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les folidipedes ou les quadrupèdes qui
n’ont qu’un feul ongle aux pieds, c’eft-à-
dire les chevaux , les ânes, les mulets ,
les chevres, les licornes, les zébrés, l’éléphant
, le boeuf, la brebis , le mouton,
lfi gazelle, l’élan , le cerf, le rhinocéros,
le chameau , le camélopard, le cochon,
le fanglier, l’hippopotame ou cheval de
riviere. Le lion commence le fécond livre
où il s’agit des quadrupèdes fifli-
pedes ou digités. C ’eft le roi des animaux.
11 a le regard alluré, la démarche
fiere, la voix terrible : il eft tout nerf 8c
tout mufcle , 8c cette conftruétion lui
donne une force prodigieufe, qui le
rend maître de tous les animaux. Cependant
fa colere eft noble, fon courage magnanime
, fon naturel fenlible. Il con-
i'erve la mémoire & la reconnoiflànce
des bienfaits $ mais aulli il garde le fou-
venir des mauvais traitements, 8c il pa-
roît en méditer la vengeance.
Le tigre marche après le lion : il n’eft
pas li fort que lui, mais il eft plus à craindre.
Le lion n’attaque jamais l’homme s’il
n’eft provoqué : il ne chalTe que quand
il a faim } au lieu que le tigre, quoique
raflafié de chair , ne refpire que le fang.
Ses yeux font hagards, fa langue couleur
de fang, toujours hors de la gueule. Il
n’a pour tout inftinéfc qu’une rage confiante
, une fureur aveugle, qui lui fait
dévorer fes propres petits, 8c déchirer
leur mere lorfqu’elle veut les défendre.
Il ne craint aucune créature : il égorge &
dévafte tout, & ofe même braver le
lion. C ’eft de tous les animaux le feul
dont on ne peut fléchir le naturel. Ni la
force, ni la contrainte, ni la violence
ne fauroient le domter : il s’irrite des bons
comme des mauvais traitements : il déchire
la main qui le nourrit comme celle
qui le frappe , & rugit â la vue de tout
être vivant : ni l’habitude ni le temps ne
peuvent tempérer fa férocité, 8c ne font
qu’aigrir fa rage. Tout le monde fait que
la forme d’un tigre eft celle d’un chat : il
y en a de différentes grandeurs ; 8c celui
qu’on nomme le tigre royal, lequel eft
extrêmement rare, eft grand comme un
cheval.
T o N.
Viennent enfuite le léopard, la panthère,
l’once, le goulu, l’ours', les
finges , le pareffèux, la marte, le caf-
to r , le tatou, lelievre, les lapins, l’écureuil
, l’armadille, le porc-épic, les
chiens, les chats, les rats, les fouris,
les grenouilles 8c les crapauds.
La panthère, le léopard 8c l’once font
trois animaux de même genre. La panthère
a la taille 8c la tournure d’un gros
dogue : elle a l’air féroce, l’oeil inquiet *
le regard cruel, 8c le cri femblable à ce*
lui d’un dogue en colere. Sa langue eft
rude & très rouge : fes dents font fortes 8C
pointues, fes ongles aigus 8c durs : fa peau
eft belle 8c femee de taches noires arrondies
en anneaux, tCet animal eft d’un ca-
raétere fier 8c peu flexible : on le domtô
plutôt qu’on ne l’apprivoife.
Le léopard a le même naturel que la
panthère j mais l’once s’apprivoife aifé—;
ment : elle fe laifle manier 8c carefler.
L’ours eft aflez connu : le finge ne i’eft
guere moins j cependant c’eft un animal
fifingulier, qu’il mérite une attention particulière.
Il n’y a point de bête qui re£
femble à l’homme plus que lui. Il eft très
ingénieux dans toutes fes fonétions. Egalement
fenfible au bien-être & à la aé-
trefle, il témoigne en tout temps fes pa£
fions d’une maniéré très expremve. Si on
le bat, il foupire, gémit, pleure, 8c
pou (Te, fuivant les cas, des cris d’épou-,
vante, de douleur, de colere oud’irri-
fion. Ses grimaces 8c fes poftures font
d’ailleurs très comiques. Les finges ob-
fervent entre eux une certaine difcipline,’ 8c exécutent tout avec une adrefle, un®
fubtiliré, & une prévoyance admirables-
w Quoiqu’habiles au pillage, dit l’Auteur
du Diétionnaire univerfel d’Hiftoire Nar
turelle ( art. Singe ) » ils ne font guère
» d’expédition importante qu’en troupes.
» S’agit-il de dévafter une melonniere
»» confidérable ? une partie d’entre eux
» entre dans le jardin, fe range en haie à
» une diftance médiocre les uns des au-
» très \ ils fe jettent de main en main les
» melons, que chacun reçoit adroite-
»> ment, 8c avec une rapidité extrême.
