
pieds rapportent, année commune, trois ou quatre picles de fèves:
le picle pèse cent vingt livres.
On me dit que dans les commencemens de son installation
dans les îles de la Sonde , la Compagnie hollandoise avoit payé le
picle de café vingt-cinq rixdalles. Maintenant elle ne donne que
six rixdalles, sur lesquelles le fommegou ou bailli en garde deux
pour lui, de manière que le cultivateur javan n’en reçoit réellement
que quatre.
On a soin de planter entre chaque arbuste à café, des éry thrines
ou arbres de corail ( 1), nommés ici dadap, pour leur procurer
une ombre suffisante contre les rayons dévorans du soleil. Les
plants de caféiers offrent un charmant coup-d’oei!.: Oes arbrisseaux
sont parfaitement alignés, quoiqu’à une distance assez
considérable les uns des autres. Le même arbuste a ses branches
pendantes , chargées de baies et couvertes de fleurs blanches. '
Un chirurgien allemand, précédemment employé au service
de là Compagnie hollandoise des Indes, et trèà-considéré du
gouverneur de Samarangj étoit aveugle par une cataracte. Ce
gouverneur ayant appris par le médecin de l’hôpital chez qui je
logeois , que j’étois en état de rendre la vue à son chirurgien,
m’offrit cent ducatons si je réussissois ; il envoya ■ même un
courrier pour chercher mes instrumens, qui étoient restés à hord
du vaisseau à Juana : mais notre malade, non moins opiniâtre
qu’ aveugle , ne voulût jamais endurer l’opération. Je ne voulois
pas que mes instrumens fussent venus en vain, je m’en servis à
opérer un vieil Européen et une Chinoise de soixante-dix ans ,
tous deux aveugles par des cataractes. J’enseignai par la même
occasion cêtte superbe opération chirurgicale à mon hôte,,et
(1) 'Erythrïna corallodendrum. Illustr.
planclie 608 , £g. 1. J’observe que si
l ’espèce dont parle ici M. Thunberg est
véritablement Verythrina corallodendrum
, ses fleurs sont d’un beau rouge,
et paraissent avant les feuilles. Lam.
je
je lui cédai les instrumens nécessaires , et tous ceux qui ne m’é-
toient pas d’une utilité indispensable sur le vaisseau.
Le 3 mai, les Javans célébrèrent leur patti ou nouvel an. Le
gouverneur de la province , qui faisoit ici sa résidence, donna
pour cette fête un grand gala, où tous les employés de la Compagnie
furent invités.
Le i 4 du même mois je partis avec un vaisseau hollandois
pour Japara.„ou je Tus parfaitement bien reçu par M. Van-der-
Beek , qui rempligsoit alors les. fonctions:de résident dans cette
place, agréablement située. M. Van-der-Beek est homme de
lettres.., et témoigne une bienveillance toute particulière à ceux
qui les cultivent. Mais je ne pus jouir long-tems de sa société,
car le vaisseau ou cargaison à Juana, et sur lequel je devûis retourner
à Batavia , étoit. sur le point de mettre à la voile.
Le 20, je continuai mon voyage à cheval,.accompagné.d’un
Javan, que M. Yan-der-Beek m’avoit donné pour guide.'Comme
il étoit impossible que je me rendisse en un seulj.our à Juana,
il me donna des lettres de recommandation pour un prince Javan
qui avoit épousé la soeur de l’empereur , et qui, Taisoit sa résidence
dans une ville située a moitié chemin de Juana. Je me
présentable, soir chez ce prince , qui m’admit à sa table. Nous
soupâmes tête-à-tête , et je l’entretins d’objets très-indifférens
en mauvais malai. Des hiboux et d’autres animaux troublèrent
mon sommeil , enheurlant et criant toute la nuit. Enfin , le lendemain
soir j’arrivai à Juana, et pris incontinent une chaloupe
qui,me conduisit à bord. Le vaisseau avoit'déjà quitté la rade et
mouillé à une lieue de-là.en pleine mer.
Les. côtes septentrionales de Java.sont très-basses , les,fonds
très-vaseux et peu profonds, ce qui oblige les, vaiss.eaux. de
mouiller à une certaine distance de la.côte, car: pour le.peu
qu’ils approchent, ils s’embourbent dans la vase quand ils sont
trop chargés. C’ est ce qui nous arriva, malgré la précaution
qu’on avoit eue de s’éloigner de la terre pour recevoir le reste
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