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tirèrent en divers .endroits de la Chréticnré ; ils
emportèrent avec eux toutes les fcieiices de leurs
pays, & par conlequent toutes les vercus. Ceux
qui reilétcnt diuis TEmpirc OthoiTwn, & fur tout
•ceux qui leur luccedérenc , négligèrent tellement
le Grec littéral, qu'ils furent, hors d'état de puifer
dans les véritables fources du Chriilianiime, & le
rendirent incapables & indignes d'expliquer l'Evangile.
Ce delbrdre iubfifte encore aujourd'hui par-
..mi les Grecs: à peine Icavcnt-ils lire ce qu'ils n'entendent
pas : c'cit même un Grand mérite parnii
les gens d'Eglile de fçavoir lire, & vous ferez furpris,
Monfeigneur, d'apprendre qu'à peine y a-t-il
fur les terres des Turcs une douzaine de perfonnes
, habiles dans la connoillànce du Grec littéral.
Les Grecs fe flattent que le grand Duc de Mofcovie
les tirera quelque J o u r cíe la mifére où ils
font,. & qu'il détruira l'Empire des Turcs : mais
outre qu'il n'y a point d'apparence à ce changement,
ils ne deviendroicnt pas plus habiles en changeant
de maître. Les Mofcovites eux-mêmes ne
lont inftruits qne par les Moines de Monte Sant
o , qui ne méritent pas le n om de Théologiens.
Que peut-on penfer d'une Eglife, dont le Chef
au lieu d'etre déligné par le Saint Efprit, cil trèsfouvent
nommé par le Grand Seigneur ou par fon
premier Vizir, qui ont en horreur le nom Chrétien
? Il n'y a rien de plus tritte que de coniidérer
que les Grecs -eux-mêmes font les Auteurs d'une
. telle abomination. Les Turcs n'ont jamais exigé
qu'une fomme d'argent pour délivrer les Patentes
. du nouveau t> Patriarche ; les Grecs ont commencé
les premiers à mettre le Patriarchat à Tenchére,
fans attendre la mor t du Prélat qui en ccoit .pourvû.
Cette dignité le vend aujourd'hui foixante
mille écus. On a beau dire, encore une fois que
cette fomme n'efl: donnée que pour obtenir la confirmation
d'une élection Canonique : un Patriarche
..bien fouvent en détrône un autre, & il y en .a qui
•ès avoir été dépoiTedez une ou deux fois remonit
encore fur leur ciiaîre. Crulius añ'úre que
api
Simon de Trébifonde fut le premier qui dépoiTeda
Marc le Patriarche en donnant mille feqains à
Mahomet II.
O n ne prétend pas que toutes les promotions
des Patriarches foient iîmoniaques : au contraire
o n eft très-perfuadé qu'il y a de faints, perfonnages
dans l'Eglife Gréquc qui ne voudroient pas achctter
cette dignité à quelque prix que ce fût , & qui
après leur éledion faite canoniquemcnt par les
Evêques, ne donnent au Vizir la fomme ordinaire
que dans la vûe d'obtenir leurs proviiions, de même
que font nos Prélats par rapport à leurs bulles.
O n ne fçauroit trouver à redire à cette conduite:
mais les Grecs ne fçauroient aufil difconvenir que
plulîeurs de leurs Religieux n'ayent quelquefois, à
fl 0>5: K'^tcc, aiijourd'kuiAV« 0>cf,
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d'argent, détrôné leur Patriarche tout plein
; & i e iitnté, & qu'ils n'iiyent enchéri par def-
•""Tchc qu'il avoit tait : u'oll-ce pas là aehet.
: le Patriarchat , & peut-ou le dilpcnlcr d'appel.
1er Simonie une telle pratique i Quand l'ambition
aveugle donc un Caloyer julques à vouloir aeltet.
ter û miffion de Satan, ii tait fi cabale avec quel,
ques Evéques de fes amis, qui ne perdent rien ap.
parenunent à cette promotion : on ne manque pas
de preirentir le grand Viïir , le marché eft bien-tôt
c o n c l u ,& l'aipirant quoique pauvre ne manque pas
de trouver <ic riches Marchands , qui dans la vûc
d'un profit confidérable & allure' font toutes les
avances neccffiires. Si le grand Viiir n'eft pas à
Conftantinople , l'jiftàire ie traite avec le t Gouverneur
de la Ville. On expédie les prOïiDons litôt
que l'argent eft compté, & le nouveau Patrist.
che, accompagné des Evêques de fa faSion, faiii
s'embarr.affcr de ce qit'en dira l'ancien P.atriarche,
ni le refte du Clergé, s'en vient recevoir le Caftan
chei le Viiir ou chei le Gouverneur : ce Caftan
eft tme velle de hrocatelle ou de quelque autre
ctoffe , dont le Gnuid Seigneur fait préfent am
Ambaffadeurs & aux perfonnes revêtues nouvelloment
d'une dignité confidérable.
