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 de faifir fa  proie.  Sa couleur,  fa  forme  alongée,  
 fon  filence  trompent  les  poiflbns,  les  oifeaux  de  mer,  
 les  tortues  ,  dont  il  eft  très -  avide.  11  s’élance  auffi  
 fur  les  béliers,  les  cochons  ( i )   ,  &   même  fur  les  
 boeufs:  lorfqu’il  nage,  en  fuivant  le  cours  de  quelque  
 grand  fleuve ,  il  arrive  fouvent  qu’il  n’élève  au-deffus  
 de  l’eau  que ' la  partie  fupérieure  de  fa  tête ;  dans  
 cette  attitude,  qui  lui  laiflè  la  liberté  des  yeux,  il  
 cherche  à  furprendre  Les  grands  animaux  qui  s’ap-  
 prochent  de  l’une  ou  de  l’autre  rive;  &   lorfqu’il  en  
 voit  quelqu’un  qui  vient  pour  y  boire,  il  plonge,  va  
 jufqu’à  lui  en  nageant  entre  deux  eau x ,  le  failit  par  
 les  jambes,  &   l’entraîne  au  large  pour  l’y  noyer.  Si  
 la  faim  le  prefle,  il  dévoré  auffi  les  hommes  (k.) ,  &   
 particulièrement  les  Nègres,  fur  lefquels  on  a  écrit  
 qu’il  fe  jette  de  préférence  ( l ) .   Les  très -  grands  
 crocodiles  fur -  tout  ayant  befoin  de  plus  d’alimens,  
 pouvant  être  apperçus  &   évités  plus  facilement  par 
 {i )  Catejby, Hijîoire  naturelle  de  la  Caroline  vol.  a , page  6p. 
 ( k )  Dans  l’Egypte  fupérieure,  ils  dévorent  très-fouvent  les  femmes  
 qui  viennent  puifer  de  l’eau  dans  le  N i l,  &  les  enfâns  qui  fe  jouent  
 fur  le  bord  du  fleuve.  Hajfelquijl,  Voyage  en Palejline,  page  347. 
 (  l )  Objhrvations  fu r  le  crocodile  de  la  Louifiane, par  M.  de  la  
 Çoudremère, Jqurnal de  Phyfique, ij8 z . 
 d e s   Q u a d r u p è d e s   o'v i p a r e s .  215  
 les  petits  animaux,  doivent  éprouver  plus  fouvent  &   
 plus  violemment  le  tourment  de  la  faim,  &   par  con-  
 féquent  être  quelquefois  très-dangereux,  principalement  
 dans  l’eau.  C’eft  en  effet  dans  cet  élément  que  
 le  crocodile  jouit  de  toute  fa  force,  &   qu’il  fe  remue  
 avec  agilité, malgré fa  lourde maflë, en faifant fouvent  
 entendre  une  efpèce  de  murmure  fourd  &   confus.  
 S’il  a  de  la  peine  à  fe  tourner  avec  promptitude ,  
 à  caufe  de  la  longueur  de  fon  corps,  c’eft  toujours  
 avec  la  plus  grande  vîteffe  qu’il  fend  l’eau  devant  lui  
 pour  fe  précipiter  fur  fa  proie:  il  la  renverfe  d’un  
 coup  de  fa  queue  raboteufe ,  la  failit  avec  fes  griffes,  
 la déchire,  ou  la  partage  en deux avec  fes  dents  fortes  
 &   pointues,  &   l’engloutit  dans  une  gueule  énorme,  
 qui  s’ouvre  jufqu’au-delà  des  oreilles  pour  la  recevoir.  
 Lorfqu’il  eft  à  terre,  il  eft  plus  embarraffé  dans  fes  
 mouvemens, &   par  conféquent  moins  à  craindre  pour  
 les  animaux  qu’il  pourfuit: mais,  quoique moins  agile  
 que  dans  l’eau,  il  avance  très-vite,  quand  le  chemin  
 eft  droit,  &   le  terrain  uni.  Auffi,  lorfqu’on  veut  lui  
 échapper,  doit-on  fe  détourner  fans  ceflè. On  lit  dans  
 la  deïcription  de  la  nouvelle  Efpagne  (  m )   ,  qu’un  
 voyageur  Anglois  fut  pourfuivi  avec  tant  de  vîtefle  
 par un monftrueux  crocodile  forti  du lac  de Nicaragua, 
 ( m ) Hijîoire  générale  des  Voyages, 5." Partie.