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 qu’il  eft  très-facile  de les  faifir  en  viè.  Dans  plufieurs  
 contrées  de  l’Amérique,  on  les  chaffé  avec  dés'chiens  
 dreflés  à les poutfuivre; mais  on  peut  auffi  les  prendrè  
 aifément  au  piégé  (n).  Le  chaffeur  qui  va  à  la  recherche  
 du  lézard,  porte  une  longue  perche,  au  bout  
 de  laquelle-eft  une  petite  corde,  nouée  en  forme  de  
 lac.  (   o  ) .  Lorfqu’il  découvre  un  Iguane  étendu  fur  
 des  branches ,  &   s’y  pénétrant  de  l’ardeur  du  foleil,  
 il  commence  à  fiffler:  le  lézard,  qui  femble  prendre  
 plaifir  à  l’entendre  ,  avance  la  tête;  p eu -à -p eu   le  
 chaffeur  s’approche  ,  &   en  continuant  de  fiffler,  il  
 •chatouille  avec  le  bout  de  fa  perche  les  côtés  &   la  
 gorge  de  l’Iguane,  qui  nom- feulement  fouffre  fans  
 peine  cette  forte  de  careffe J  mais  fe  retourne  doucement  
 , &   paroît  en  jouir  avec  volupté,  Le  chaffeur  
 le  féduit,  pour  ainfi  dire,  en  fifflant &  en  le  chatouillant, 
   au  point  de  l’engager  à  porter  fa  tête  hors  des  
 branches,  affez  avant  pour  embarralîer  fon  cou  dans  
 le   lac  :  aüffitôt  il  lui  donne  une  violente  fecouffe,  
 qui  le  fait  tomber  à  terre; il  le  faifit  à  l’origine  de  la  
 queue ;  il  lui  met  un  pied  fur  le  corps ;  &   ce  qui  
 prouve  bien  que  la  ftupidité  de  1 Iguane  n eft pas auffi  
 grande  qu’on  lé  dit,  eeft  que  lorfque  fa  confiance  eft 
 (n)  Note  communiquée par M.  de  la  Borde, 
 (o)  Voyages  du  Pire  Lctbat en Afrique &  en Amériques 
 d e s   Q u a d r u p è d e s   o v i p a r e s .  279  
 t r om p é e ,  &   qu’il  fe  fent  pris,  il  a  recours  à  la  force,  
 dont  il  n’avoit  pas  voulu  ufer.  Il  s’agite  avec  violence;  
 il  ouvre  la  gueule;  il  roule  des  yeux  étincelans ;  il  
 gonfle  fa  gorge:  mais  fes  efforts  font  inutiles;  le  chafi  
 feur  ,  en  le  tenant  fous  fes  pieds,  &.  en  l’accablant  
 du  poids  de  tout  fon  corps;  parvient  bientôt  à  lui  
 attacher  les  pattes  ,  &   à  lui  lier  la  gueule,  de  manière  
 que  ce  malheureux  animal  ne puiffe  ni  fe  défendre  
 ,  ni  s’enfuir  ( p   )■ 
 On peut le  garder plufieurs jours en vie  fans lui donner  
 aucune  nourriture  (q)  ;  la  contrainte  femble  d a -   
 bord  le  révolter  ;  il  eft  fier ;  il  paroît  méchant  ;  mais  
 bientôt  il  s’apprivoife ;  il  demeure  dans  les jardins ;  il 
 (p)  Catejby,   Hifloire naturelle  de  la  Caroline. 
 [q)  Brown  dit  avoir  gardé  chez  lui  un  Iguane  adulte  pendant  plus  
 de  deux mois.  Dans  le  commencement  il  étoit  fier &   méchant ; mais,  
 au  bout  de  quelques  jours,  il  devint  plus  doux :  à  la  fin j  il  paffoit  la  
 plus  grande  partie  du  jour  fur  un  l i t ,  mais  il  eouroit  toujours pendant  
 la  nuit,  «   Je  n'ai-  jamais  obfervé  ,  continue  ce  Voyageur, que  cet  
 Iguane  ait  mangé autre  chofe  que  les  particules  imperceptibles  qu’il «  
 lâpoit  dans l’air,  ( ces particules étoient fûrement de très-petits infeétes ). «   
 Quand  il  fe  promenoit, il  dardoit  fréquemment  fa  langue,  comme  le «   
 caméléon.  La  chair  de  l’Iguane  eft  recherchée  par  beaucoup  de  gens,« 
 $  &   lorfquelle  eft fervie  en  fricaffée,  elle eft  preferee a  celle  de la meil-« 
 leure  volaille.  L ’Iguane  peut  être  aifément  apprivoife,  quand  il  eft«  
 jeune ;  il  eft  alors  un  animal  auffi  innocent  que  beau.  »   Hifloire  naturelle  
 de  la Jamaïque par Brown >  Londres, i 7$6 >PaS: