
V O Y A G E
mi les infidèles : le Jeudi pour tout le monde,
de quelque nation & de quelque religion qu'il
puiflè être. Le Vendredi les Mofquces foiic plus
fcequentées , mieux cchirées , & les prie'res s'y
font plus folemiiellcnient.
N o u s n'avons pas v û prier dnns les Mofquces,
car il n'ell: permis aux Chrétiens d'y entrer que
lors qu'il n'y a perloniie 5 mais nous avons vû
i i i r e la prière aux Mufulmans dans les caravanes.
Chef de la caravane connoiiTant par la
hauteur du Soleil l'heure qulil eft, s'arrête & leur
annonce la prière tout comme feroit le Chantre
ordinaire : les Chrétiens & les Juifs attendent à
cheval , s'ils veulent , ou fc promenenc pendant
c c temps-là. Les Mufalmans étendent chacun
leur tapis à terre , font leurs inclinations & récitent
leurs Oriufons. Bien ibuvent le Chef de la
caravane leur tient, lieu de Prêtre; s'il s'y trouve
quelque Dervich , comme cela le rencontre fort
fouvent. dans les caravanes d'Alic ^ il tait cette
fenébion.. Tout cela le pafle au milieu des champs
avec la même attention & la même modeilie que
s'ils étoienc dans une IVlofquée. Qjand il n'y a
deux, ou trois Tares dans luie caravane,
voit s-'ccarter du chemin, pour prier , à
enfuite à toute bride pour réjoiiidre la
Rien de plus exemplaire que ces exer-
& cela m'a donné beaucoup d'indignation
qu Ui
Oiî- li
îpoup;
d e e s
contre les- Grecs , qui la plûpart vivent comme
des chiens..
Outr-e les prières journalières dont
pari , les Turcs fe rendei
. pendant le. Carême po
i vient di
i la Mofquée £
• y faire la prière
SeÎFiieur Dieu qu't excufes »os fautes : Toi qui
feul dois éîn aimé ^ ho-aoré: Qui es grand vieioricfix
: Qui tournes les coeurs ^ les ^enfées des
hommes : Qui djfpofes de la nuit ^ du je
pardonner " "
fi„sr.ifir
Cif purifies nos ccer&s
•de or diJÎribuës tes bienfaits à t
•viteurs:. /idorable Seigneur, nous ne t^avo.
honoré comme, tu de-vois l'être. Grand Die
rites f i on ne parle que de toi , }7ous n en
parle aujfi dignement que nous le devion.
Dieu que l'on doit remercier inceffarnrnent, nous ne
p'avons pas njfgz. rendu d^ailtons de graces. Dieu
mifericordieHx , toute fagejfe , toute boni/, toute
vertu, viennent de. toij, c'efl à toi qu'il faut demander
pardon Cif mifericorde. Il »'y a point d'autre
Dieu que D.eu. Il ejl unique. Il »'a point de corn-
•p Ain on. JMahoniet efi l'Envoyé de Dieu. Mon Dieu
I-Ótre benedidion fur. Mahomet fur la race de]
Mufulmans.
L e Carême des Turcs a pris le nom du mois
o ù il Te trouve , qui eft la Lune de liamazaa ou
ramadan , car ils comptent toujours par les LuÌKS.
Lciir aQoèe eil.de jours partages en
IS. Lunes ou Mo i s , lefqucls ne commencent
qu'à la nouvelle Lune; ces mois font alternativo
ment l'unde 30. jours & l'autre de 51. Le pre.
mier qui eft de 30. jours s'appelle Muharrm L
z.Sefer, & n'ell que de 29. jours. Le 3.
biul-euvel. Le liebiul-ahh.r. Le 5. Gima^
euvel. Le 6. Giarnazil-ahhir. Le 7. Kegeb Le
8. Chaban. Le 9. liamazan ou Ramadan. Le lo
Chuval. Le M.Zoulcudé. Le 12. Zoulbigé. Cei
mois- ne fuivent pas les faifons , parce qu'ils iic
s'accordent pas avec le cours du Soleil, & leurs
années font plus courtes de oni c jours que les iiôtres
; ainíi le Rainazan remonte tous les ans de
pareil, nombre de jours ; de là vient que d'une ao*
née à l'autre, il parcourt toutes les faifons.
L e Carême a été établi pendant la Lune de Ramazan
, parce que Mahomet publia que l'Alcoran
lui avoit ètè envoyé du Ciel dans ce tempslà.
