2 ^ 8 H i s t o i r e N a t u r e l l e
qu’il eft très-facile de les faifir en viè. Dans plufieurs
contrées de l’Amérique, on les chaffé avec dés'chiens
dreflés à les poutfuivre; mais on peut auffi les prendrè
aifément au piégé (n). Le chaffeur qui va à la recherche
du lézard, porte une longue perche, au bout
de laquelle-eft une petite corde, nouée en forme de
lac. ( o ) . Lorfqu’il découvre un Iguane étendu fur
des branches , & s’y pénétrant de l’ardeur du foleil,
il commence à fiffler: le lézard, qui femble prendre
plaifir à l’entendre , avance la tête; p eu -à -p eu le
chaffeur s’approche , & en continuant de fiffler, il
•chatouille avec le bout de fa perche les côtés & la
gorge de l’Iguane, qui nom- feulement fouffre fans
peine cette forte de careffe J mais fe retourne doucement
, & paroît en jouir avec volupté, Le chaffeur
le féduit, pour ainfi dire, en fifflant & en le chatouillant,
au point de l’engager à porter fa tête hors des
branches, affez avant pour embarralîer fon cou dans
le lac : aüffitôt il lui donne une violente fecouffe,
qui le fait tomber à terre; il le faifit à l’origine de la
queue ; il lui met un pied fur le corps ; & ce qui
prouve bien que la ftupidité de 1 Iguane n eft pas auffi
grande qu’on lé dit, eeft que lorfque fa confiance eft
(n) Note communiquée par M. de la Borde,
(o) Voyages du Pire Lctbat en Afrique & en Amériques
d e s Q u a d r u p è d e s o v i p a r e s . 279
t r om p é e , & qu’il fe fent pris, il a recours à la force,
dont il n’avoit pas voulu ufer. Il s’agite avec violence;
il ouvre la gueule; il roule des yeux étincelans ; il
gonfle fa gorge: mais fes efforts font inutiles; le chafi
feur , en le tenant fous fes pieds, &. en l’accablant
du poids de tout fon corps; parvient bientôt à lui
attacher les pattes , & à lui lier la gueule, de manière
que ce malheureux animal ne puiffe ni fe défendre
, ni s’enfuir ( p )■
On peut le garder plufieurs jours en vie fans lui donner
aucune nourriture (q) ; la contrainte femble d a -
bord le révolter ; il eft fier ; il paroît méchant ; mais
bientôt il s’apprivoife ; il demeure dans les jardins ; il
(p) Catejby, Hifloire naturelle de la Caroline.
[q) Brown dit avoir gardé chez lui un Iguane adulte pendant plus
de deux mois. Dans le commencement il étoit fier & méchant ; mais,
au bout de quelques jours, il devint plus doux : à la fin j il paffoit la
plus grande partie du jour fur un l i t , mais il eouroit toujours pendant
la nuit, « Je n'ai- jamais obfervé , continue ce Voyageur, que cet
Iguane ait mangé autre chofe que les particules imperceptibles qu’il «
lâpoit dans l’air, ( ces particules étoient fûrement de très-petits infeétes ). «
Quand il fe promenoit, il dardoit fréquemment fa langue, comme le «
caméléon. La chair de l’Iguane eft recherchée par beaucoup de gens,«
$ & lorfquelle eft fervie en fricaffée, elle eft preferee a celle de la meil-«
leure volaille. L ’Iguane peut être aifément apprivoife, quand il eft«
jeune ; il eft alors un animal auffi innocent que beau. » Hifloire naturelle
de la Jamaïque par Brown > Londres, i 7$6 >PaS: