
Ï 7 4 V O Y A G E
mais les Moftovites '& les Tartares de la Crime'e
s'eii coiicciueiit. Il en palfe même en France, &
c e font celles que nous appelions Toiles du Lev.
int. Toeat & Amalia en fonrnilTeiit plus que
tout le relie du pays.
Il faut regarder Tocat comme le centre du commerce
de l'Aile mineure. Les Caravanes de
DiarhequW y viennent en di.^:-huit jours; unhomme
à cheval fait le chemin en dome. Celles de
T o c a t à Synope mettent IL-î jours: les gens de
pied y vont en quatre ionrs. De Tocat à Prulfe
les Caravanes employent vingt jours , les gens à
cheval y arrivent en quinze. Celles qui vont en
droiture de Tocat à Smyrne , fans paffer par Angora
ni par PrulTe, font vingt-fept jours en ciiemin
avec des mulets, & quarante jours avec des chameaux,
mais elles rifquent d'être maltraitées par
l e s voleurs. Une partie de nôtre Caravane partit
pour Pruffe, & l'autre pour Angora, dans le deffein
d'aller à Smyrne & d'éviter les voleurs. Nos
Arméniens nous affeùrérent qu'ils gagnoient beaucoup
plus à faite voiturer leur foye à Smyrne ,
car ils ne l'avoient achetée à Gangel fur la frontiere
de Perfe, qu'à raifon de vingt ecus je Batman
; en forte que vendant le même poids à Smyrn
e , fur le pied de trente ecus, ils gagnoient trois
¿cas fur chaque Batman , deduflion faite de tous
les frais qu'ils (ont obligez de faire pendant leur
route. Ce gain eft très-confidérable, parce qu'un
Batman ne pefe q u e i . Oqoes, c'ell-à-dire, i S.
livres 12. onces; & la charge d'un cheval étant
du poids de 6oo. livres , & celle d'un chameau
de looo. il y a , tout bien fupputé , loo. écus à
gagner fur chaque charge de cheval, & 500. livres
fur celle d'un chameau. Les Marchands qui
font coftiluire dix charges de foyes gagnent donc
mille écus par cheval , & cinq mille livres p.ar
chameau, fans compter le profit qu'ils font fur les
marchandifes dont ils fe chargent au retour.
T o c a t dépend du gouvernement de Si-oas où
il y a un Pacha & un Janiflàire Aga. Les Grecs
de cette Province payent quatre mille billets de
Capitation. Sivas , ftiivaut leur tradition , eft
l'ancienne ville de , que Pline & Ptolomée
placent dans la Cappadoce. Cette ville n'eft
qu'à deus journées de Tocat vers le Midi, &
Amafia, autre ancienne ville, eft à trois journées
de Tocat vers le Nord-Ouef t j mais ces deux vill
e s , quoi qu'anciennes, font bien plus petites que
T o c a t . Sivas cft peu de chofe aujourd'hui, & ne
feroit prefque pas connue (î le Pacha n'y faifoit fa
réfidence. Ducas qui a écrit VHiJloire Byz.mth>e
depuis Jean Paleologue jnfques à Mahomet II.
affeûre que Bajaïet prit Sivas en 1394. Tamctlan
l'alTiigea peu de temps après , & d'une maniere fi
finguliere , que nos Ingénieurs ne feront pas fâche!
d'en apprendre le détail.
Tamerlan fit creufer lès fondemens des murailles
de la Place , & les lit foùtenir par des pieces
de bois à mefure qu'on en tiroit les pierres. Les
ouvriers paffoient par des fotlterteins dont l'ouverture
etoit à plus d'un mille de la ville , fm,s
que les habitans en eulTent aucun foupçon. Lorfque
l'onvrage fut fini, il les fit fommer de fe rendre.
Ces p.auvres affiegez qni ne fçavoient pas le
nique qu'ils couroient , parce qu'ils ne voyoient
pas leurs murailles endommagées , crurent qu'ils
pouvoient fe delFendre encore quelque temps
mais ils furent bien étonnez de les voir tomber
tout d'un coup , après qu'on eût mis le feu aus
pieces de bois qui les foùtenoient. On entradans
la ville , & le carnage fût éponventable ; ceux
qui en échapérent , perirent par un fuplice inconnu
jnfques à ce temps-là. On les garrota de tele
lotte , que la tête fe trouvant engagée entre
les cuifiis , le nez répondoit à leur fondementdans
cette attitude on les jettoit par douzaine
dans des foffes qu'on convroit de planches &
enfnite de terre pour les laiffer mourir à petit
feu.^ La ville fut razée , & l'on ne l'a pas rétablie
depuis , quoiqu'elle ait confervé fa dignité.
