
ï î S V O Y A G E
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fi VOUS n'en favoviCcz TL^d'tioii ; cependant il i
faut dire à la louange de cePcre, qu'il alui feul '
décrit & dcfllné plus de Plantes d 'Ame r ique , que
n ' o n t f.uc tous enfembîe ceux qui le font miîleî,
<l'en parler. Il eli bien aifô de faire des livres de
P l a n t e s en décrivant & donnant les figures de celles
que l'on cultive dans un jardin, & dont on a
r e ç û les graines ou les racines par diirercns cor-
Tefpondans ; mais le P. Plumier avoit tait quatre
voyages en Amérique , & il mourut à Cadis
•dans le tem^^s qu'il devoit en partir, par vos ord
r e s , pour aller au Pérou. Pourmoi je me flatte,
M o n f e i g n e u r , que vous me continuerez l'honneur
d e vôtre proteCl ion, & que vous voudrez bien faire
graver tant de belles Plantes que j'ai obfervdes
•dans mes voyages.
- Voilà une de ces fortes de digreiïîons qu'il rv'ell
permis de faire que dans des lettres ; le genre
épiftolaire fouifre tout & il convient parfaite-
•ment aux voyageurs qui ne fauroient s'empêcher
de' s'cgarer quelquefois dans une longue route.
M e voici de retour à la Caravane. Le ï j , Juillet
nous partîmes à quatre heures du matin , &
paiTàmes par des plaines aflez bien cultive'cs , entrecoupées
de quelques collines agréables où les
bleds éioient bien plus avancez que du côté d'Era
e r o n . On y cultive beaucoup de Lin, fur-tout
auprès des villages qui font aifez frequens. Sur
les fepi heures du matin nous paifàmes à guai
u n e petite rivierê conlîdérable qui va fe décharg
e r , à ce qu'on nous d i t , dans l'Arpagi. La grand
e Caravane nous quitta à une lieue de là pour
a l l e r à Gangel , & nous fûmes fort conflernez de
nous voir réduits à la feule compagnie de trois
M a r c h a n d s qui venoient àTeflis. Û n Aga Tnrc
campé fur le chemin envoya deux gardes pour
nous reconnoîtie ; mais comme ils ne fçavoient
pas lire, ils ne firent que jetter les yeux fur nos
P a i f e p o r t s , & nous demandèrent pour leur peine
quelques Truites que nos Drogmans avoient pôc
h é e s . Ils firent payer diï âpres par charge à nos
M a r c h a n d s , & fe fi'rent donner chacun une piece
de favon pour fe razer.
N o u s découvrîmes ce jour - là, à mon grc , la
plus belle Plante que le Levant produife. C'eft
u n e efpece d'Elephafjt à grande fleur , dont la
t r o m p e eft courbée en bas.
S a racine qui efl longue d'environ deux ou
fleur de chaque côté, rétrecie en tuyau par derr!^
r e , verdâtrc , long feulement d'une ligne & demi
ou denx. Ce tuyau s'évafe enfuit e en deux lèvres
dont la fuperieure eft dilatée d'abord en deuxcfpeces
t r o i s pouces , n'a qu'une ligne & demi d'épa's,
d u r e , rouflàtre, chevelue, & jette une tige haut
e de neuf ou dix pouces, quarréc, purpurin-e
vers le bas, légcflîtnent veluë, accompagnée de
"feuilles oppofées en croix dpux à deux les unes
avec les autres, longues d'un pouce à 15. lignes
f u r 9. ou 10. lignes de large, femblables à celles
d e la P e d i c u l d i r e t jaunes , velues fur les bords
c r c a e J c e î t vcnées. De leurs a-iilelles fort une
d'oreilles alfez a r rondies , d'entre lefquetlcj
f o r t une trompe ou tuyau courbe long de neuf
l i g n e s , épais d'une ligue, termine par une lévrt
c;vale d'une ligne & demi de diametre , fri fée,
b o r d é e de petits poils, au delà de laquelle débord
e le filet du pillile. La lèvre inférieure eft longue
& large d'un pouce , chantournée & décoa.
pce en trois parties , dont celles des côtez font
comme deux grandes oreilles. La partie iiifcrieure
eft: recoupée en trois pieces. Celles des côtez
f o n t arrondies auflî, mais celle du milieu n'eft
q u ' u n petit bec fort pointu. Toute cette fleur eft
j a u n e couleur de fafran , hormis le bas délais
vre fuperieure qui eft blanchâtre. Les étamiues
f o n t fort courtes & cachées fous les aîlej deli
lèvre fuperieure. Leurs fommets ont deux lignes
de long fur une ligne de large, applatis, jaunepâle.
La lé\'re fuperieure réprefente la trorapî
d ' u n Elephant qui la courbe pour porter quelque
chofe dans fa bouche , au lieu que dans les autres
efpeces de ce genre qui font préfenteoeeiit
c o n n u e s , cette lèvre eft relevée. Lecaliceed
d ' u n e feule piece , long de trois lignes , léger^
ment velu , la Icvre Supérieure en eft obtufe,
échancrée. L'infericure eli fendue plus profonde''
ment en deux pieces. Chaque fleur efl attachée
à un pedicule long de demi pouce & fort délié,
L e pillile qui efl un bouton un peu ovale, n'i
q u ' u n e ligne de long & devient un fruit de demi
pouce de" l o n g , prefque quarré à coins arrondis,
v e r t - p â l e , membraneux, épais d'environ deur
lignes &demi , partagé dans fa longueur endcw
loges lefquelles s'ouvrent par les côtez & renferment
des graines longues d'une ligne & demi ou
deux , cpaifles d'une ligne, canelées dans leui
I longueur , & de la forme d'un petit rein,
j Le 16. Juillet nous partîmes à quatre heures
I du matin & campâmes fur les huit heures
I une belle & grande prairie où nos tentes furent
I dreifces pour la premiere fois fur les terres du
' Roi de Pcrfe. Nous n'avions couché qu'i
heure feulement de la frontière 3 laquelle ff
prend au haut d'une colline à la defcente de laquelle
commence la Géorgie Perfienne, oui«
pays que les Perfans appellent le G u r g i f t a n , c'eii
à dire, U T e r r e d e s G e o r g i e n s ^ car T a » cH
cien mot Celte qui fignirie un ^rtj'j , & ce mot
s'ef l conferve par tout POrient , où l'on dit h
C u r d i j l a n , l I f i d o j l i i n , &c. pour exprimer II
T e r r e d e s C i i r d c s , celle d e s I n d i e n s , &C. NouS
découvrîmes d'abord pluiîeurs villages aflcz confiicrables
; mais toute cette belle campagne'u«
-produit pas un feul arbre, & l'on clt obligé de
brû-
^ û T f i . i i , p a c t . J a /
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X l i ' p Î v i t s O r i c i i t a L i s ^ l o r e
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