Le jeûne qu'il ordonna eft difterent du nôtre,
en ce qu'il eft abfolument détendu durant tout le
cours de cette Lune , de manger, de boire, ni
de mettre aucune chçfe dans la bouche, pajmime
de fumer depuis que le Soleil fe leve, jufques
à ce qu'il foit couché. Eu recompenfc nuit queli
nuit dure, ils peuvent manger & boire "fans diUiii-
(Stion de viande ni de boiiàn , fi l'on en excepte
le vin ; car ce fëroit un grand crime d'en goûier,
& ce crime ne s'expioit autrefois qu'en jettatit
du plomb fondu dans la bouche des coupables;
on n'eft pas fi févere aujourd'hui, mais on ne
laiiTeroit pas d'être puni corporellement. L'eau
de vie n'eft pas épargnée la nuit pendant ce tempj
de penitence; encore moins le forbet & le caffé,
Il y en a même qui fous pretexte de penitence f«
nourriiTent plus délicieufement que tO'U te rede '
de l'année. L'amour propre qui eft ingénieux par
t o u t , leur infpire en ce temps-là , de faire ineil-
Icure chere dans les temps deitinev. à la mortification
: les confitures confolent l'eftomac des licvots
, quoiqu'elles ne fuient ordin
miel & au reiiné. Les riches obfer^
auiïi féverement que les pauvres ;
•ont le Care'me
même que les Religieux ; le Suli
les foldats de
iîmple particulier. Chacun fe
an comme un
j o u r , & l'on ne penfe qu'à do
à éviter les exercices qui altèrent
grand fuppHce que de ne pouvo
l'eau pendant les grandes- chaleurs. _. „
travail., îes voyageurs, les campagnards foufrent
beaucoup; il eft vrai qu'on leur pardonne de
rompre le jeûne, pourveu qu'ils tiennent compte
des jours , & à condition d'en jeûner par la fuite
un pareil nombre quand leurs affaires le leur permettront
•epofe pendant le
nir, ouauraoiuS'
, car c'eiiun.
pas boire de
•Lcsge,,-'-
: tout bien conlidcré , le Carême ch«
les Mufulmans n'eft qu'un dérangement de leur
vie ordinaire. Quand la Luue de Ghaban , q«'
précédé immédiatement celle, de Rama-zaii el£
pal-
D U L E V A
s ;
on obftrve avec grand ft
' u n e infinîii-'de gens d.
fe tiennent ftr les li.,
flu'ili l'ont apperçûe ;
,i„„, les antres pour .
3mcnt qn'
,te- la ïiJle
endroits <
;oncli
la iionvelle
î forl:es d'états
•tir
fe. Dès Iciv
publie par to
Ser. Dans les
tire un coup s
jiie fi grande qu;
quies , qu'elles
tti, & l'on pre
nations far les r
Les Mnezins
i la fin du JOUI
lioKïoix qu'
leveï & Cl
:es uns agiiTent par devo
ibtenir quelque récompen
.11 ell airCire du fait, on Ii
, & on commence à jcû
lù il y a du canon , on ei
;r du Soleil. On allum.
rtité de lampes dans les Mof-
•eflbmblentà des chapelles ardenid
foin de faire de grandes illumilinarets
pendant la unir,
au retour de la L u n e , c'eft à dire
du premier jeûne , annoncent à
. eft temps de prier & de manger.
Les pauvres Maliometans qui ont alors le gozier
fortftc, commencent à avaler de grandes potées
d'eau, & donnent avidement fur les jattes de ns.
Ctacun fe régale avec Tes tneillenrcs provifions ;
"ils apprehendoietit de mourir de fanri,
cher à manger dans les rues , après
iflaiiez chez eux ; les uns coi
lutres au forbet ; les pins- chr
s ceux qui fe pr
S commi
ils v o n t chi
s'être bien
t a î c , l e s
d o n n e n t
tables
éfentenr.
Jepri.
:royent
: le jour,
e fins en
On entend les pauvres crier dans, les
dm jail re-mflijji l<t tourfe de ceux qi
mmt ponr remplir mo?i vcmre. Ceux qi
tilîner fur les plailirs , fe fatiguent h
ont qu'ils peuvent, pour mieux repofc
îc pour laiffer paflèr le temps du jeût
ftreincommodez. On fume donc pendant les te
nebtes après avoir bien mangé ; on joué des in
Uruniens ; on voit jouer les mariouettes à la fa
vm des laïupes. Tous ces divertilfemens daren
iifiiues il ce que l'aurore éclaire allez pour diffin
giier, comme ils difent, un fil blanc, d'avec ur
Ëlnoir; alors on fe repofe & l'on donne 1
de jeûne à un fommcil ti
qits i la nuit. Il n'y a qr
oliligf de travailler , qui vi
dimirc. Où cB donc , felo
fction qui doit purifier f
Ceux qui aiment la vi
«lie ce temps de péniten
iquille qui dure jufceux
que la ueceflîté
t à leur ouvrage or-
;ux , l'efprit de mor-
.ue des Mufuimans ?
