
Leurs champs sont sarclés avec tant de soin , que le botaniste
le plus clairvoyant auroit de la peine à y découvrir une
plante étrangère. Nos potagers ne sont pas mieux entretenus. •
Il faut avoir été témoin oculaire des soins minutieux que les
laboureurs donnent à la culture, pour en avoir une idée , et
sur-tout pour y croire. On voit souvent au pied et sur la croupe
même d’une montagne, des couches en terreau et en fumier ,
d’une aune en quarré, garnies d’une muraille de pierres , sur
lesquelles ils sèment du riz ou des racines.
L’agriculteur dispose son champ par couches , ou plutôt par
lits larges d’un pied, et séparés les uns des autres par un sillon
de même longueur. 11 sème sur ces couches son riz ou son froment
, tantôt en-dignes transversales, tantôt sur deux longs
sillons. Quand la plante est parvenue à la hauteur d’une demi-
aune , on prend de la terre dans le fossé pour la rechausser.
Le grain de première nécessité pour les Japonois est le riz ;
ils font peu de cas du sarrasin, du seigle, de l’orge, et même
du froment. Us ont beaucoup de racines excellentes, mais leurs
patates (i) sur-tout ont un goût exquis, et sont très-abondantes.
Us plantent beaucoup de fèves, de pois, d’oignons, de raves,
de choux, &c. dont les fleurs jaunes font l’ornement des campagnes
auprintems : les graines leur fournissent une bonne huile
à brûler.
Vers les premiers jours d’avril, le cultivateur se met à bêcher
les champs destinés à recevoir le riz. Cette plante est alors submergée
dans son terrain natal , dont on a soin de garnir les limites
de bourrelets assez élevés 5 ils se servent d’une bêche large
comme la main et adaptée à un manche de bois j ils retournent
la terre à un pied de profondeur. Quant aux vallées et aux
terrains qui peuvent être inondés sans le secours de l’art et
/ i) Convolvulus edulis. Convolvulus batatas. Lin.
par
par leur propre situation, on les laboure avec une charrue attelée
d’un boeuf ou d’une vache, et c’est-là tout le parti que les
Japonois tirent de ces animaux (1).
On commence par semer le riz sur une couche très - épaisse,
semblable à celle que nous faisons pour nos choux. Quand la
plante est parvenue' à un quart d’aune de hauteur, on la sarcle
et on la transplante eh pleine terre par bouquets , séparés d’un
quart d’aune les uns des autres. C’est ordinairement le travail
des femmes ; elles sont obligées de marcher dans l’eau et dans
la bourbe , où elles enfoncent à une assez grande profondeur.
Ils inondent ordinairement leurs plantations dé riz'avec l’eau du
c ie l, qu’ils recueillent dans des terrains élevés, pour la répandre
ensuite’ sur les plaines inférieures, garnies dans toutè lèur
circonférence d’un petit parapet , destiné à retenir l’eau qu’ils
font couler ensuite dans lés vallons quand, leurs rizières ont
été suffisamment submergées. Le grain ne mûrit que dans le
mois,,de novembre ; alors on. le coupe; et on le rentre lié en
bottes. Il sé bat très-aisément, car il suffit de frapper les bottes
contre un tonneau ou Contre une muraille , pour en faire Lomber
tout le grain : mais on a beaucoup plus de peines à flébarrasser
ce grain de son enveloppe ; cette dernière opération ne se fait
qu’à mesure qu’on en a besoin, e t . de deux manières différentes,
tantôt dans une espèce d’auge ou de mortier à plusieurs
pilons., mus par la roue d’un moulin à eau , et tantôt par
un homme qui foule le grain avec les pieds, et l’agite avec un
bâton pour le faire passer dans une espèce de chausse. Cés
auges ' sont rangées sur deux lignes au nombre de quatre au
moins de chaque côté. On bat aussi le bled à la porte des
maisons , sur des nattes en plein air, avec des fléaux a trois
battans. Sur les vaisseaux et dans plusieurs contrées des Indes
(1) Dans les environs d’Iédo seulement, on les attelle à des voitures à roue««
Rédacteur.
Tome I L Oo