Il y auroit de belles chofes à dire fur Amafii
mais ce n'eft pas ici l'endroit, j'ajoûte feulement
que Strabon le plus fameux de tous les Geoi»riphes_
anciens, qnoi-qu'Originaire de Crète, étoit
natit de cette ville. Je ne fçai pas s'il a parlé de
T o c a t , tous les Grecs de la ville à qui nous en
demandâmes l'ancien notn , nons aireùrcreM
qu'elle s appelloit autrefois Eudoxl^ ou £«(.-
ch,a : ne feroit-ce point la ville i-Eudoxim,
que ttoloraee marque dans la Galacie Ponti.
que ? Paul Jove appelle Tocat Tahe^da, apparemment
qu'il a cru que c'étoit la ville que ee
Geographe appelle Teienda. On trouveroit peutêtre
le veritable nom de Tocat fur quelques-unes
des Infcnptions qui font , à ce qu'on uous dit
dans le Château ; mais les Turcs nous en refufcrent
Pentrée On venoit de taxer les Arméniens
Catoliques de cette ville , enfnite d'une grande
perfécution qui s'étoit excitée contre eux à Coiiflantniople
; ainfi l'on regardoit par toute l'Alis
les trancs de bien plus mauvais oeil qu'on n'«
coutume de faire.
Après la fanglante bataille d'Angora où Bajaztt
fût fait ptifmmier par Tamerlan , Sultan Mahomet
qui après l'interrcgne & la mort de tous fes
freres , régna paifiblement fous le nom de Mahomet
I. ce Sul tan, dis-je, qui étoit un de!
fils de B.ijazet, pafTa à l'âge de i j . ans, le fabre
a la mam , avec le peu de troupes qu'il pût
ramalTer, au travers des Tartares qui occupoient
tout le pays , & vint fe retirer à Tocat dont il
jouiflbit avant le malheur de fon pere qui l'avoit
prife
D U L E V A N T . Lettre XX!.
prife quelque temps auparavant:
fe trouva la capitale de l'Empii
Mahomet I. ayant défait fon
M n f i , fit mettre dans la prifon
pellée U gnj f , C^rd,, Mahemet Bay & Jj
ainlî cette ville [ pa
î des Turcs ; &
frere Mii[a ou
de Tocat , apjbBay
igagez dans le parti de foi
inféqnent • leur marche de 6. jo
pour éviter la Douane de Tefiiyer
des droits très-conlidérables. Ht
75. chevaux ou mulets chargez de
faitpaiduifoient
150. balei
Sor-
II paroît par-là que cette ville' ne tomba pas pou
lors en la puifl'ance de Tamerlan , mais que ce
fut fous Mahomet II. Jufuf-Zcs Begue , Général
des troupes de Uzum-Caran Roi des Partiies,
ravagea cette grande ville , dit Lennclaw,
h vint tondre fur I3 Caramanie. Sultan Muftapiia,
fils de Mahomet le deffit en 1473. & l'enraya
prifoimier à l'on pere qui étoit à Conftanti-
•ople.
Nous cherchâmes inutilement compagnie pour"
lller à Cefarie de Capfadoce. Cette ville n'eft qu'à
liï journées de Tocat , & n'a pas changé de nom,
fque les Grecs l'appellent Kefarm depuis le
temps de Tibere qui en fit changer les anciens
d'Euubm & de M^zaea. Cefarée eut l'a-
„ e d'avoir pour Pafleur le Grand S. Salile ,
k fon Archevêque occupe aujourd'hui le premier
111g parmi les Prélats qui font fournis an Patriar-
:lie de Conftantinople. On nous affûta qu'il y
mit des Infcriptionsà Cefarée qui faifoient menion
de S. Dalile, mais nous ne pûmes pas nons
icarter de la campagne de Tocat. Cette campagne
produit de fort belles Plantes , & fur tout
ès végétations de pierres qui font d'une be.auté
llrprenante. On trouve des merveilles en caffant
lies cailloux , & des morceaux de roches crenfes
revêtues de crillallifttions tout-à-fait raviiTantes.
l'en ai dans mon Cabinet qui font feinblables à
l'e'corce de citron confite, quelques-unes reffemblent
li fort à la nacre de perle, qu'on les
ptendroit pour ces mêmes coquilles pétrifiées ; il
en a de couleur d'or , qui ne different que par
ur dureté, de la confiture qn'ou fait avec l'éiree
d'orange coupée en filets.
