
et qui traitent des sciences et arts , ils ne se vendent pas à la
folle enchère, mais on en fait des,échanges avantageux avec les
interprètes.
Les officiers avoient apporté pour leur compte du camphre
bru t, des joncs fins, des écailles de tortues, des cornes de
licorne , des verreries , de grandes et petites montres , de 1 indienne
fine, du safran, de la theriaque , du jus de. reglisse ,
des ouvrages de Nuremberg, tels que des miroirs, fkc.
, Le kambang de cornes d’unicornes. (t) s’est vendu cette
année assez cher. On en a beaucoup passé en contrebande , sur
lesquelles on a fait un gain considérable. Les Japonais attribuent
à ces cornes des vertus extraordinaires; ils les croient propres a
prolonger la vie', à donner du ton aux esprits vitaux, à renforcer
la mémoire; en un mot, ils les regardent,comme une panacée
universelle, et les emploient dans toutes les maladies. Il n’y
a pas long-tems que cet article fait partie du commerce des
Hollandois , et c’est le hazard qui leur en a procuré la connois-
sance. Un chef qui avoit résidé à Nagasaki, de retour en Europe,
envoya une belle corne-de licorne du Groenland à un interprète
Japonois de ses amis : le produit de la vente do celle corne fit
la fortune de cet interprète. Aussi-tôt lej| Hollandois s'empressèrent
de tirer d’Europe toutes les cornes qu’ils purent se
procurer , et sur lesquelles ils firent d’abord un profit immense.
Elles se vendoient au commencement cent kobangs ou six mille
(i) L ’ unicorne, ( monodon monoce-
ros) / est un animal cétacé ; de la classe
des mammaux, qui vivent dans l'amer
sous forme de poisson. I l constitue un
genre fort remarquable par les deux
dents de sa mâchoire supérieure , qui
sont saillantes et très-prolongées en
avant, sur-tout celle qui persiste dans
l ’âge adulte de l’animal , et qui ressemble
à une corne longue , très-
droite, et torse en spirale. La licorne
des .anciens, c ’est-à-dire, le singulier
quadrupède désigné sous le nom de
licorne , et représenté sous la forme
d’un cheval muni d’une corne droite
située au milieu du front, est un animal
fabuleux. Lam,
rixdalles la catche (1). Mais elles ont ensuite diminué , et
sont tombées à soixante-dix, cinquante, et trente kobangs. Vu la
proscription du vaste.habit de capital no (v.j et l’impossibilité de
faire la contrebande cette année, il a fallu vendre les cornes de
licornes à la folle enchère en kambang; la patche.de cornes s’est
payée cent trente-six rixdalles (3) , ou huit mas, et cinq konderyns
d’argent du Japon. On en auroit tiré quinze: ou seize kobangs,
si l’on eût pu en vendre secrètement sur le vaisseau. Les
trente-sept catches, quatre thaëls , six mas de cornes que j’avois
apportées de Java, me produisirent cinq mille soixante - onze
thaëls et un mas; ce qui me mit en état non-seulement de payer
mes dettes, mais encore de consacrer mille deux cents rixdalles
à ma,science favorite.
Un article non moins recherché par les Japonois, et qu’ils
paient aussi cher que la corne de licorne, c’est la racine de
ninsi, qu’ils appellent nindji, etque lesChinois nomment jom (4).
Il n’y a que ces derniers qui puissent en fournir de bonne
et de naturelle. Elle. croît dans le nord de la Chine , et surtout
dans la Corée. Les Hollandois en apportent de fausse, que
l’on mêle avec, la véritable; celle que les François portent
en Chine ne vaut pas mieux, et c’est simplement de la racine de
ginseng. Le vrai ninsi s’êst vendu cette année cent kobangs le
catche de bonnes et vieilles racines; celles cle qualité inférieure
ont été données à,meilleur marché; les fausses, dont les-meilleurs
morceaux sont blancs et fendus en deux, et que l’on
entremêle avec les véritables, sont une contrebande sévèrement
(î) Cinq quarts de livre.
(2) V o y e z , t. I , p. 5ô2.
(3) Cinq cent cinquante livres de
France.
(4) Le djon ou djin, vulgairement
jiidji, nindjin, ou djin djom, som en
chinois, sou s ai en tatar. C’est le fameux
ginsen dont la racine est tant
estimée à la Chine et dans les pays
voisins. Voyez la figure de cette plante
dans le tome VIII de l’Histoire du Japon
, par le P. Charlevoix. Redact.