gifle eft fi différente de celle d’un
IHh patiens & laborieux, quedeshom- Mathématicien, que je perdois abmes
d’efprit ou de génie qui inven- folument l ’unité , fi néceffaire dans
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tent. Auffi y a-t-on fait des progrès une compofition ; de forte qu’en H-
! étonnans. Les Mathématiques ont fant cette v i e o n ne fe feroit plus
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beaucoup gagné à cela. Par-tout retrouvé avec les Philofophes qui
B 1 ! i i où il a été néceffaire de mefurer, compofent ce volume. Il convient
d’évaluer, de déterminer, il a été fans doute de fuppléer à cela dans
d’un merveilleux fecours. Voilà ce Difcours., par l’hiftoire du Saf
l ■ pourquoi on a pouffé fort loin la vant que je devois affocier aux Ma-
Géométrie, l’Aftronomie & l’Opd- thématiciens. C’eft ce que je vais
s
que ; parce que dans ces fciences, faire le plus brièvement qu’il me
IHK 1 tout fe réduit prefque au calcul. On fera poffible.
1 1 pofe des principes, on obferve, on Le Savant dont je veux parler,
fait des expériences, & on calcule. eft Jofeph-Jufte 1 Scaliger ( b ), un des !
fl La Méchanique , l’Hydraulique, plus beaux génies qui ait paru dans
1 ( a ) Voyez la Préface des Élémensde la Géo-
fnétrie de i infini. Par M. de Fontenelle.
celui de Scaliger, pour fe conformer à l’ufage
des Savais du temps , de l^tinifer leur uoiq.
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(b) Sop jpin eft Lefcale , if. il In changé etv
le monde. Il eft le premier qui a
entrepris de faire une Chronologie,
ou d’établir des principes sûrs pour
foumettre l’Hiftoire à des règles,
& la ranger en un ordre exa£l;
& il a exécuté cette entreprifeavec
une grande Connoiffance des Langues
grecque, latine & orientales,
& par le fecours d’une érudition
immenle. C ’eft fur-tout d’après des
recherches très-profondes qu’il a
faites dans les Auteurs d’Orient &
d’Occident , qu’il a pris des principes
affinés de Chronologie , &
qu’il a fixé le temps auquel les évé-
nemens les plus remarquables font
arrivés. Ce qui caïatlërife fur-tout
fon ouvrage, & qui lui fert de bafe ,
c’eft l’invention d’une période qui
renferme des- marques certaines
pour la diftinEtiori des temps, fans
lefquelles tout le travail des Chro-
nologiftes eft inutile, ou du moins
très-épineux & très-difficilè.
" Scaliger l’a nommée Période Julienne
, parce quelle eft compofée
^d’années juliennes dè jours
& 6 heures précifes. C eft un cycle
ou cercle d’années de 7580 ans,-
Dans tout le cours de ce cycle ,
les années font parfaitement distinguées.
Cette Période eft formée par
le produit de -trois cycles. ; du
cycle d’indiâion, qui eft de quinze
années juliennes ; du cycle lunaire
ou nombre d’o r, qui eft de dix-
neuf ans ; & du cycle folaire, ou
des lettres dominicales, qui eft
un cycle de vingt-huit ans. Chaque
année de cette période a lès
noms particuliers des trois petits
cycles qui la dillinguent, & qui ne
peuvent fe trouver dans aucun autre.
Elle fert donc à caraEtérifer fi
bien chaque année , que l’une ne
peut jamais être prife pour l’autre j
& elle fournit en même temps une
époque, qui eft l’époque des époques,
pour compter en defcendant
fuivant l’ordre naturel. Elle eft
ainfi une époque fixe , qui tient
lieu d’époque de la création du
monde. On fuppofe qu’elle a commencé
4713 ans avant Jefus-
Chrift.
Scaliger étoit né a Agçn dans
laGuienne, le 4 Août 1540, de
Jules-Céfar Scaliger , ilfu des anciens
Princes de Vérone, & l’un des
plus honnêtes hommes qui aient
vécu. On dit qu’il haïffoit fi fort le
menfonge, qu il ne vouloir avoir
aucune forte de liaifdn ou de commerce
avec les menteurs, Il fut
auffi un des plus favans hommes de
fon temps. Son fils hérita de ces
deux grandes qualités. Il apprit
toutes les Langues avec une facilité
incroyable, & fît des progrès
rapides dans les fciences. Il fe fît
connoître des Savans à iage de
vingt ans par un ouvrage digne
d eux. Il eft intitulé : ConjeElanea
in NI. Terentium Vtrronem de Lin-
gaa latinâ. Plufîeurs autres écrits
fur la Littérature ancienne & fur
la Théologie, fuiyirent de près ce