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D U L E V A
Idcoendions pas de lui; mais qu'il ctoit le maître des
I f V « & qu'affarément il ie fcroit obéir ; que fi
I S u s voulions acheter du Ladanum , ^ en feroit
I Sorter du plus beau, fans que nous pnffioiis la pei-
I n e d'aller fiir les lieux ; après quoi il reitera fes def-
1 feules & fur tout il iiilifta qu'on fe gardlt bien de
nous apprendre la manie're dont on préparoit cette
droitue Voyant la dureté de cet homme , nous
entrames dans la mailbn du Papas pour faire charaer
nôtre bagage & nous retirer. Je m a v i f j de de-
Siander qu'on nous vendît au moins, al inftrument
avec lequel on amaHoit le Laianum. C'eft une efipéee
de fouet à long manche, & à double rang de
I Lurroyes, tel que la figure le repréfente : ces paii-
Ivres Grecs étoient fi éponvantcz des menaces du
Vaivode, qu'ils n'ofércnt pas le vendre fans fa perniillion
: nous eûmes beau leur dire qu'ils n'avoicnt
qu'à nous l'apporter eu cachette, & palier par la
porte du jardin ; ils ne voulurent jamais y confentir
; en vain allérent-ils prier l'OfBcier, il accompagna
de menaces fou refus oblKne.
On vint dans ce temps-là, nous prier d aller voir
un Papas, qui s'ctoit caffé une jambe depuis quelques
jours : nous lui dîmes ce qu'il falloir faire
pour guérir & irons allâmes fur le champ rejoindre
nos gens. L'autre Papas qui conduifoit toute cette
intrigue, nous vint annoncer d'rm air gai, qu'il
avoir trouvé le moyen de nous faire vendre deux
fouets,fans qne-le Tur e qui ctoit préfent'S'yoppofàt:
qu'ordinairement ces inftruments valoient denx
ecus picee ; que pour nous qui lui avions été recommandex
par le Dofteiir Patelaro , nous n'en
payerions qu'un écu & demi. Je lui donnai trois
ecus en prefence du Turc , qui fumoir toujours
d'un grand fang froid. A l'égard de la caverne ,
le Papas nous dit qu'il n'étoit pas poffible d'y aller,
pareeque l'Officier s'imaginoit qu'il y avoir des
prophédes touchant le bien de l'empire ; que pour
ce qui étoit du Laddnimt , il nous condniroit luimême
par des chemins detournex fans- que le Turc
s'en apperçût. Dans la croyance ori j'étois. que
ce Prêtre agilfoit de bonne foi, ¡ t le fis.allûrer que
nous ne manquerions pas de reconnoitre fes peinesr
nous montâmes donc à cheval pour le fuivre ;mais
à peine eumes-uous fait un quart de lieue , que le
Turc vint après nous hurlant comme un démon,
menaçant le Papas de la baftonade, & fur tout de
faire fçavoir inceffammeiu à 1> l'Aga du quartier
qu'il favorifoit des efpions. Nôtre Papas monte
fur une belle mute , lui répondit en brave , qu'il
pouvoir écrire tout ce qu'il jugeroit à propos. Nous
pourfuivîmes nôtre chemin , fort atteirtifs à chercher
des plantes : quelque- temps après, ce maître
fripon à barbe rouffe & longue, nous fit répréfenier
par nos voituriers, qne p-our l'amour de nous,
InCu^mtnf.'ijuaiTjut arilinairtmetifc
M une riifon.
a «ai
uni; Boulitlue
b Comiïuindaiir.
c Kf.iTiatioc k-A KpiHi^îïp. Pliiurth, in PiiH/o
SiNli^SIV TTfh KpiÎTrtS^Ϋ"'» .
N T. Lettre IL
il S'expofoit non fcukmcnt -à J'Infiimie de livbaltonadc
: mais cncore à perdre tout fon bien. Je répondis
qu'il valoit jnieux reculer,^ & que nous^ ferions
fâchez qu'on le maltraitât à nôtre occalion.'
Après- quelques raifonnemens tort ennuyants , il
fut conclu qu'on lui donneroit trois ecus, un pour
lui & deux pour appaifer le Vaivode Ce procédé
nous fit fonpçonner qu'il étoit d'uitelligencc avec
le T u r c , & qu'ils étoient convenus de ncais cxcroquer
cette foîîime : c'ci\ en quoi les Grecs font
dangereux ; ils n'ont pas tout à fait oublié ces anciennes
manières de I'lHc que Flutarque appelle
le .c.Crétifme. La fourberie de celui-ci tut grolfiére
: il eût été mieux payé, & nous l'aurions crû
honnête homme , s'il fût allé fur le champ préfejiter
les deux ecus au Turc, pour-remaécher- d'écrire
à l'Aga-. -
Enên tirant du côté de la mer, nous nous trou^
va mes fur des collines feches & fabloneufes, ouvertes
de ces petits a Arbrilfçaux qui fourniilent
le Ladamm. C'étoit dans la plus grande chaleur
du jour , & il ne faifoit pas de vent : cette difpolition
du temps cft néceilàire pour amaifcr 1g Ladanurn.
Sept ou huit pay fan s en chemife & en ^caleçon,
rouloient leurs foueti fur ces plantes : à force
de les fecouer & de les frotter fur les feuilles de
cet arbufte , leurs courroyes fo chargeoient d,'une
efpéce de glu odoriférante, attachée iur les feuilles;
c'eft une partie du fuc nourricier de la plante, lequel
tranfude au travers do la tiiïure de ces feuilles
comme une fueur ?raife, dont les gouttes font Ivnfantes,
& aufîî claires que la Terebentuie.
Lorfque les fouets font bien chargex de cette
graille on en ratilfe les courroyes avec un couteau,
& l'on met en pains ce que Ton en détache : c'eft
ce que nous recevons fous le nom de Ladamim-,
U n homme qui travaille avec application,èn amaffe
par jour environ e trois livres deux onces &
même davantage, lefquelles fe vendent un écu fur
le lieu : cette récolté n'eft rude que parce qu'il faut
la faire dans la plus grande chaleur du jour & dans
le calme : cela n'empêche pas qu'il n'y ait des or-»
dures dans le Lad/inum le plus pur, parce que lesvents
des- jours ptéccdens ont jetté de la pouiTiére
fur ces arbrilleaux- Pour augmenter le poids de
cette drogue, ils la pétriiïènt avec un fablon noirâtre
& très-fin, qui fe trouve fur les lieux, com*
me fi la nature avoit voulu leur apprendre à fophiftiquer
cette marchandiiè' : il cft difficile de connoître
la tromperie, lorfqu'on a bien mêlé le fablon
avec le Ladanum ; il' le faut mâcher long-temps
pour décowrir s'il craque fous lu dent, ou le fil»
trer après Tav-oir diiTous, afin de -Êparer ce qu'on
y a ajoûté. ^ ,
f L'Arbriireau qui produit le Ladanum cft fort.
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d'TLivrapti..
f Ciflus^Lndaniferii, Cretka, flore purpureo Cotol. Inft. Réi
heib. ip. Cifti'S è i-iua Ladanuin in Cceca collipiur. B:ll. Obf^m,
,ca£. 7. .1vb.-i. Ladctauin CKiisvmP.-Alg..E!tct. â»»'
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