chages &. de terre ; on effraie enfuite à grands cris
ïe crocodile qui, reprenant pour aller à la mer le
chemin qu’il avoit fuivi pour s’écarter de fes bords,
paffe fur la folfe , y tombe , & y eft affommé ou
pris dans des filets. D’autres: attachent une forte corde
par une extrémité à un gros arbre; ils lient a l’autre
bout un crochet & un agneau , dont les cris attirent
le crocodile, qui, en voulant enlever cet appas, fe
prend au crochet par la gueule. A mefure qu’il s’agite,
le crochet pénètre plus avant dans la chair : on fuit
tous fes mouvemens en lâchant la corde, & on attend
qu’il foit mort, pour le tirer du fond de l’eau.
Les Sauvages de la Floride ont une autre manière
de le prendre; ils fe réunilfent au nombre de dix
ou douze ; ils s’avancent au devant du crocodile,
qui cherche une proie fur le rivage ; ils portent un
arbre qu’ils ont coupé par le pied ; le crocodile va
à eux la gueule béante ; mais en enfonçant leur
arbre dans cette large gueule, ils 1 ont bientôt ren-
verfé & mis à mort.
On dit auffi qu’il y a des gens affez hardis pour
aller en nageant jufque fous le crocodile, lui percer
la peau du ventre, qui eft prefque le feul endroit ou
le fer puiffe pénétrer.
Mais l’homme n’eft pas le feul ennemi que le crocodile
ait à craindre: les tigres en font leur proie:
l’hippopotame le pourfuit, & il eft pour lui d autant
d e s Q u a d r u p è d e s o v i p a r e s . 2.2.J
plus dangereux, qu’il peut le fuivre avec acharnement
jufqu’au fond de la mer. Les Cougars, quoique plus
foibles que les tigres, détruifent auffi un grand nombre
de crocodiles.; ils attaquent les jeunes caymans ; ils
les attendent en embufcade fur le bord des grands
fleuves, les 'faillirent au moment qu’ils montrent la
tête hors de l’eau , & les dévorent. Mais lorfqu’ils
en rencontrent de gros & de forts, ils font attaqués,
à leur tour ; envain ils enfoncent leurs griffes dans les
yeux du crocodile, cet énorme lézard, plus vigoureux
qu’eux, les entraîné au fond de l’eau (d).
Sans ce grand nombre d’ennemis, un animal auffi
fécond que le crocodile ferait trop multiplié; tous les
rivages des grands fleuves des zones torrides feraient
infeftés par ces animaux monftrueux, qui deviendraient
bientôt féroces & cruels, par l’impoffibilité où ils feraient
de trouver aifément leur nourriture. Puiffans par leurs
armes, plus puiffans par leur multitude, ils auraient
bientôt éloigné l’homme de ces terres fécondes & nouvelles
que ce Roi de la Nature a quelquefois bien de la
peine à leur difputer : car comment réfifter à tout ce qui
donne le pouvoir, à la grandeur, aux armes, à la
force & au nombre. Profper Alpin dit qu’en Egypte,
les plus grands crocodiles fuyent le voifinage de
( d) Hijloire générale des Voyages, tome , gage 440, édit. i n - T I
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