
grand nombre à Colombo et dans quelques autres endroits. Ils y
font un commerce considérable. Ces hommes sont généralement
d’une taille avantageuse, et plus noirs que les insulaires. Leur
costume me parut très-agréable. Ils portent une ample robe de
coton blanche semblable à. celles de nos femmes ; une ceinture
de la même étoffe et de la même couleur serre cette robe en
la plissant sur leur taille; elle se noue sur le côté droit. Ils ont
le turban, qui est la coëffure de la plupart des Orientaux. Leurs
oreilles sont chargées de longs anneaux gros comme le doigt ,
travaillés de différentes façons; tantôt unis , tantôt enrichis de
pierres rouges , bleues, vertes ; les uns n’ en portent qu’un,
d’autres cinq et six ; de manière que leur poids agrandit le trou
de l’oreille au point qu’elles finissent par battre sur les épaules.
On incruste dans beaucoup de ces boucles d’oreille un petit fruit
rond etraboteux, qui vient, dit-on, sur une montagne sacrée du
pays, nommée Outeralié. Il est ordinairement gros comme un
petit pois, quelquefois comme une balle-à fusil. Quelques Maures
superstitieux croient trouver dans les plis de ce fruit sept figures
humaines. Lesfruits où l’on croit reconnoître ces figures les mieux
prononcées n’ont pas de prix; les moins riches les paient jusqu’à
deux cents écus. A peine les enfans ont-ils atteint l’âge de trois
ans, que leurs oreilles sont chargées d’anneaux. On peut juger,
par leur nombre et leur grandeur , du rang et de la fortune de
celui qui les porte. Les Chingulais dé distinction , comme les
Ambassadeurs, les Grands de la Cour , ont de longues chaînes
d’ or passées autour du col et qui leur tombent sur la poitrine.
J’en vis de pareilles aux Ambassadeurs du roi de Candi, qui
vinrent à Colombo pendant mon séjour dans cette villécLe même
Monarque en donne aussi .à l’Ambassadeur hollandois et à son
secrétaire avant de les admettre à son audience. Ces chaînes ne
sont pas composées de mailles ni de charnières , mais de boules
creuses tissues en filet d’or comme du filagramme : ces boules
sont enfilées dans un cordon de soie ou dans un fil d’or de la
longueur nécessaire. Ces chaînes sont très-iiigénieusement tra
vaillées , et ên même tems très-légères , de manière qu’elles ne
valent guère plus de vingt à trente pagodes (1).
C H A P I T R E IV.
C u l t e s religieux. — Idiomes de l île de Cey lan.
P e n d a n t que les. Portugais étoient maîtres de cette île,.ils.,
ne négligèrent rien pour y établir leur religion et leur langue ,
comme dans plusieurs autres contrées de l’Asie. Il reste encore
des traces de l’une et de l’autre. Les Malabars et plusieurs autres
nations établies sur les côtes occidentales de l’Inde, parlent
encore un portugais t r è s -corrompu. Il est presque aussi utile
que le malai, sur les côtes orientales de l’Inde.
Les Hollandois, après leur installation dans cette île , ont
voulu conserver parmi les naturels, les notions qu’ils avoient
déjà de la religion chrétienne. La Compagnie a entretenu les
églises et les écoles établies pour l’instruction des habitans et
des esclaves : on y ordonne même des prêtres pour le culte. :
Les idolâtres de l’île rendent leur hommage à Boudha ou
Bouddou, qui est adoré par toutes les nations de l’Orient. On
voit son image non-seulement dans les temples, . mais encore
dans les maisons. Ses adorateurs lui donnent le titre de. Bea ni
Bouttou hamdrue (seigneur dieu Bouttou). Us lui présentent
beaucoup d’ offrandes , qui font un revenu fixe et considérable
pour les prêtres attachés à ses temples. Leurs présens sont toujours
intéressés. Tantôt ils forgent des pièces d’argent très-
minces , dont ils forment ensuite de petits simulacres humains
qu’ils déposent sur les autels du dieu, pour obtenir la santé. Pour
(1) Ces pagodes valent un ducat de Hollande ou quatre livres.