120 MU S C HE même vîteffe, ne pourroit parcourir ce
chemin que dans l’efpace de cent quatre
milliards cent foixante - fix millions fix
cens foixante-fix mille fix cens trente-fix
ans.D
e-là il fuit que fi un rayon de lumière
qui fe meut avec tant de rapidité,
avoit la .moindre pefanteur, elleauroit
la même force qu’un boulet de canon
qui pèfe dix livres, 6c qui parcourt fix
cens pieds en une fécondé.
Un rayon de lumière entier, comme
celui qui part d’un corps lumineux , eft
compofé d’une lumière qui fé meut fuc-
ceflivement d’efpace en efpace, 6c d’une
autre lumière qui pafie en même temps.
En effet, un rayon de lumière eft comme
un pinceau compofé de plufieurs autres
rayons de lumière, dont chacun a une
couleur fixe, 6c tous les rayons réunis
s ’avancent en même temps.
Après la lumière, le feu eft le fluide
le plus fubtil. On croit que c’eft l’explo-
fion d’une matière parfaitement élaftique.
Lorfqu’on met dans le feu des corps
froids , ils commencent à fe raréfier lentement,
enfuite vite, 6c puis très-vite;
mais cette raréfaftion fe ralentit à me-
fure qu’ils deviennent plus chauds.
Les corps différens qu’on met dans le
feu , ne fe raréfient pas également vite.
Cette raréfaÔion dépend de la figure de
leurs pores dans lefquels le feu peut s’introduire
plus ou moins facilement. Ainfi
l ’étain fe raréfie plutôt que le plomb,
le plomb plutôt que l’argent, le cuivre
jaune plutôt que le cuivre rouge, 6c le
cuivrç rouge plutôt que le fer.
On a remarqué encore que les corps
folides que le feu raréfie avec plus de
promptitude, font aufïi ceux qui fe re-
froidiffent le plutôt, ou qui fe condenfent
le plus v ite, après qu’on les a retirés du
feu.
Le feu peut raréfier les métaux & les
demi-métaux à un tel point, que leurs
parties fe féparent les unes des autres,
& qu’après s’être ainfi féparées, elles
fe trouvent flottantes dans le feu, 6c
fe réduifent en une matière fluide. Quand
les métaux font fondus, 6c qu’on les a
NB RO E K. fait rougir long-temps dans le feu, il n’efl
pas pornble de les rendre plus chauds,
& ils deviennent volatils, ou fe réduifent
en cendres apres avoir perdu toute leur
huile, ou enfin la terre & le fel qui en
relient, fe vitrifient.
Cependant il ne faut pas conclure delà
quele feu raréfie tous les corps folides;
il en eft que le feu condenfe au lieu de
les dilater. Tels font les hois des arbres,
des arbrifieaux , les parties du corps animal,
comme les os & les membranes. ■
A l’égard des fluides, le feu les raréfie
tous; & la raréfaftion la plus prompte
& la plus grande fe fait dans certains
fluides, fuivant le rang qu’ils ont ici :
l’air, l’aleohol, l’huile de pétrole, l’huile
de thérébentine, l’huile de navet, le
vinaigre diftillé, l’eau, l’eau falée, l’eau-
forte , l’huile de vitriol, l’efprit de nitre ,
& le vif-argent.
De toutes ces expériences & ob-
fervations , il fuit que le feu pénètre
tous les corps. Il remplit d’abord les in-
terftices des grandes parties ; il fépare
aufli ces parties lys unes des autres ; il
s’infinue enfuite dans les pores d’autres
plus petites parties ; de forte qu’un corps
étant pénétré de tous côtés par le feu
qui le perce & le remplit, fe gonfle né-
ceflairement, & fe dilate.
Le feu qui s’introduit en fi grande quantité
dans les corps, s’y arrête aufli, &
augmente leur poids. Ayant mis une once
deïimaille de cuivre dans un creufet bien
lutté,fi on l’expofe trois heures de fuite
à un feu de réverbère, cette limaille
étant refroidie devient noire, & elle pèfe
alors quarante-neuf grains plus qu’aupa-
ravant. Le mercure bien pur fe convertit
par le feu en une poudre rouge qui eft
plus pefante que le mercure.
Cependant une barre de fer rougie au
feu ne pèfe pas plus qu’une barre froide,
parce qu’elle perd vraifemblablement autant
de poids par l’évaporation de quelques
- unes des parties, qu’elle en gagne
par.l’acquifition qu’elle fait du feu qui la
pénètre.
On doit conclure de ces effets : i " .
Que le feu eft un corps, puifqu’il s’étend
de
MUS CHÈ
de tous les côtés en fe dégageant du
corps chaud qui le contenoit, 6c qu’il
s’infinue alors ou dans d’autres corps, ou
dans l’air : 2°. Qu’il eft compofé de parties
très-fubtiles, puifqu’il s’infinue dans les
pores de tous les corps.
