former un art. On doit favoir 'ce
qu’on fait ou ce qu’on va faire,
lorfqu’on veut réulfir à quelque
chofe.
Perfuadé de cette vérité, Nicolas
Lefevre établit des principes, raf-
fembla toutes les découvertes qu’on
avoit faites jufques-là dans la Chy-
mie, & les ayant afforties fuivant
leurs différens genres, il compofa
un Cours de Chymie théorique 6c
pratique. La Chymie parut alors
comme une fcience, au lieu qu’elle
n’étoit auparavant qu’un art mécanique
, qui ne demandoit que de
l ’adrelîe 6c de l’opiniâtreté dans les
opérations.
| Pendant que Lefe^ire cultivoit la
Chymie pour le fervice. de la Mé-
decine, Kunckel en jfàt■ oit ofage'
pour perfectionner les Arts. C etoit
un Artifte que la nature avoit doué
d’une fagacité ôc d’une intelligence
qui lui tenoient lieu de favoir. Il
s’ attacha fur-tout à fuivre le travail
d’un habile homme peu connu ,
nommé N cri, qui avoit écrit fur la
vitrification avec le plus grand fuc-
cès. Et fes découvertes réunies à
celles qu’on avoit déjà faites, ont
donné beaucoup d’étendue à la
Chymie , 6c l’ont fait regarder
comme une très-belle fcience.
Mais on fe plaignoit toujours
que les Chymiftes affectaient un
langage obfcur ôc myftérieux qui
étoit inintelligible. C’étoit un refte
de la barbarie que l’ignorance avoit
produit avant la renaiflance des
Lettres. Cependant la lumière fuçcédant
aux ténèbres, il convenoit
de difliper celles qui étoient répandues
fur la Chymie.
- Nicolas Lemeri entreprit ce travail.
Il compofa un Cours de Chymie
, où toutes les opérations de
cette fcience, fur-tout celles qui
ont rapport à la Médecine, furent
décrites avec beaucoup de méthode
ôc de clarté. Il n’étoit affurément
point de moyen plus expédient pour
accélérer les progrès de cette fcience.
Audi Lemeri fit une infinité de
profélites , qui l’étudièrent avec
autant d’ardeur que de fuccès. Dès-
lors on comprit en quoi confiftoit
la Chymie, ôc comment il falloir
s’y prendre pour la perfectionner.
^ Homberg fe propofa de publier
les élémens de cette fcience ; mais
la mort le furprit au milieu de fori
travail. Iilaiiïa fes matériaux épars,
lefqueis contiennent des découvertes
fines, curieufes ôc utiles fur toutes
les parties de la Chymie. Enfin
Boerhaave mit ce-projet à exécution,
fuivant fes vues particulières.
Il reconnut que la Chymie ne pou-
voit être déformais cultivée avec
fuccès, fi on ne la rangeoit point
fous les loix générales de la Phy-
fique. Il voulut la réduire à n’être
qu’une fimple Phyfique claire ôc
intelligible, ôc il y parvint: C’eft ce
qu’il fit voir dans un grand Ouvrage
intitulé Elémens de Chymie, qui
outre les belles découvertes qu’il
contient fur le règne animal, renferme
encore une analyfe du feu
qui eft un chef-d’oeuvre. On fait
que
*que le feu eft le principal agent de
la Chymie, ôc il falloitle connoître
parfaitement pour en faire un bon
jrfage. L ’Auteur a profité dans cette
compofition des travaux ôc des découvertes
de deux grands Chymiftes
qui l’ont précédé , favoir Becker ôc
Sthal.
Boerhaave eft le dernier Chy-
mifte moderne. On a dû s’apperce-
voir que j’en diftingue ici lix, qui
font Parue elfe , Lefevre, Kunckel,
Lemeri, Homberg ôc Boerhaave. La
lifte auroit été plus longue, fi la vie
des autres Chymiftes, tels que Néri,
Becker ôc Sthal, eût été auffi connue
que leurs productions. Pour confo-
ler le Public à cet égard, j’ai rendu
compte de leurs découvertes , en
analyfant celles des Chymiftes dont
j’ai écrit l’hiftoire ; ôc je crois avoir
ainfi expofé toutes celles qui ont
été faites depuis l’origine de la Chymie
julqu’à la mort de Boerhaave.
Il me refte à parler des progrès qu’on
a fait encore dans cette fcience depuis
Boerhaave julqu’à nos jours ,
pour compléter fon hiftoire.
D’abord aux écrits des Chymiftes
dont il eft parlé dans ce volume,
on a ajouté des Ouvrages eftimésôc
très-dignes de l’être. Tels font le
Nouveau Cours de Chymie de M, Sé-
nac, premier Médecin du Roi ; la
Chymie hydraulique de M. le Comtp
de la Garaye, dont le but eft de
tirer les fels effentiels dans les trois
règnes des mixtes par la feule trituration
avec l’eau commune ; la
Chymie médicinale de M, Malmin ;
les Injlitutions de Chymie ( en Latin )
de M. Speilfman ; ôc les Elémens,
théorique & pratique de Chymie de
M. Marquer, Ôcc. Cet Auteur met
encore au rang des bons Ouvrages
fur la Chymie, le Cours de Chymie
fuivant les principes de Newton
de Sthal. *> C ’eft, dit-il, le premier
» de nos Ecrivains qui ait jetté fur
*> cette fcience un coup d’oeil vrai-
» ment philofophique. L ’élégance
» du ftyle ( ajoute-t-il) duDifcours
» placé à la tête de fon Ouvrage
» répond à l’intérêt fine ce favant;
» Auteur a fu répandre fur fon
» fujet.
L ’éloge eft beau ôc le fuffrage de
poids. Cependant l’Editeur du Cours
de Chymie de Lemeri ( M. Baron, de
l’Académie des Sciences de Paris )
apprécie ce livre bien autrement. Le
nouveau Cours de Chymie fuivant
les principes de Newton ôc de Sthal,
eft, fi on l’en croit, » une produc-
» tion monftrueufe , fruit informe
» du zèle éclairé ou plutôt intéw
» relié de quelques Etudians, qui
» ont recueilli tant bien que mal ce
qu’ils ont pu des leçons de MM,
» Geofroi ôc Boulduc au Jardin du
» Roi... Du refte, fi on vouloit ju-
» ger du mérite de Sthal ( e’eft tou-
» jours M. Baron qui parle) par cet
» Ouvrage, on s’en formeroit une
» idée qui ne répondroit guère au
» nom que s’eft fait cet incomr
» parable Chymifte par fes immorr
» telles découvertes ; car quoique
» le nouveau Cours en queftion foit
» annoncé comme étant fondé fui-j
b