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tiq u e par le m o y en d’ un co llie r d e c u i r ,
afin de p o u vo ir la pouffer en bas pour
cou p er la v e in e . O n vuida après ce la le
ré c ip ie n t , 6c on pouffa la lancette dans le
vaiffe au fanguin. L e Lang defcendit auffi-
t ô t dans la taffe plein d’air 6c d’écume :
c e qui convainquit tout le monde.
Q u e lq u e temps après ce tte dé cou v
e r te , il voulut exp liq u e r celles qu’a v o it
faites fur le feu un P hyfic ien F ran ç o is ,
fo r t habile > nommé Gauger. Elles étoient
e x p o fé e s dans un L iv r e éc rit en 'F ran ç
o is , 6c intitulé la Mêchanique- du Feu,
q u e n otre Philofop he ju gea d’abord à
p ro p o s de traduire en Anglois. Parmi
c e s d é c o u v e r te s , ce lle de faire entrer
l ’air chaud dans une chambre en le fa i-
fant c ircu le r dans des t u y a u x , l’affe&a
particulièrement. Il crut qu e cela va lo it
m ie u x q ue les p o îles dont on fe fert pour
échau ffer l’a i r , parce q ue dans une chamb
r e ainli é ch au ffée, on refpire toujours
le mêm e a ir : ce q ui eft très-n uifible à
la fanté. Mais comme le feu de charbon
o c cu p e moins d’efpace que le feu de
b o i s , 6c que c’eft là un grand a v an ta g e ,
D esaguliers s’attacha à perfectionner
ce tte manière d’ échauffer une chambre
a v e c du charbon fans que fa v ap eu r pût
incommode r. A cette f in , i l imagina un
m o y en de porter l’air autour d e la grille
d e fer qui environnoit le ch a rb o n , 6c
échauffa de ce tte manière une chambre ,
en ne fe fervan t que de ch a rb o n , aufîi
efficacement que M . Gauger q u i em-
p lo y o it du bois.
A p rè s a v o ir perfectionné la méthode
de ce P h yfic ien pou r échauffer l’air d’une
ch am b re , notre Philofop he vo u lu t fa -
v o i r s’il n’y a v o it pas de danger à ref-
p ire r un air chaud. Il imagina à ce t effet
t ro is expériences.
Il fit d’abord rougir dans un feu de
charbon un cu b e de fer jufqu’à c e que
fa cou leur commençât à pa roître blanch
e . Il le tira alors du f e u , 6c le p ofa
fu r une briqu e. A près d’un p o u c e d’é-
pa iffeur de la briqu e , il fit entrer l ’ex-
, trém ité d ’un tu y au q ui abou tiffoit au récipient
( vtiide d’a i r ) d’une m achine pneumatiqu
e. A y a n t enfuite tourné le r o binet
fur la platine du r é c ip ien t , l’ air e x tér
ieu r q ui a v o it é té enflammé en tra -
verfan t le c u b e , remplit le récipient de
manière q u ’il fut aifé de le v e r la platine
pou r p o u vo ir mettre une linotte fou s le
réc ipient ; 6c ce t oifeau y demeura une
demi-heure fans pa roître incommodé.
Il fit la m ême expérien ce a v e c un cube
de cu iv re r o u g e , 6c une autre linotte
ne fut nullement affeCtée de l’air qui
s’étoit enflammé par c e m o y en . Mais
ay an t fait chauffer un cube de laiton juf-
qu’au point que ces coins commençoient
à fon d re , l’air fut tellement infeété par
la vapeur de ce m é ta l, qu’ une troifième
linotte q u 'il a v o it placée fous le r é c ipient
, mou ru t en deux minutes.
Il éprou v a le même effet en faifant
refp ire r à un oifeau enfermé dans un
ré c ip ien t , un air q ui a v o it tra v e r fé du
charbon allumé. U n e chandelle allumée
mife dans ce t a i r , s’ éteignit d ’ab ord
ap rè s , 6c elle purifia en viron un pou ce
de ce t air. U n e autre chandelle allumée
ay an t remplacé c e lle - c i, elle purifia une
partie de ce t air en s’ éteignant. Enfin
cin q o u f ix chandelles purifièrent de la
même manière l’air du r é c ip ien t, de te lle
for te qu’ un oifeau y ayant été m is , n’en
fut point incommodé.
T an d is qu’ il étoit occupé à faire ce s
expériences , un A v en turie r venu dé
F r a n c e , fe donna pou r l’Auteur du L iv r e
de la Méchanique du Feu, qui eft anon
ym e . Il fe fit con n o ître des principaux
Seigneurs d’A n g le te r re , qui l’accueillirent
comme un S avant. L e D u c de Kent
le pria de lui faire fabriquer une des
machines qui font d écrites dans c e L iv r e .
Q u o iq u e cet homme n’y entendît r ie n ,
il accepta effrontément la propofition. Il
acheta la traduction de c e L iv r e en A n glois
par notre P h ilo fo p h e , 6c l’apporta
à un O u v r ie r pour ex ecu ter la machine ,
en fuivant la defcription ; mais l’O u v r ie r
ne put faire l’o u v rag e a v e c c e feul fecours.
Il en demanda à notre A v en tu r ie r , q u i
n ’étant point en état d e le fa tis fa ire, alla
con fulter D e s a g u l ie r s . Il lui montra
le L iv r e en François qu’il difoit a v o ir
c om p o fé , 6c vou lu t p rop o fe r fes difficultés
;
cu ltes 5 mais il s’ expliqua fi m a l , que
n o tre Philofop he reconnut qu’il étoit un
im p o f te u r , & le fit con n o ître pour tel
dans tou te la V ille .
T o u s fes fuccès lui valuren t la répu tation
du plus grand Phyfic ien qu’il y
eû t alors en Angleterre ; de forte qu’on
l ’appelloit dans toutes les occafions o îi
la connoiffance de la Phyfiqu e étoit né-
ce ffaire . En 172 3 , il fut ch argé par le
Parlement d’ Angleterre de purifier l’air
d e la Ch amb re des Communes.
A ce tte f in , i l fit bâtir deux cabinets
au x d eux extrémités de la chambre q ui
e f t au-deffus de ce lle des C om m u n e s ,
entre d eux pyramides. Il conduifit en-
fu ite un tuyau depuis ces pyramid es ju fqu’à
des ca vité s quarrées de f e r , qui en-
tou roien t une g r ille de feu arrêtée dans les
cabinets. A y a n t allumé du feu dans ces
g rille s avan t que les Commun es fuffent
a ffem b lé e s , l’air s ’é le v a de la chambre
p a r ces ca vité s échauffées dans les ca b
in e ts , & s’échappa d e ce tte manière
p a r les cheminées.
Il imagina après cela une machine pou r
échauffer la Ch am b re des Lord s. Il arrêta
a v e c ce tte machine l ’air froid q ui y ent
ro i t a v e c v io len ce d e tous les côtés à
tra v e r s du f e u , 6c qui par là caufoit des
douleurs au dos 6c au x jambes de c e u x
q u i en étoient proches.
II inventa en core une machine pour
pu rifier une mine de ch arb o n , de p lom b ,
d e c u iv r e , ou toute autre m in e , & en
en le v e r toutes fortes de vapeurs , foit
qu’ elles foient plus légères ou plus p e lantes
que l’a ir commun. Enfin il p ré -
f e n ta le 30 Juin 1 7 3 4 à la S o c iété R o y a le
d e Lond res , le modèle d’ un infiniment
o u machine pou r changer e n . peu de
temps l’air de la chambre d’ un m a lad e ,
fo i t en en faifant fortir le mauvais a i r ,
o u en y introduifant de l’air n o u v e a u ,
o u bien en faifant l’ un 6c l ’autre fuccefi-
fivem en t fans o u v r ir ni les portes ni les
fen ê tre s .
E lle con fifte en une b o îte qui renferme
une ro u e de fept pieds de diam
ètre 6c d’ un pied d’épaiffeur. Elle eft
cylindrique, ôc divifée en douze cavités
pa r des féparation s qui tendent de la
circon féren c e au c e n t r e , 6c qui fon t
élo ign é e s du centre de la diftance de
n e u f pou ces ; elles font o u v e r te s du cô té
du c entre 6c du c ô té de la c ir co n fé ren c e ,
6c fermées à la circon féren c e pa r la
b o îte .
O n fait tou rner la ro u e a v e c une man
iv e lle fixé e à fon a x e . C e t a x e tourne
dans d eux fou rch ettes de fer.
D e l’ autre cô té de la b o îte eft un
tu y au qua rré de bois nommé tuyau cCaf-
piration, qui entre dans la chambre du
malade. C e tuyau en tre dans la b o î t e ,
6c communique a v e c toutes les c a v ités.
L a machine étant ainfi établie dans
une chambre v o ifin e de ce lle du malad
e , on tourne la ro u e a v e c v iv a c ité .
A lo r s l’air eft pompé de la chambre du
malade , 6c porté au centre de la ro u e ,
d’où il eft repou ffé à fa circon féren c e
pou r s’échapper par un tu y a u q ui y eft
adapté.
A mefure qu e le mau vais air fo r t d e
la chambre du m a la d e , un n o u v e l a ir
entre par les petites fentes 6c par les
petits paffages que lui fourniffent le s
chambres voifines.
O n con ço it l’ utilité d’une p a re ille in v
en tion pour les H ôp itaux 6c les Prifons ,
p o u r po r ter dans les chambres les plus
éloign é es de l'a ir chaud ou de l’air f r o id ,
6c fuivan t même le b e f o in , pou r r é pandre
dans les appartemens les parfums
les plus agréables.
Il n’eft pas p o flib le de rend re com p te
ic i de tou te s les v u e s , de toutes les idées
n ou ve lles q u e n otre Ph ilo fop h e a v o it
fu r toutes -les matières d e P h y fiq u e à
mefure qu’ il s ’en occu p o it. Son imagination
n’étoit jamais o if iv e lorfqu ’il e x a -
minoit que lqu e c h o fe , 6c comme ce lle
d e tou s les grands g én ie s , elle v o u lo it
perfection ner tout ce qui fe préfentoit à
elle. Mais je ne puis me difpenfer de
faire con n oître fon Planétaire. C ’eft une
machine qui repréfente dans la v éritab le
prop o r tion le mou vement des planètes.
E lle eft comp ofée d’une b o îte d’ébène
d’en v iron f ix pouces de haut 6c de tro is
L