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fement dans c e C o l lè g e , qu’ il en devint
Membre en 16 5 7 . Il y fut reçu M aître-
ès-Arts l’année lu iv a n te , & on l’en nomma
prem ier Pro cu reu r en 16 6 1 .
L e D o t te u r Cudworth , A u teu r du
Syftêmc intellectuel de CUnivers, étoit P rinc
ipal de c e C o lle g e . O n pa rloit beaucoup
a lo rs de c e fy ftêm e , q ui eft également
p ro fon d & inintelligible. Il d e vo it arrête
r , félon l ’A u te u r , les pro g rès que le
matérialifme faifoit en A n g leterre. Cudworth
c ro y o i t y oppofer une for te d igu e ,
en expliquant la manière dont D ie u anim
e tou s les êtres. Platon a v o it établi d eux
for tes d’êtres : un qui e x ifte par fa nature ;
l ’autre qui change toujours , qui naît &
meurt continuellement. Cudworth a v o it
d ’abord ad opté ce tte idée de Platon ; mais
n e la trou vant pas dans la fuite a llez fa-
t is fa ifan te , il a v o it imaginé des natures
p la f t iq u e s , a v e c lefquelles D ie u orga-
nife tous les ê t r e s , fans que ces natures
a y en t aucune connoiffance de cette
organifation.
B u R n E t é to it trè s-cu rieu x d’entend
re Cudworth raifonner fur tout cela . Il
pr it ainfi du g o û t pour l’étude du f y f -
tême du monde. Peu content du fy f-
teme intellectuel, il vou lu t en faire un
p h y fiq u e . Ses t ra v au x & fes réflexion s
donnèrent de la conliflance à fes idées.
S ’étant fix é à la théorie de la t e r r e , il
crut p o u vo ir explique r fon o r ig in e , &
la caufe des changemens qui lui étoient
a r r iv é s , en fuppofant q ue ce g lob e avant
le d é lu g e , étoit parfaitement uni , fans
m e r s , fans mon tagn es , fans précipices ;
q u e l’éc liptique ou le ce rcle annuel
qu e le fo le il p a rc o u r t , coincidoit alors
a v e c l ’é q u a teu r , & que l ’a x e de la terre
étoit parallèle à celui du foleil. D e - là
l ’éga lité des jours & des nuits , une
température éga le dans tous les tem p s ,
toujours la même faifon. Le s fleu ves
cou lqien tdes pôles v er s l’équateur , &
venoient fe perdre dans la zone torride.
C ’étoit ic i la partie d e la terre la moins
habitable, pa rce que les ra y on s du foleil y
caufoient fans ce lle une chaleur brûlante.
L e s extrémités de la terre étoient les pa rties
les p lus agréables. A u lïi c ’eft dans un
de fes p ô le s q u ’étoit le P aradis terreflre .
N E T .
L e dé lu ge qui inonda c e g lo b e , dé-
rangea ce Del ordre . Il fut c a u f é , fé lon
notre A u t e u r , pa r le fole il même. L a
chaleur de c e ta lt r e delféchant peu à peu
la terre , la fit fendre d’abord à la fu r -
fa c e , 8c bientôt ces fentes pénétrèrent
fi avant , q u ’elle s ’ou v r it . D an s l ’inf-
tant toutes le s terres s’ é c r o u lè r e n t , &
tombèrent par m orce au x dans un abîme
d ’eau q ui étoit au centre de c e g lob e .
C e tte eau s ’é le v a ainfi au -d effu s de fa
fu r fa c e , 8c y caufa le d éluge u n iv er fe l.
T e lle s furent les premières id ées de
n o tre Philofop he fur l’origine de la terre.
E n les mettant en o rdre , il en forma
un fy ftêm e p h y fiqu e dê ce g lo b e , q u ’il
ju gea digne de v o ir le jou r. Il le fit imprimer
en 1680 fous c e titre : T. Bvr-
N E T I l Telluris theoria facra, originem &
mutadones generales orbis nojlri quas aut
-jam fubiit , aut olim fubiturus efi corn,
pleclens.
Burnet promettoit plus qu’il ne te-
noit. C a r il ne publioit ic i que les changemens
q ui font arrivé s au g lob e de la
t e r r e , 8c il annonçoit au titre ceu x q u ’elle
ép rou v e ra un jou r . C e dernier point for-
mo it la fécondé partie de fon fy ftêm e ;
mais il v o u lo it fa v o ir le fentiment des
Savans fur ce tte première p a r t ie , avan t
qu e de faire imprimer la fécondé.
C e t o u v rag e fut t r è s - accueilli par la
beauté du f ty le . C ’ eft le latin le plus pur
8c le plus beau. Sur le fo n d , les fenti-
mens furent très-partagés. L e R o i Charles
I I en é to it fi c o n te n t , qu’il fit traduire
le L iv r e en A n g lo is ; mais tout le
monde ne penfa pas à la v é r ité comme
ce P r in c e , 8c il parut plufieurs c r it iq u e s .
t rè s - fé v è r e s de ce L ivre .
L e premier qui entra en lic e , fut Herbert
Crofts, E v ê q u e d’Héreford. Il pu blia
à Londres en 1685 des Remarques
fur la théorie de la Terre. C ’eft un éc rit
amer oh les injures tiennent lieu de rai-
fonnemens. N o tre Philofophe ne jugea
pas à propos d ’y répondre : il étoit alors
plus o ccupé de fa fortune que de fa
théorie de la T e r re .