L’air occupe le troifième rang parmi
les fluides les plus fubtils. Sa fluidité eft
très-grande, à caufe de fa rareté, de fa
mobilité, 6c de la rondeur de fes parties
qui ne s’attirent que foiblement. Il eft
pefant, 6c comprime tous les corps par
fa pefanteur : il eft élaftique. C ’eft ce
qu’on reconnoît quand on le condenfe ;
car dès qu’on celte de le comprimer, il
fe dilate, 6c fe remet dans l’état où il
étoit auparavant.
L’élafticité de l’air comprimé eft toujours
en équilibre avec le poids qui le
comprime : ainfi lorfqu’ii eft comprimé
par l’atmofphère, il réfifte avec une
force égale à tout le poids de l’atmofphère.
La chaleur dilate l’air, 6c le froid
le condenfe.
L ’élafticité de l’air varie fuivant qu’il
eft plus ou moins pur; 6c l’air eft d’autant
plus lourd, qu’il eft plus élevé au-
delfus de la furface de la terre ; parce
que les exhalaifons 6c les vapeurs qui
font pefantes, ne peuvent monter que
jufqu’à une hauteur peu confidérable.
Cette élafticité eft comme la denfité de
l’air, 6c ce fluide occupe un efpace qui
eft en raifon inverfe des poids qui le compriment.
On a découvert encore que l’air
rendu ,aufli chaud que l’eau bouillante ,
acquiert une force qui eft au poids de
Patmofphère, comme dix à trente-trois,
où comme dix à trente-cinq.
Enfin le dernier fluide qui refte à examiner
, c’eft i’eau. Ses qualités font d’être
humides, fans goût, fans odeur, 6c
d’être l’ennemi du feu, je veux dire de
l’éteindre. L’eau n’eft jamais pure. Elle
fe purifie par la congélation, parce que
tout ce qu’il y a de Ipiritueux dans Peau
ne le gèle pas. Cette purification eft encore
plus parfaite lorfqu’elle fe refont
en vapeurs , foit que le foleil élève ces
vapeurs , foit que le feu les produife par
l ’évaporation de l’eau.
N B R O E K. 121
On diftingue fi l’eau eft bien pure par
ces qualités ; 1®. Si elle eft fort claire,
fans couleur, fans goût 6c fans odeur;
2°. Si elle refte également claire lorfqu’on
y verfe de l ’argent fondu dans de
l ’efprit de nitre, car elle devient bleue
quand il y a encore quelqu’ordure ; 30.
Si elle ne devient pas de couleur de lait
lor fqu’on - y verfe de l’huile de fel de
tartre ; 40. Si elle eft toujours claire quand
on la mêle avec du fucre de Sature ; 50.
Enfin fi le favon de Venife fe fond d’une
manière uniforme fans fe cailler.
Les parties de l’eau font fi fines, qu’on
n’a pu les découvrir à l’aide du microf-
cope. Elles pénètrent jufques dans les
plus petits vaiffeaux des plantes, des animaux
, 6c dans les pores des métaux. On
a mis en hiver de l ’eau pure dans des boules
d’or 6c d’argent, que l’on aenfuite fou-
dées. Ces boules ayant été mifes fous une
preffe, ou battues à coups de marteau \
ne changèrent point de figure, parce que
l ’eaù ne peut pas être condenfée. Elle
s’écoula de tous les côtés en manière de
rofée parles pores de ces métaux.
Cela prouve que les parties de l’eau
font fort dures, de forte qu’elles ne changent
pas facilement de figure, 6c qu’elles
ne rempliflent pas les intervalles qui fe
trouvent entr’elles. Lorfqu’on tire obliquement
dans l ’eau un fufil chargé de
balles de plomb, ces balles s’applatiflent
du côté avec lequel elles frappent Peau r
comme fi elles avoient été lancées contre
une pierre. Et fi le fufil eft bien chargé ,
les balles fauteront en pièces.
Quand on met de-l’eau-dans un v afe, 6c qu’on met ce vafe fin* un feu, elle
devient chaude , 6c fe raréfie ; de forte
qu’elle augmente la partie de fon vo*
lume, à compter du point d’où elle commence
à fè geler , jufqu’à ce qu’elle
bouille. L ’eau s’évapore par l’ébulition x 6c cette évaporation forme des vapeurs
qui ont une grande vertu élaftique presque
femblable à celle de Pair. Cette vertu
lui donne une fi grande force, qu’étant
comparée avec celle de la poudre à canon,
on trouve qu’elle agit avec plus de
violence que cette poudre. En effet % cent