
dieu. Il y eut beaucoup de concerts , de danses et de comédies.
La fête commença dès le sept. On visita les temples«5 il y. eut des
sermons , des prières , des spectacles 5 mais la grande solemnité
n’eut lieu que le neuf. Les cérémonies les divertissemens
varient tous les ans 5 les habitans contribuent aux dépenses de
la fête , de manière que chaque rue en fournit une portion pour
son contingent.
Je fus invité, ainsi que les .Hollandais , à celle qui se célébra
en 1776 à Nagasaki dans une très-grande place , et nous y assistâmes
très à l’ aise sous une espèce de angar , élevé exprès dans
et Charlevoix, Histoire et description
générale, &c. t. I , p. 3 j 5 . J’observe
qu’il a mal interprété le nom de la'fê te
du quinzième jour de la septième lune.
Ce nom, qu’il n’a pas indiqué en langue
japonoise même, est gibon, selon V il-
lela., et givon, selon Kcempfer, c’est-à-
dire voix de l’homme (vox hominis ) et
non pas la fête de l’homme , comme le
traduit Charlevoix.
Je terminerai cette note par quelques
observations du philosophe et systématique
Boulangei, dont les ouvrages mé-
rit'eroient d’être souvent médités par
des hommes qui veulent sapper les impostures
sacrées, et anéantir l’influence
sacerdotale.
On sait que la fête des lanternes se célébré
égalemen t à la Chine avec des cérémonies
peu differentes de celles du
Japon. «Elle se trouve placée au commencement
de l’année, dit Boulanger.
Tous les .auteurs s’accordent à dire que
cette nuit toute la Chine paroît en feu ;
mais personne ne nous a donné des motifs
raisonnables de cette fête. Chez les
Chinois, comme ailleurs , ces. usages
sont antérieurs à l’histoire ; et ce peuple
est obligé de les expliquer, par des
fables. Les Chinois ne consacrent pas
cette fête aux ancêtres. Les uns prétendent
que c’est pour féliciter l’empereur
et donner un divertissement au peuple ;
d’autres disent qu’elle vient d’une impératrice
qui se plaisoit à illuminer son
palais. Certains prétendent que c ’est en
mémoire d’un mandarin qui chercha
avec des flambeaux-sa fille morte dans
un fleuve, &c. » —- ÏJotre savant auteur
soupçonne que celte fête n’est
qu’une Commémoration du déluge ,« et
cette conjecture he me paroît pas .dépourvue
de fondement, d’après la cérémonie
qui la termine chez les Japonais.
Voyez VAntiquité dévoilée par ses
usages , t, I I I , p. 46. Description de la
Chine , par Duhalde, t. I , p. 112 5 Rentra.
à Socielate gestar. comment. Emmanuel
Acostoe. Dilingoe, 15yi ,p. 172-
174. Note du Rédacteur.
un coin de cette place , et garni de bancs pour tous les spectateurs
privilégiés, tels que les employés du gouvernement, les
ecclésiastiques et les étrangers. Une garde nombreuse éeartoit
de nous la foule. Nous vîmes arriver d’abord les prêtres revêtus
d’habits noirs et blancs, portant l’image du dieu Sceva. Us
prirent place ; dix ou douze musiciens jouoient et chantoient
les exploits des dieux et des héros, tandis que de jeunes filles
exécutoient de jolies danses. Quant à la musique, elle me parut
un vrai tintamare. Nous vîmes ensuite un grand parasol sur
lequel étoient inscrits les noms et le signe distinctif des rues $
il étoit accompagné de musiciens masqués , qui chantoient en
s’accompagnant de tambours , de flûtes et de petites sonnettes.
Venoit ensuite l’offrande de chaque rue , dont les habitans
rivalisoient entre eux en magnificence et en invention : ils
s’attachoient sur-tout à des objets relatifs aux productions de
leur province, à ses mines , à ses montagnes, à ses manufactures
ou à son industrie , ou bien à la province dont cette rue porte le
nom et d’où ses habitans sont originaires. Les habitans même
de chaque rue, réunis en corps et précédés de quelques
acteurs, marchoient à la suite de leurs présens, et formoierit
une procession séparée , qui ne mettoit pas moins d’une heure
pour se rendre à la grande place , d’où elle repartoit dans le
même ordre ; nous les vîmes ainsi arriver et partir successivement.
Une foule innombrable de tout âge et de tout sexe
suivoit ce cortège. Je n’en dirai pas davantage sur leurs farces
sacrées ; je passe à leurs farces profanes.
J’ai eu souvent occasion d’assister à leurs comédies ( i) , tant
par leurs néophites et les éfudians de
leur collège. Une de ces pieuses représentations
dura plus de quatre heures.
L e prince d’Omouray assista avec toute
sa cour et un grand nombre de spécial
(1) Les Jésuites étoient trop adroits
pour ne pas tirer parti du goût des Ja-
jonois pour les spectacles. Ils firent
représenter plusieurs fois la naissance
de Jésus dans leur église de Nagasaki