nourri fiant de peu, &. fe contentant de brouter l’herbe,
elles nè difputent point aux animaux de leur efpèce
un aliment quelles trouvent toujours en affez grande
quantité'■ pouvant d’ailleurs, ainfi que les autres tortues
& tous les Quadrupèdes ovipares, palier plufieurs mois,
& même plus d’un a h , fans prendre aucune nourriture,
elles forment un troupeau tranquille f elles ne fe recherchent
point, mais elles le trouvent enfemble fans
peine, & y demeurent fans contrainte ; elles ne fe réunifient
pas en troupe guerrière par un inftinéf carnaffier
pour s’emparer plus aifément d’unè proie difficile à
vaincre, mais Conduites âux mêmes endroits par les
mêmes goûts & par les mûmes habitudes, elles con-
fefvent une union paifible. Défendues par une carapace
offeufë, très-forte, & fi duré que des poids très-
lourds ne peuvent l’écrafèr, garanties pat Cette forte
de bouclier, mais n’ayant rien pour Cuire, elles ne
redoutent point la fociété de leurs fentblables, quelles
ne peuvent à four tour troubler par aucune ©ffenfe.
La douceur & la forcé, pour réfifter, font donc ce
qui tlifiinguelà tortue franche, ■&. c’eft peut-être à ces
qualités que les Grecs firent alluiion lorfquils là donnèrent
pour compagne à la beauté, torique Phidias la
plaça comme au fymbolé aux pieds de fa Vénus ( l) .
Rien de brillant dans fes moeurs , -non plus que dans
( / ) jPattfoenias in etiacts.
d e s Q u a d r u p è d e s o v i p a r e s . 63
les couleurs dont elle eft variée : tuais fes habitudes
font auffi confiantes que fon enveloppe a de foliffité;
plus patiente q u a lifian te e lle n’éprouve pvefque jamais
de defirs véhémens; plus prudente quç courageufe,
elle fe défend rarement, mais elle cherche à fe mettre
à l’abri ; & elle emploie toute fa fore© à fe ©j-amponer,
lorfque, ne pouvant brifer fa carapace, ou cherche à
l’enlever avec cette couverture,
La confiance de fes habitudes paroit fe faire fentir
jufque dans f©s amours. Non-feulement le màJ© recherche
fa femelle ave© ardeur , mais leur union la
plus intime dure pendant près de neuf jours; ç©ft an
milieu des ondes qu’ils s’accouplent plafiron contre
plaftron (m). Ils s’embraflent fortement avec leurs longues
nageoires 3 ils voguent enfemble, toujours réunis par
le plaifir, fans que les flots amortiflent la chaleur qui les
pénètre ; on prétend même que leur efpèce de timidité
naturelle les abandonne alors; ils deviennent, dit-on,
comme furieux d’amour; aucun danger ne les arrête;
& le mâle ferre encore étroitement fa femelle, lorfque
pourfniviè par les chafieurs, elle ©fl,déjà filefi,e©à mort,
&. répand tout fon fang (n).
(m) Mémoires manuferits fu r les tortues, rédigés jrar.M■ 4e Fou-
geroux.
(n) « J ’ai pris des mâles dans le teros de leur union avec leurs