La riviere qui paife par Tocat n'eft pas l'/Wr
ou le Cafalmtte , comme les Géographes le fnpifent,
c'eft le ïofa«!^ qui pafl'e aufll à Neoceiitée
, & c'ell fans doute le Loup , dont Pline
fait mention , & qui va fe jettet dans l'Iris,
luette riviere fait de grands ravages dans le temps
lyes , & lorfqne les neig'es fondeur. On
WIS aifûra qu'il y avoir trois rivieres qni s'unifient
versAmaf ia, \cCoiilelfar-fiu , ou ìarimere
Chonae, le Tofn^h, , on celle deTaeath ]tCa-
'mac ; cette deruiere retient fon nom jufques à
mer.
Nous partîmes de Tocat ponr Angora le
ÎJctobre 1701. avec une Caravane compofé
nouveaux venus, &de celle que nous avions
jufques à Toc a t . Ces nouveaux venus ave
"lis 24. jours à venir de Gangel àErzcrun
hacnne ^6. Batm;
:re dans une bellepi
l'en peut-être la plaine q:
les Cha'ammppss des Oye
les troupes de' Ma
-Caftan Roi de
comme cel-
, je ne douar
il y a des
, i i font d'un
des roches , dont
nés defquellcs ft
foye , qni pefoie
tant de Tocat on ci
la riviere ferpente :
Paul Jove appelle
fe donna la bataille emrt
homet. I I. & celles d'U
Perfe.
Apres quatre heures de marche on campa auprès
dn village d'Âgara , dans le cimetiere duquel
fe voyent quelques morceaux de coloinnes & de
corniches anciennes de marbre blanc & d'un beau
profil , mais fans infcriptions. Toutes les montagnes
des environs font de marbre
les de Tocat . Pour ce qui eft du Bol
te pas qu'il n'y fbit fort commun , c
endroits efcarpez & taillez à plomb q
rouge vif , femblable à celui '
parle Paul Jove, dans les cave
retira TeehelUs fameux Mahometan ,' difcipl,
àU-lardual grand Interprète de la Loi , pour y
vaquer non feulement à la meditation & à la priere
; mais aufti pour éviter les perfécutions de
ceux qui s'oppofoient à la doârine de fon
Maître.
L e II. Oêiobre nous continuâmes-nôtre route
dans la plaine de Tocat , laquelle fe rétrécit
à fix milles en deçà de Tur ca! , & s'élargit enfnite
à mefure qu'on en approche. Tire«/ eft unebelle
Bourgade à i f . milles-d'Agata, fituée autour
& fnr la pente d'une colline efcarpée, féparée
des autres , terminée par un vienx château,
& mouillée au pied par la riviere de Tocat . Tout
ce quartier eli plein de beaux vignobles , les
champs y font bien cultivez , les villages frequcns
, & les bouts de colomnes antiques allez
communs dans les cimetieres ; cequimarqne bieti
que le pays étoit autrefois peuplé par des gens
aifez. Paft'é Toc a t on n'entend pins parler de Curdcs,
mais bien de Turcmans , c'eft à dire d'une
autre efpece de voleurs encore plus dangereux
les Curdes dorment la nuit, & que les
volent jour & nuit. Nous campâmes
en ce qu.
Turcmans
pourtant fins crainte dans la plaine à une demi
lieuë au-defiTous de Turcal. On entra le lenu
dar
allée afl'c
onlidérabl.
valléi
arrêta
bol.
une mont.ngne ci
dans une autre
nôtre Caravane s':
ble & couvert de
ncs y font plus pi
Tocat tire vers le
dans le Cafalmac
à droite pour fuiv
T o
ítroite, bornée
d'où l'on def
glée & tortue
at le pays eft af
les Pins &lcs(
end
o ù
:héde
qu'ailleurs. La rivier
d à Turcal , cStvafe ji
Amafia. Nous lalaiiTâme
l route d'Angora , & m
trguvâpar