de fa force, en lui rapportant fans raifon une vaine
multiplication d’efpèces; nous penfons, au contraire,
mieux révéler fa puiffance, en difant que toutes ces
différences qui font la magnificence de l’univers, que
toutes ces variétés qui l’embelliffent, elle les a fouvent
produites en modifiant de diverfes manières les efpèces
réellement difiinétes. Bien loin d’enrichir la feience
ne l’appauvriffons pas ; ne la rabaiifons pas en la fur-
chargeant d’un poids inutile d’efpèces arbitraires ; &
«’oublions jamais que du haut du trône fublime où
liège la Nature, dominant fur le tems & fur l’efpace,
elle n’emploie qu’un petit nombre de puiffances pour
animer la matière, développer tous les êtres., &. mouvoir
tous les corps de ce yafte univers,.
L E S T O R T U E S .
L a N a t u r e a traité prefque tous les animaux avec
plus- ou moins de faveur - les uns ont îequ la beaute,
d’autres la force: ceux-ci la grandeur, ou des armes
meurtrières ; eeux-là des attributs- d’indépendance , la
faculté de nager ou celle de s’élever dans les airs. Mais
expofés en naiffant aux intempéries de l’atmofphère, les
uns font obligés de fe creufer avec peine des retraites
fouterraines & profondes ; les autres n’ont- pour afyle que
les antres ténébreux des hautes montagnes ou des vâftes
forêts; c eu x -c i, plus petits,, font réduits à fé tapir dans
les- creux des arbres & des rochers , ou à aller fe réfugier
jufque dans la demeure de leurs plus cruels
ennemis-, aux yeux defquels- ni leur petitëife, ni leur
rufe ne peuvent les dérober long-tems ; ceux-la, plus
malheureux, moins bien conformés, ou moins pourvus
d’inftinét , font forcés de pâffer triftement leur, vie fur
la terre nue, & n’ont pour tout abri contre les froids
rigoureux & les tempêtes les plus violentes;, que quelques
branches d’arbres & quelques roches avancées ;
ceux dont la demeure eft la plus commode & la plus-
sûre, ne jouiffent de la douce paix qu’elle leur pro--
cure, qu’à- force de travaux & de foins ; les tortues-
feules eut reçu en naiffant une forte de domicile’