
I.
V o Y
Pinet tradiiaeiir dc Plîne, & quelques autres Géographes
modernes ont crû que c'étoit 1 Ille de Oleandro
: pour moi je crois que Sicandro cft une
l û e imaginaire; nous n'avons fçû la trouver dans
l'Archipel , ni même en apprendre aucune nouvelle.
Il n'y a qu'un méchant village dans l'Argentiere,
& l'Iile qui eft fort fe'chc & rélevée de monagnes
ttériles, n'a que dix-huit milles de tour. On
n 'y féme de l'orge & du coton qu'aux environs du
village : on y boit du vin de Milo & de l'eau de
c i t e r n e , car il n'y a point de fontaine en tout le
pays ; mais feulement quelques méchants puits :
la vigne it'y fournit des railîns que pour niangcr;
les Vénitiens en ont coupé tous les oliviers dans
les guerres qu'ils ont eilës avec les Turcs : enfin
cette Me cft devenue tout à iiit pauvre depuis que
le Roi ne fouftre plus de Corfaires François au Levant.
L'Argentière étoit leur rendez-vous, & ils
y dépcnfoient en debauches horribles ce qu'ils vcnoient
d e piller fur les Turcs ; les Dames en profitoient;
elles ne font ni des plus cruelles,ni des plus
iTjal fiiites : c'eft l'écucil le plus dangereux de l'Archipel
, mais il faut être bien mal habile pour y
échouer.
T o u t le commerce de cette Ifle, roule donc lur
cette efpéce de galanterie fans délicateile, qui ne
convient qu'à des matelots, les femmes n'y travaillent
qu'à des bas dc coton & à Élire l'amour:
ces bas ne font pas trop propres quoiqu'on en fournilTe
les Ifles voiiines : les hormiies s'adonnent a
l a i ï i e r , & deviennent affcî bons pilotes. Pour de
la religion, ils en ont très-peu, de même que dans
la plupart des Mes dc l'Archipel oti l'on ne trouve
que des ignorans, fort mauvais Chrétier.i par coniequent,
&fij'ofc le dire, fcelcrats. Les habitans
dc l'Argentière font prefquc tous du rite grec , ^ &
louïifcnt encore dans leurs Chapelles d'une viiitaine
de petites cloches, ce qui il'cft pas un petit privilege
fur les terres des Turcs. Les Latins font en
Eentiere eft comme le Fauxbourg. La Juftice y ell
adminiftrée par un Juge ambulant qui eft le feul
Mufulman du pays : ordinairement il n'a ni val
e t , nifer^-
que les habitans ne
l ni fen'antc,& il n'oferoit parler haut, dc pei
que les habitans ne le fiffcnt enlever par quelqi
Corlîure de Malte,
que
Il n'cft pas fait mention de l'Argentiere dans
l'Hiftoire ancienne ; cette Ifle a torijours fnivi la
deftinée dc Milo, a D a n s le renverfemcnt de l'Empire
des Grecs par les Latins, Mar c Sanudo Noble
Vénitien la joignit au Duché de Naxic, avec quelques
autres Mes voiiines ; elle ft trouva envelo-
A G E
pce cnfuite dans la conquête de l'Archipel pat Barberoiillc.
Quelque mifcrablc que foit l'Argeiiticre aujourd'baii,
les Turcs en retirent mille ecus pour la
b capitation à pour la c taille réelle, laquelle coufifte
en la cinquième partie de toutes les denrées :
outre ces droits, les habitans donnent encore trois
ou quatre cens ecus aux Officiers du Capitain Pacha,
Qui viennent y exiger la capitation & la taille.
Il n'y a que deux choies en cette Ifle qui regardent
l'Hiftoire naturelle; la terreiCimolée, & les
plantes : à l'égard des mines d'argent, il n'y faut
plus penfcr.
d L a terre Cimolée dont les Anciens ftiifoient
tant de cas, & qui portoit le nom de cette Ifle, eft
une crayc blanche , ailèz pefante & fans goût,
remplie de petit fablon qui fe fiiit fentir fous la
dent; cette craye eft friable, mais elle ne s'échauffe
ni ne bouillonne point quand on l'arrofe avec
de l'eau ; elle fe fond feulement & devient allez
gluante : Ci folution qui ell: grifàtre, n'alterc point
la teiiiture-duTournefol, & ne fe r emue point avec
l'huile de Tai'tre; l'efprit de fel répandu fur la terre
Cimolée fermente à froid, de même que toutes les
matières pierreufes : ainlî je fuis perlîiadé que cette
efpéce de craye ne diîFére de celle qui fe trouve autour
de Paris, qu'en ce qu'elle eft plus graiic&plus
favonneufe ; c'eft par cette raifon qu'elle décraJle
& qu'elle blanchit le linge : ce blanchiifage eftaifcz
falc, mais il épargne le fivon. Je crois que toute
forte de craye blanchiroit auflî bien ; la feule précaution
qu'il y auroit à apporter à celle dc l'Argcntiére
feroit d'en feparer le gravier & les petits cailloux
qui percent le linge. Enfin ces Infulaires ne
font pas d'autre leflîve, & cet ufage eft fort ancien
chez eux, puifque e Pline ailûre qu'ils s'enlervoicnt
pour blanchir les étoifes.
A l'égard des vertus de la terre Cimolée par rapport
à la mcdecine, les anciens l'employoient pour
refoudre les tumeurs : on feroit mieux aujourd'hiii
de lui fubftitucr la craye blanche ou la terre à potier,
que celle des couteliers, f Ovide, parlant de
Cimole, a eu raifon de dire que fes champs écoicut
de crayc : il y a des quartiers de cette Ifle qui en
font tous blancs : nous n'y découvrîmes rien qui
tirât fur îe rouge : peut-être que l'autre efpéce dc
Cimolée dont Pline a fait mention eft plus prafonde.
Pour ce qui eft des plantes, elles étoicnt toutes
brûlées lorfque nous arrivilmes à l'Argcntiére ; il
en cft de même fur la fin de Juillet dans les autres
Illes; les plantes annuelles y fout paifées, on ne
les connoît plus que par leurs fquclets ou par leurs
graines répandnës fur la terre, qni lèvent aux premières
pluyes d'-automne.
Coma
}UJi. dis Dws lit r^rdtfb
Kiiaxai'c». Cutath.
c Decatie, ai A-IXÌTÌC/. Decimar.
d H' y» ^i/xaM*. ifwi. \trm. CtP^. ¡ib. 10. Crcts plura gênera
; €x iis Cimolis
ôc ad purpuridum ine
duo ad Medicos pertinentia, candiduDi
iiinns. rim. Hiß. >,ai. Iii. jj. c»f. 17,
f CKCofaque iura Cimoli. Uttmur, iii. 7,
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