Les Evêques de la fuite du Patriarche reçoivent
auffi chacun leur vefte, & s'en vont comme ea
•triomphe à l'Eglife Patriarchale dans le quartier de
Balat, précédé! par un J Garde de la Porte, par
deux e Exempts des Gardes du Grand Seigneur,
par trn des Secretaires ou du Grand Vizir ou du
Gouverneur de la Ville , & par une troupe de Janilfaires
: les Evêques & les Caloyers forment l'arriére
garde de fil marche. Dès qu'ils font arriva
i la porte de l'Eglife, on fait la lec=ture des provifions
du Patriarche, par Icfquelles le Sultan commande
à tous les Grecs de fon Empire de reconnoitic
u n tel pour Chef de leur Eglife, de lui fournir
les fonunes neeelfaires pour foutenir fil di
& pour payer fes dettes : tout cela fous peine de la
baftonade , de coufifcation de«, b i ens , & d'interd
i a i o n des Eglifes. Ne font-ce pas là de belles
marques de millions ! Après la lecture des Patentes
du Patriarche, on om-re la porte de l'Eglife, & le
Secretaire du Grand Vizir ayant placé le Patriarche
fur fon liège, fe retire avec les .autres Ti
emportent chacun une fomme d'argent.
i l n'y a pas lieu de douter que le nouveau Patriarche
ne profite du temps ; la Tyrannie fuccéde
à la Simonie : il commence par faire lignifier l'ordre
du Sultan à tous les Archevêques & Evêques
de fon Clergé. N o n feulement ce nouveau Chef cfl
tr.aité de ^ ukre Saiy?teté', Xim^ às votre tùutc Siitntct/.
Il eft toujours vêtu en limple Caloyer, à
o n lu! baife la main ou fon chapelet en le portant
de la bouche au front. Sa plus grande application
cil
d Capigi.
e T-iaus, On pr^mnct ChiaoUK.
qui
D U L E V A
eft à examiner le revenu de chaque Prélat ; il les
m-e & leur enjoint trcs-expreflbment par une feroTide
lettre d'envoyer la foinme reglée, autrement
lesPrélatures font an plus offrant: les Prélats accoûtuinez
à ce commerce n'épargnent pas leup Suftra-
„aus • ceux-ci tourmentent les Papas; les Papas
iauçonneutlesparroiflieiui, &,ne jettent pas une
goutte d'eau benite , pour amh dire , qui ne loit
''"'s'i dans là'fuite le Patriarche a befoin d'argent,
il en met l'exaaion à l'enchère parmi les Turcs:
celui qui en donne le plus s'en va dans la Grèce
fojnmer les ¡Prélats. Ordinairement fur vingt-mil-
. N T. Lettre III. 39
le écus à quoi le Clergé eft taxé, le Tur c en tire
vingt-deux mille , & profite des deux mille ècu!
poiîr fi peine,outre qu'il eft dètîayé dans tous les
diocéfes. En vertu de la convention qu'il a faite
avec le Patriarche, il caflè & interdit des fonSions
Ecclefiaftiques , les Prélats qui refufent de payer
leur taxe: s'ils n'ont pas d'argent comptant, ils
en empruntent des Juifs à gros intérêts fur la caution
de leurs diocèlaius : telle eft aujourd'hui cette
Eglife fi fiorilfante autrefois, fi Iglorieufe d'avoir
eu pour Pafteurs les Athanafcs, les Baliles, les
Chryfoftomes.
LaHierarchiede l'Eglife Gréque eft' conjporce de
quelques autres Patriarches, qui rcconnoillent pour
Chef celui de Conftantinople ; ccs Patriarches fout
celui de Tcrufalcm , qui prend foin des Eglifes de
la Paleftiuc , & des confins de l'Arabie : celui
d'Antioche qui rèlide à Damas, a pour partage les
Eglifes de Syrie, de iVIéfopotamie, & de Caramauie;
celui d'Alexandrie demeure au Caire, & gouverne
les Eglifes d'Afrique & d'Arabie. Toutes
les autres Eglifes Gièques de l'Empire Othomaii
dépendent immcdiatemcnr du Patriaehe deConfliiiitiuoplc
: les Archevêques ont leur rang après le
Patriarche; & après ceux-ci viennent les Evêques;
enluiteles > Protopapas, puis les b Papas , & enfin
les Caloycrs. iQuand on faluë un Archeveque
ou un Evêque, on lui baife la main, & on l'appelle
vkn tonte Pritrife, ou d vitre Beautiide-, on
traite les Prêtres de = mtre Sdmeti
Les f Caloycrs font des Religieux de 1 O r d r e de
Saint Baille; il n'y a point de bigarrure dans leurs
f KaAejif
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