
peuple. Elle brillé sur leurs vêtemens, dans leurs maisons et
sur leur table 5 elle dédommage bien de la frugalité des mets.
Ils prennent presque tous les jours des bains chauds que l’on prépare
chez eux; les voyageurs en trouvent de tout prêts'dans les
auberges et à très-bon compte.
J ai eu souvent occasion d’admirer la patience et la bonté
des Japonais , particulièrement envers les marchands! ’européens
, qui ne craignoient pas des’attirerleur mépris ou leur haine
par des tromperies honteuses. Malgré sa fierté naturelle , cette
nation est pleine de douceur et de bienveillance, sensible aux
moindres témoignages d’amitié, mais inébranlable aux injures
et aux menaces. -,
La justice n’est pas ici un mot vuide de sens ; chacun l’observe
à l’égard de ses concitoyens, et le despote lui-même n’oseroit
y manquer envers ses voisins. Il n!y a point d’exemple qu’un
empereur du Japon ait eu la manie des conquêtes (1). Mais en
récompense, leur histoire est pleine de traits héroïques qui
prouvent avec quel courage les Japonois ont toujours défendu
leurs foyers contre les incursions des étrangers. Fidèles aux
principes de leurs ancêtres, ils ne sont point tentés d’envahir les
domaines de leurs voisins, ni d’adopter dès moeurs étrangères-.
On retrouve dans leurs tribunaux les mêmes principes que nous
admirons dans leur conduite politique. Leurs procès sont bientôt
terminés , et l’on ne connoîtpas ces sollicitations qui influencent
si souvent les decisions des juges. Un coupable reconnu pour
t e l , ne trouve aucun appui 5 il est jugé et exécuté sans égard 1
(1) Cependant les Japonois ont fait
plusieurs incursions en Chine, et surtout
dans la Corée, qu’ils envahirent
même en i 5'52., et gardèrent jusqu’à
la mort de Pingsiecu-li leur roi , en
1 564 ; mais c’étoit uniquement des représailles
ou des guerres défensives,
comme on peut le voir dans VHistoire
générale de la Chine, traduite par le
P. Mailla , t. X , p. 322 et suivantes.
Note du Rédacteur.
pour sa fortune ni pour son rang, et personne ne se hasarderoit
à intercéder pour lui.
D’après un caractère aussi prononcé, si les relations des Européens
avec les Japonois ont éprouvé tant de variations , ce n’est
pas ceux-ci qu’il faut en accuser, et nous devons convenir qu’ils
n’ont jamais été les premiers à violer les traités, ni même à y
changer un seul mot.
On peut voyager dans toute l’étendue de l’empire avec
une parfaite sécurité , on ne connoît pas les voleurs de grands-
chemins; et les larcins même sont si rares, que les Européens,
en allant à la cour, ne s’occupent point beaucoup de veiller sur
leurs effets, et n’en perdent cependant aucun. A la vérité, le bas
peuple ne se fait pas scrupule de dérober du sucre et du cuivre,
quand on transporte ces objets du port aux magasins de la factorerie
hollandoise , ou des magasins au port. Mais la duplicité
et les tromperies des Européens contribuent à lever les
scrupules des Japonois , et justifient leur méfiance et les pré“-
cautions qü’ils prennent tant envers ceux-ci qu’envers les Chinois.
Leurs troubles intestins et leurs fréquentes guerres civiles (1)
ont, sans doute,.contribué à renforcer leur caractère naturellement
soupçonneux.
La superstition , si universelle parmi les Japonois de tous
rangs , et qu’ils portent même au. plus haut.degré, est un
effet naturel du peu de progrès qu’ils-ont fait dans les sciences, *
(1) Le système politique de ce royaume
a naturellement engendré une suite
non interrompue de- guerres civiles,
plus sanglantes les unes que les autres;
le. Daïri , qui réunissoit autrefois le
sceptre et l’encensoir, avoit sans cesse
à lutter contre ses généraux; un de
ceux-ci s’est enfin érigé en empereur
civil9 nommé Koubo, .et le Daïri n’est
plus qu’un mannequin sacré-; mais les!
princes particuliers qui ressemblent;
beaucoup, à nos anciens barons et seigneurs
à donjons, cherchent à secouer
le joug du Koubo ; tous ces tyrans
et tyranneaux se disputent la propriété;
des hommes au prix de leur sang.
* Quidyuididelirant regès plectunlur Achivi. ,
(.Note du Rédacteur. }
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