déréglée fouhaiteroient
durât la moitié de l'année,
d'autant m'ieux qu'il eft foivi du grand Baipendant
lequel par une alternative agréable
ra don toute la nuit , & l'on ne fait; que fe réionîr
tant que le jour dure,
t Sur la fin de la L u n e de Ramazan, on obfcrve
'ecfoin celle de Chuval , & on annonce le Bainm
dès qu'on l'a découverte. On n'entend alors
lue tamboûts & trompettes dans les Palais & dans
Places publiques. Si le temps cd alfa, couvert
pour cacher la nouvelle Lune, on retarde ta fite
« un jour ; mais fi les nuages continuent, on fuppofeque
la Lune doit être nouvel le, & l'on allnÎ
I-eEiiiam,
N T.
l e d c
Lettre Xir. 4 5
feux de joyc dans les rues. Les femmes qui
font renfermées pendant toute l'année, ont la li'
berté de fortir pendant les trois jours que dure cette
iécc. On ne voit dans les places que muficiens,
cfcarpoicttes, roues de fortune. On voltige
dans ces efcarpolettes, ou pour mieux dire, ori
f e promène eu l'air fur des fieges de bois, par le
moyen des cordes que des hommes conduifent avec
plus ou moins de violence an gré de celui qui eft
allîs. Les roues de fortune font femblables à cel^
les des moulins d'eau ; on les fait tourner fans que
ceux qui font afiis en dedans-touchent lesunsaux
quoique chacun ft
n bas- de la roue,
mier jourduBairar
: une réconciliatioi
luttes ,
laut & Í
L e p n
réciproquement les ma
baile celles de leurs cl
te'te. On fe fouh-aiti
i'envoye des prefer
e à fon tou
, les-Mufulmans font
générale, & fe donrs
dans les rués; aprè»
remis, ils les portent
mille profperitez, &
mme nous faifons ici
.icement de l'année. Les Prédicateurs
expliquent dans les Mofquées quelques points de
l ' A l c o r a n , & après le fermon , on y chante l'Oraifonfuivante:
Salxl ti bemdiaimfiirui Mahomet
arm de Dieu. Salut C3= benediaim fur toi Jerm
Chrififiufle de Diett. Sala is Unediaioti fur
toi Moyfe familier de Dieu. Salut- Es" benediBion
fur toi David-Monarque établi de DUu. Salut ^
benediaio« fur toi- Salormn le fidele du Seigneur.
Salutbenediaion fur toiNoe', qui ai été fauv/
par la grace de Dieu. Salut £3= benedtaion fur toi
Àdam ta pureté de Dieu. - -
L e Grand Seigneur paroit plus magnifique ce
jour-là qu'à l'ordinaire ; il reçoit les complimens -
des Grands de la Porte , & leiir fait donner un repas
fomptueux dans la Sale du Divau. On affeurtî
qu'an retour de Sainte Souhie il monte fur fon
T h r ô n e , ayant le Chef des Eunuques blancs à fagauche.
Si les fils du Kam des Tartares fe trouvent
à la C our , ils v-iennent les- premiers fe prollerner,
devant lui , & ne fe retirent qu'après avoir baifé
fes mains & lui avoir fouhaité une heurcufe féte.
L e Grand Vifir fe prefente enfuite à la tête des Vi -
cerois & des Pachas qui font dans la v i l le, & après -
avoir fait fou compliment au Sultan un genou en
terre , il lu! baifc la main & prend la place du Chef
des Euiruques blancs. Le Moufti accompagné des
Intcndansde Jufticc, des grands Cadis, des plus -
fameux Prédicateurs , en un mot de tous ceux
qu'on appelle principaux.Officiers de la F o i , icde
celui mêmeqni fe dit le Che f de la race de Mahomet
: le Moufti ; dis-je, la tite baiflee jufqucs à
terre & les mains dans fa ceinture , vient bailcil'épaule
du Sul tan; on dit que ce Prince avance un
pas pour le recevoir. Le Janiffaire Aga fait fon
compliment le dernier de tous, après que les Officiers
qui ont acconipagué le Moufti ont f-ait leur
F a IS- -
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