l’origine des animaux qui doiven t dev
en ir h om m e s ; & il ne t rou v a rien de
plus vraifemblable que d’admettre q u ’ils
éto ien t tou s répandus dans l’air o u ils
v o lt ig en t ; que tontes les créatures les
prennent par refpiration ou par les
alimens ; & que ces animaux qu’on
a v a le ainfi , v o n t fe rendre dans les
pa rtie s de la génération des mâles ,
o i i i ls trouvent de la nourriture jufqu’au
moment de l’ a â e de la copulation ( b ) .
H a r t s o e k e r étoit toujours à P a r is ,
pendant qu’il s’ occupoit de toutes ces
ehofes. C om m e rien ne l’y re ten o it , il
en partit en 16 79 Pour retourner dans
fa patrie. Il s’ y maria en arrivant. Rendu
ch e z lu i , & jouiffant des premières douceurs
du m a r iag e , il femble que rien ne
d e v o it manquer à fa latisfa&ion : cependant
il regre toit Paris. Il partait fou vent
à fa femme de sagrémens de cette grande
V i l le ; & il lui échauffa a in f i, fans le v o u lo
ir , tellement fon imagination , qu’elle
fouhaita en faire le v o y a g e . C e tte pro-
pofition fut très - agréable à fon epou x.
Ils partirent fur le champ pour Paris ,
o u ils reliè rent quelques femaines, &
Madame Hartfoeker ne le quitta qu’ à con dition
qu’ils y reviendroient faire un plus
lo n g féjour. En effet ce projet fut e x é cu
té dans peu de temps. A prè s a v o ir mis
ordre à leurs affa ires, ils v inrent y paffer
qua to rze années de fuite : ce fo n t , félon
n o tre P h ilo fo p h e , les années les plus
agréables de fa v ie.
L o r fq u ’ il é to it ch ez fon Maître de Mathématiques
, il a v o it appris à p o lir les
v e r r e s , & a v o it fait des v erres de téle f-
copes. D ’autres occupations lui a voien t
fait abandonner ce lle-ci : mais étant plus
à portée à Paris que dans fa Patrie d’en
f a i r e , il voulut la reprendre. Il fe p ro cu
ra tous les inflrumen s & outils né-
ceffaires pour c e la ; & ay ant appris que
les meilleurs v e r re s qutan eût n’ étoient
pas a llez g ran d s , il vou lu t enchérir fur
c e u x - là .
C e s v e r re s étoient à l ’O b fe rv a to ire en
la dilpofition de M. CaJJini. L e p rem ier'
v e r re que lit n otre Philofop he fut donc
deftiné pou r ce grand A ftron ome. M.
CaJJîni l ’e x am in a , le trouva fo r t mauv
a is . U n fécond ne v a lu t pas mieux ;
mais un troilième fe trou v a paffable. C e
fut toujours M. Cajjini qui en décida. Il
admira la confiance de notre Philofop he ;
comme cette vertu eft fort propre
pour acquérir de grandes connoiffances,
il prédit qu’HA&TSOEKER deviendroit
un grand homme. Il l’exhorta à continuer.
Encouragé par ce luffrage, notre
Philofophe le remit au travail avec une
nouvelle activité ; fit de bons verres de
toutes grandeurs, 6t un fur-tout de lix
cens pieüs de foyer, dont il ne voulut
jamais le défaire à caufe de fa rareté.
C ’étoit véritablement le plus grand
v e r re q u ’on pût faire dans des baflins. Il
comprit cependant q u ’il n’étoit pas im-s
polüb le d’a v o ir des v erres d’un plus g rand
fo y e r . En faifant des elfais fur des mo.r*
ce.uix de g la c e , il en trou v a un q ui
a v o it une courbure fi in ù n f ib îe , que fon
fo y e r étoit de dou ze cens pieds. Il con çut
de-là q u ’en donnant une cou rbure
infenfible au x tables de fer p o l i , fur le fi
quelles on étend le ve r re fon d u , il pou rra
it a v o ir de grands v e r re s qui au raient
le même fo y e r .
C e tte idée en produifit une autre ; &
d’ idées en id é e s , il parvint à faire une
th éo r ie de la D io p t r iq u e , c’eft-à -dire
de la fcien ce de la ré fraû io n de la lumiè
re. A y an t mis ces idées en ordre , &£
les ay an t re&ifiées par l’e x p é r ie n c e , il
compofa un Ejjai de Dioptrique, qu’il fît
imprimer en 16 9 4 à P a r is , o ii il étoit
tou jou rs. Il démontra dans cet O u v ra g e
toutes le s . règles pour déterminer les
fo y e r s des v e r re s lphériques , le rap-?
port des v e r re s objeêfifs & oculaires ;
d’oii il déduifit les ouverture s qu’il faut
laiffer aux lunettes , le champ qu’on peut
leu r donner , le d ifférent nombre de ver?
