
Sanga, capitale de la province., aune forteresse-environnée de
fossés et de remparts , où-demeure le prince du paj^s. On monte
la garde à la porte de la ville. Elle est bâtie avec la même régularité
que les autres, villes du Japon, ses rues Sont larges et bien
alignées. Plusieurs canaux la traversent en différens sens, et
font ainsi, circuler l’ eau dans les rues.
Quoique les villages du Japon soient presque aussi longs que
les villes , on les distingue aisément. Ils n’ont qu’une seule rue ,
les „villes en ont plusieurs; elles sont environnées de fosses,
de murailles, et la plupart munies de citadelles. '
Les habitans de cette province sont d’une taille bien inférieure
à ceux de Desima. La différence est encore .plus sensible dans
les personnes du sexe. Quoiqu’ assez bien faites et d’une figure
même agréable, elles ont le talent de s’ enlaidir, au point de. se
rendre difformes en s’arrachant les sourcils : cet épilement,
«comme la,noirceur des dents à Nagasaki, annonce que.la personne.
est en puissance de mari. , . , . —
Nous couchâmes à Tuysero, quoique Kcempfer prétende que,
de son temps, il étqit, ; défendu de ,s’y arrêter comme dans
un endroit de mauvais augure. Un événement tragique arrivé
pendant un voyage semblable à celui que je faisois , âvoit donne
lieu à ce préjugé superstitieux. Le banjos -et le premier interprète
ayant eu querelle , le banjos tua celui-ci eL se poignarda
ensuite lui-même.
Le 8 mars nous fîmes environ dix milles pour nous rendre à
Iska. Nous trouvâmes sur notre route de très - hautes montagnes
, et des villages de différentes grandeurs. D’abord Farda ,
à deux milles; ensuite Djamayo , à un mille : nous y dînâmes.
Une haute montagne longue d’un mille et demi sépare
cet endroit de Fiamito , très-bel endroit où nous nous reposâmes
pour nous régaler de sakki, ainsi que'nos officiers. Nous
donnâmes , selon l’usage du pays, un foible présent a notre
hôtesse , environ sept mas et cinq konderyns. Un mille et
demi plus loin , à Oulsini , nos porteurs- se reposèrent] un moment.
En traversant la province de Tsikoudsen, nous étions toujours
escortés par un officier que le prince du pays avoit envoyé au-
devant de nous, pour nous, complimenter et nous accompagner
sur tout son territoire. Malgré l’état-d’abjection où l’on tient les
Européens dans leur factorerie, et le mépris des Japonois pour
•les étrangers , il n’en, est pas moins vrai que ; dans le cours
de notre voyage, tant en allant qu’en revenant, non-seulement
nous fûmes reçus par-tout avec le plus grand empressement,
mais on nous témoigna même beaucoup do respect, et l’on
nous rendit les mêmes honneurs qu’aux Princes du pays, quand
ils -vont avec tout leur cortège à la cour de l’Empereur. A notre
arrivée sur les frontières des différentes' provinces, nous étions
sûrs de trouver un officier chargé par son maître de nous offrir
tous les secours nécessaires en hommes , 'en chevaux, en vaisseaux
, et qui nous accompagrioit jusqu’à l’autre frontière „ où il
étoit remplacé par un officier de-la province voisine. Le peuple
nous saluoit aussi profondément, et nous témôignoit-autant de
respect qu’à ses Princes-, en s’inclinant et posant le front contre
la terre (1) , quelquefois aussi en nous tournant le dos. C’est une
manière assez bizarre d’exprimer , qu’ils se croient indignes de
fixer une personne de votre rang.
Les chemins, dans toute l’étendue du royaume,-sont bien
entretenus , larges et garnis de ' fossés pour l’écsulement des
eaux. Comme les seigneurs du pays , ainsi que les Hollandois ,
sont obligés de faire tous les ans un voyage à la cour, de l’Empereur,
on sable la route, on la balaye , et l’on enlève, toutes
les ordures et les crottes-des, chevaux avant qu’ils ne passent.
On a soin d’arroser dans les chaleurs pour abattre la poussière.
(1) ‘ Cette manière de saluer , que mune aux Japonois et aux Chinois,
l’on nomme battre la tête , est coin- Rédacteur.