A y a n t été nommé en cette même ann
ée ( 1 6 8 5 ) M aître de l’Hôpital de
Sulton à L o n d r e s , il reçut les O rd res fa :
B U R
c r é s , félon le rit d e la R e lig io n p rétendu
e r é fo rm é e , dont il é to it un ardent
défenfeur. Il manifefta fon zè le en fa v eu r
d e ce tte R e lig io n peu de temps après
a v o ir reçu la Prêtrife.
L e R o i Jacques 1 1 a y an t fuccédé à
Charles I I , vou lu t à fon avènement à la
C o u ro n n e fa v or ife r la R e lig ion C a th o liq
u e . Il p ro tég ea à ce t effet tou s ceu x
q u i la p rofeffoien t. Il les comb loit de
fa v eu r s & de grâces > & il tâchoit de le
faire fans tou ch er au x revenu s de la C o u ronne.
Il leur aflignoit des penfions fur
différentes Communautés. Burnet étoit
d e ven u M aître d e la Cha rtreufe de
Londres. C ’étoit une Maifon fort r ic h e ,
fu r laquelle le R o i crut p o u vo ir prendre
p ou r donner une penfion à un Ca tholiqu e
nommé Popham. Mais notre Philofop he
défendit par de fortes raifons les intérêts
d e la C h a r tre u fe , & s’oppofa a v e c fermeté
au x entreprifes du R o i. Il y a vo it
de la force dans ce tte c o n d u ite , & v é ritablement
la tête de notre Philofop he
étoit organifée de manière à ne pas craindre
les plus violen s affauts. A u fli q u o ique
la première partie de fon fy ftêm e
de la théorie de la T e r r e eût é té attaquée
par l’E v êq u e d’Héreford a v e c
beaucoup d’an im o fité , il n ’en tra vailla
pas moins paifiblement à la fécondé partie
de ce fy f t êm e , q u ’il publia en 1689.
Il s ’agit dans cette fécondé partie de
l ’embraie ment du monde , & des fuites
de ce t embrafement. Elle eft intitulée :
De conjlagratione mundi & de futuro re-
rum Jlatu. L ’A u teu r débute par ce tte ré fle
x ion trè s -ju d ic ieu fe , & par con fé-
quent très-philofophique : Le s bornes de
l ’entendement humain font trè s-p roch e s,
& le déflr q u ’il a de fa v o ir eft grand.
N o u s ignorons le matin ce q ui doit fe
p a lie r le f o i r , & le foir ce qui arrive ra
le lendemain, & nous v oulon s connoître
les événemens qui auront lieu à la fin
du monde ( £ ) . Malgré la jufteffe de
N E T .
ce tte r é f le x io n , Bu r n e t , appuyé fu r c e
pa flage de l’Ecriture S a in te , q u e la te r re
p érira par le f e u , ch erch e la caufe d e
ce t embrafement. C e tte caufe f e r a , félon
lui , le rétabliflement de la terre
dans fon état primitif. Par ce tte r é v o lution
, ce g lob e s’ap prochera du fo le i l,
& par conléqu ent fon mou vement an nuel
fera p lus cou rt. C e t aftre agira donc
a v e c plus de v éh émen ce fur la terre. S a
ch aleur tarira les fon ta in e s , fendra la terre
, 8c pénétrera jufques dans fon centre.
L e feu central n’étant alors plus con ten u ,
s’ exhalera h ors de c e g lob e , 8c l’embra-,
fera entièrement.
L a publication de c e fécon d L iv r e fut
un fignal p o u r a v e r tir les critiqu es d ’attaque
r tou t l’ouv rag e . Charles II, q u i
a v o it p ro tég é le p remier L i v r e , n ’ex ifto it
plus ; 8c Jacques II a v o i t , comme on
v ien t de le v o i r , de bonnes raifons pou r
ne point fa v or ife r l’A u teu r. Il ne lui ref-
toit que fon mérite pou r lui , 8c c’é toit
un m o t if de plus pou r q u ’on l’af-
faillît de toutes parts. C ’eft aufli c e q ui
arriva .
L ’E v êq u e d ’Hé reford a v o it déjà dit
des injures à B u r n e T : mais Erafme
Warren, R e â e u r de W orlington , dans
le C om té de S u ffo lk , vo u lu t donner d es
raifons. Il publia en 1690 un E c rit intitu
lé : Geologia, ou Traité fur l’état de la
terre avant le déluge , où Von combat la
forme & les propriétés qui lui font attribuées
dans un Livre qui a pour titre, T h é o r ie
facrée de la T e r r e , & où Von fait voir
que la'difjolutùm de la terre n’a point été
la caufe du, déluge. On y trouve auffi l ’ejfai
d'une nouvelle explication du déluge.
N o tre Philofop he répondit à cette c ritiq
u e , 8c publia fa réponfe fous ce titre :
Réponfe aux objections deM. Warren fur la
théorie de la Ter/e. Il fe fou vint dans c e t te
réponfe de l’écrit de l ’E y êq u e d ’H é re fo rd ,
non pas pour le r é fu te r , parce q u ’il ne le
ju geoit pas digne d ’une ré fu ta tion , mais
( b ) Angufti funt limites intelleSus humant , UtiJJim* autem voluntas & dejtderium ftiendi. Ntfcimus qui4
vefper vehet , quid dits traftintu > tupimus tamen midis eculii ufqut ad finem mundi profpieert. De COaHagraûOUC
«lundi, pag. 169.
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