» La ligne quils forment finit ordinaire-
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# inent fur une montagne. Tout cela fe
v fait dans un profond filence ».
Le parefleux eft de la grandeur d’un
tenard de la moyenne taille : fa tête ref-
femble beaucoup à celle du finge j il aies
yeux fort endormis , 8c rit & pleure en
même temps. Cet animal fe traîne plutôt
qu’il ne marche ; il fait à peine cinquante
pas par jourj il a une voix claire comme
le cri d un chat, mais qui prononce gravement
i i i i i fur le ton des notes la, fo l,
fa mi, ré*
C ’eft encore un animal bien fingulier
que le caftor. Les caftors, dit M. de Buf-
fon , font peut-être le feul exemple qui
fubfifte comme un ancien monument de
l ’intelligence des brutes, qui, quoiqu’in-
finiment inférieure par fon principe à
celle de l'homme, fuppofe cependant des
projets communs 8c des vues relatives }
projets qui, ayant pour objet une digue
â conftruire, une bourgade à élever, une
efpece de république à fonder, fuppofent
aufli une maniéré quelconque de s’entendre
& d’agir de concert. En effet, les caftors
font des ouvrages de maçonnerie avec
une intelligence prefque humaine.
Ils logent dans des cabanes, 8c pour
bâtir ce logement, ils choififlent toujours
un endroit abondant en vivres, arrofé
d’une petite riviere , & propre à y faire
un lac. Ils commencent par conftruire une
chauflee de hauteur fumfante pour élever
l ’eau jufqu’au premier lit de leurs logements.
Cette chauffée a dix ou douze
pieds d épaifleur dans fes fondements, 8c
diminue peu a peu jufqu’en haut où elle
n’a ordinairement que deux pieds. Le
côté de la digue que l’eau touche eft en
talut, & l'autre côté eft à plomb.
Cette chauffée étant finie , ils travaillent
à leurs cabanes, qu’ils fondent toujours
folidement, tantôt fur le bord de
l ’eau ou fur des pilotis, 8c quelquefois
fur la terre, j mais alors ils ereufent un
foiré de cinq ou fix pieds de profondeur
qu’ils conduifent jufqu’à l’eau. Ces cabanes
font perpendiculaires , 8c terminées
en forme de dôme : elles font difpofées
par étages, afin de pouvoir s’y retirer
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quand les eaux croi fient. Les murailles
ont deux pieds d épaifleur, 8c font faites
des mêmes matériaux que la chauflee,
c’eft à dire de morceaux de bois , comme
de gros pieds de table , dans lefquels font
entrelacés d’autres morceaux de bois plus
petits 8c plus fouples ; le tout couvert de
terre glatfe, qu'ils affermifiènt avec leur
queue.
Le dedans de la cabane eft voûté : elle
a huit ou dix pieds de large, fur dix ou
douze de pieds de long.
Il y a dans chaque cabane un magafin
qu’ils rempliflent d’écorces d’arbres & de
bois tendre, leur aliment ordinaire. Ses
habitants y ont tous un droit commun :
ils ne vont jamais piller leurs voifins, 8c la
paix régné toujours chez eux fans altération.
Le caftor eft un quadrupède amphibie :
il a trois ou quatre pieds de longueur } fa
tête eft prefque quarrée j fes oreilles font
rondes & fortcourtes^fesyeux font petits}
il fe fert de fes pieds de devant comme
de mains avec beaucoup d’adrefle : les
doigts en font bien féparés j au lieu que
ceux des doigts de derrière font réunis
entre eux par une forte membrane.
Il faut voir dans l’ouvrage de Jonston
1 hiftoire naturelle des autres quadrupèdes
digités ; elle ne contient rien d’aflez
piquant pour nous y arrêter.
Le dernier Livre de cet ouvrage ren*
ferme la defeription des quadrupèdes digités
ovipares, comme les grenouilles 8c
les crapauds aquatiques, le léfard, les
crocodiles, le caméléon, 8c la tortue :
tous animaux aflez connus.
Dans fes voyages Jonston n*avoit pas
feulement étudié la Zoologie, il avoir
aufli cultivé la Botanique 8c la Minéralogie
, 8c fes recherches étoient aflez eon*
fidérables pour former des ouvrages dignes
de voir le jour Notre Philofophe les
mit donc en ordre. Il publia le premier
en i 6<j y fous ce titre : Notitia Regni ve-
getabilisfeu. Plantarum àVete ri bus obfer~
vatarum, 8cc. L’Auteur fait dans cette
Notice 1’énumération des arbres , 8c il
les diftingue tantôt par les feuilles, ta».