ik) Ce fyftcmp reflembjç un peu à celui des jnole'cules organiques, qui a fait tant de bruit il y a
environ vingt ans,
1 |J
res qu’ on peu t y m e t t r e , & l’exp lica tion
de l’ augmentation de l’objet» Il jo ign
it à cela l’ art de tailler les v e r r e s , fans
rien déguifer de la pratique q ui lui étoit
p r o p r e , & n’oub lia pas les mic rofcopes
& les petits animapx qu’ il a v o it dé cou v
e r t par leu r moj(^h dans la femence des
mâles*
S ’é lev an t enfuite à une th éo r ie plus
g én é ra le , il donna un fy ftêm e de la ré fraction
, fon dé fur une fuite d ’expérience
s qui lui d é vo ilè ren t cette belle v é r ité
d’Op tiqu e : la différente réfrangibilité
( que Newton a v o it déjà remarquée )
v ien t de la différente v îte ffe des ra y on s
de la lumière. Il tira de -là une con fé-
quence qui étonna tous les P h y f ic ien s ,
pa rce qu’ elle forme un pa radoxe inoui
en D iop tr iq u e . C ’eft que l’an g le de ré fraction
ne dépend pas de la ieule réfifi
tance des m ilie u x , mais elle dépend aufîi
de la v îte ffe des rayon s de lumière : de
for te que plus un ra y on a de v î t e f f e ,
moins i l fe brife.
.. Il termina ce t Effai de D io p t r iq u e p ar
un efiài de P h yfiqu e générale : ce n’étoit
q u ’un effai qu’il d é ve lopp a bientôt dans
une autre production qui fu iv it de près
ce lle-ci.
, Cepend ant tous les Savans firent le
plus grand accueil à cet Effai de D io p t r iq
u e . Il lui procu ra l’amitié de M. l’A b b é
Gallois, & l’eflime du Marquis de Lho-
pital & du Père Malebranche. C e s S a v a n s ,
■ qui reconnurent par là qu’ il étoit b on
G é om è t re , vou lu ren t l’engager à appren
dre la n ou ve lle G éom é tr ie de l’infini
, mais il la ju g eo it peu utile pour la
P h y fiq u e ; & comme il s’étoit d é vou é à
l ’ étude de cette fcience , il cra ignoit que
c e lle des n ou ve aux calculs ne l ’en déto
u r n â t , ou du moins qu’elle ne lui f î t
.perdre un temps qu’ il v o u lo it abfolument
facrifier au x progrès de la Phyfiqu e. Il
d ifo it qu’on pou v o it être bon Phyjîcien
£fans ce calcul, & mauvais Phyjîcien avec
ce calcul.
Il tint donc ferme con tre les follicita -
tions du Marquis de Lhopital & du Père
MqUbranche > ôc continua fes études o r dinaires.
Il a v o it publié un Effa i de P h y fique
géné rale dans fon E ffa i de D io p trique
. C e n’ é to it qu’un Effa i qu’ il s’é to it
promis de r e v o ir . C ’ efl: aufîi c e q u ’il
fit fans d é la i; & il tra v ailla a v e c tant
d ’a rd eu r , que d eu x ans après la publication
de fon Effai de D io p t r iq u e , il mit
au jou r des Principes de Phyjîque. Il y e x -
p o fa a v e c affez d’étendue le fy ftêm e qu’ il
n ’a v o it fait qu’ébaucher dans fon p re mie
r O u v r a g e , & traita de toutes les
grandes parties de la Ph y fiq u e .
L e fon d de c e fy ftêm e eft qu’ il n’jr
a q u ’une fubftance dans l’u n iv e r s , q u i
e ft diftinguée en d eux différentes for tes
d’ê t r e s , qu’ il ap pelle prem ier élémen t
& fécond élément. L e prem ier élémen t
e f t , félon lu i , infiniment étendu & dans
une a ftio n &c un mou vement perp é tu e ls,
par-tout homo g èn e , c’ e ft-à -d ire de même
n a tu re , & pa rfaitement fluide. L e
fécond eft comp ofé de petits co rps d iffé-
rens en g ran d eu r , parfaitement durs 8c
in a lté ra b le s , qui nageant confufément
dans le p remier é lém en t, s’y rencontrent *
s’y affemblent & forment les corps.
D e cette fo rm a t io n , H a r t s o e k e r
déduit toutes les proprié té s des c o r p s ,
qu’il e x p liq u e , à commence r par la te r re ,
le fo le i l , les planètes & les éto iles. Il
examine enfuite la terre en pa rticulier ,
& tâche de rendre raifon du flu x & r e flu
x de la mer , de la nature & des p ro prié
té s de l’aiman , des feu x fouterrains
& des tremblemens de terre , des v ents,,
des m é té o re s , de l ’or ig in e des. fontaines ,
des puits & des r iv iè res.
T o u t c e c i e ft traité fo r t fy ftém a tiq u e -
ment , S>C pn peut le dire , d’une manière
un peu fuperfic ielle. Il eft y ra i que
l’ intention de l’A u teu r é to it de n’établir
que des principes g én é r a u x , fur la bonté
defquels il v o u lo it confulter les Savans
ayant que de s’engager dans des détails.
E t ce qui juftifie ce tte in ten t io n , c’eft:
l’O u v ra g e qu’il publia quelqu es années
a p rè s , dans lequel il ap profondit les mêmes
; matières.
Perfuadé fans doute que c ’étoit là fon
in ten tion , un Profeffeu r de Philofophie
E