
de la cargaison , et de ne mettre à la voile que dans le plus fort
du flux. Nos matelots se virent contraints de débarquer une
grande quantité de planches sur de grosses barques , pour alléger
notre navire. Un bon vent nous poussa, enfin l’espace de deux
lieues à travers une vase épaisse , dont on yoyoit la trace dans
le sillage du vaisseau, càr lleau étoit trouble et bleuâtre.
Les navigateurs assurent que la profondeur de l’eau diminue
dans ses parages en raison de l’accroissement des cotes. On
prétend même que cet accroissement est te l, que l’on voit des
marais dans des endroits où les premiers vaisseaux de la Compagnie
trouvèrent à leur arrivée un très-bon'ancrage. Ces côtes
septentrionales-sont aussi les plus fertiles de toute l’île. Celles
situées du côté-du midi, au contraire, n’offrent que des rochers
et des montagnes peu fertiles. Dans cette partie, la mer est très-
profonde et le rivage escarpé.
Ü Une langue de terre s’ avance dans la mer entre Juana et Japa-
ra; nous doublâmes cette espèce de cap. Nous vînmes au rocber
qu’on nomme le rocher du diable . parce qu’il sert d as^le a des
corsaires , ainsi que les îles Intermaja et Boompjes ; ces corsaires
attaquent et enlèvent tous les bâtimens, grands ou petits,
qui ne sont pas équipés de manière à leur tenir tê te , ou qui
n’ont pas de vaisseau de conserve. Comme ce ne sont point des
Javans , mais des naturels de Bornéo et des iles voisines, il ne
sera pas aisé de les détruire.
Au reste, notre navigation fut des plus heureuses. Le 1“ juin
nous mouillâmes dans le port de Batavia. Je ne fus pas plutôt
arrivé, qu’on me commanda de garde sur le vaisseau des malades
(1) ; mais j’en fus quitte moyennant un ducaton que je
donnai à un chirurgien remplaçant.
A mon retour, je fis connoissance avec un de mes compa(
1) Vo yez le tome \ T p . 389.
triotes , M. Wimmererants , capitaine-ingénieur au service de
la Compagnie hollandoise, qui jouissoit d’une considération égale
à son rare mérite. Il demeuroit dans un faubourg, et pendant le
reste de mon séjour à Batavia, je reçus de lui plusieurs services
importans , qui „prouvent la tendre affection qu’il conserve pour
ses compatriotes.
En attendant le départ du vaisseau qui devoit me conduire
à File de Ceylan, que je voulois aussi visiter , le gouverneur général
me permit de mè promener dans Fintériem* du pays, jus-
qu’aux bains chauds et aux montagnes bleues. Le baron de
Wurmb voulut m’accompagner j le commissaire des naturels du
pays me donna un valet pour guide, et M. Yimmererants me
prêta son cheval pour ce voyage.
Le ig juin nous nous rendîme s à Tanjong, place appartenante
au sénateur Cran. Elle est situee a d i x -huit grands pieux (1)
de Batavia.
Le 20 au matin nous partîmes pour Tehipinong , a vingt-cinq
pieux de là $ nous y dînâmes, et passant parTchinanguis etT'cbi-
luar , nous arrivâmes à Buyten-Zorg ( Sans-Souci) à cinquante
pieux de Batavia. C’est une maison de plaisance des gouverneurs-
généraux. L ’un d’eux nommé Suchoff y a fait construire plusieurs
beaux édifices très-élevés et divisés en deux pavillons, avec
une galerie et des jardins délicieux : mais cet endroit est un
peu trop éloigné de la capitale pour que le gouverneur-général
y vienne aussi souvent qu’il le desireroit.
Le 22, nous allâmes à Tchiseroa , et gravîmes les hautes
montagnes de Tchipannas. Ces deux endroits, ainsi que Poudo-
gede et Arkidomas, appartiennent au gouverneur-général, ou
plutôt à la Compagnie. Nous réservâmes pour le lendemain le
J’observerai que les distances ,
dans cette île } sont mesurées par des
pieux placés à des espacés péü égaux.
Rédacteur.
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