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 vie  à  la  fillonner  ou  à  fe  plonger  dans  les  flots. 
 J 1  en  eft  des  Raines  comme  des  grenouilles,  leur  
 entier  développement  ne  s’efFeclue  qu’avec  lenteur;  
 .&  de  même  qu’elles  demeurent  long-tems  dans  leurs  
 véritables  oeufs,  c’eft-à-dire  fous  l’enveloppe  qui  leur  
 fait  porter  le  nom  de  têtards,  elles  ne  deviennent  
 qu’après  un  tems  allez  long  en  état  de  perpétuer leur  
 elpèce  :  ce  n’eft  qu’au  bout  de  trois  ou  quatre  ans  
 qu’elles  s’accouplent.  Jufqu’à  cette  époque,  elles  font  
 prefque muettes;  les  mâles mêmes qui,  dans tant  d’ef-  
 pèces  d’animaux,  ont  la  voix  plus  forte  que  les  femelles’ 
   ne  fe  font  point  entendre, comme fi leurs cris  
 n’étoient  propres  qu’à  exprimer  des  defirs  quils  ne  
 xelfentent  pas  encore,  &   à  appeller  des  compagnes,  
 vers  lefquelles  ils  ne  font  point  encore  entraînés,  . 
 C’eft  ordinairement  vers  la  fin  du  mois  d Avril que  
 leurs  amours  commencent ;  mais  ce  n eft  pas  fur  les  
 arbres  quelles  en  goûtent  les plaifirs;  on  diroit  qu’elles  
 veulent  fe  fouftraire  à  tous  les  regards,  &   fe  mettre  
 à  l’abri  de  tous  les  dangers,  pour  s’occuper  plus  pleinement  
 fans  diftraélion  &   fans  trouble  de  l’objet  auquel  
 elles  vont  s’unir ;  ou  bien  il  femble  que^  leur  
 première  patrie  étant  l’eau,  c’eft  dans  cet  élément  
 quelles reviennent jouir  dans  toute  fon  étendue  dune  
 exiftence  quelles y ont  reçue, &  quelles  font  pouffées  
 par une  forte  d’inflind  à  ne  donner  le  jour  à de  petits 
 êtres femblables  à  elles,  que  dans  les  ailles  favorables  
 où ils  trouveront  en  naiffant  la  nourriture  &   la  sûreté  
 qui  leur  ont  été  néceffaires  à  elles-mêmes  dans .les  
 premiers  mois  où  elles  ont  vécu;  ou  plutôt  encore  
 c’eft.  à  l’eau  quelles  retournent  dans  le  tems  de  leurs  
 amours,  parce  que  ce  n’eft  que  dans  l’eau  quelles  
 peuvent  s’unir  de  la  manière  qui  convient  le  mieux  
 à  leur  organifation. 
 Les  Raines  ne  vivent  dans  les  bois  que  pendant  le  
 tems  de  leurs  chafl'es,  car  c’eft auflï  au  fond  des  eaux  
 &   dans  le  limon  des  lieux  marécageux ;  qu’elles  fe  
 cachent  pour  paffer  le  tems  de  l’hiver  &   de  leur  
 engourdifl’ement. 
 On  les  trouve  donc  dans  les  étangs  dès  la  fin  du  
 mois  d’Avril,  ou  au  commencement  de  Mai;  mais,  
 comme  fi  elles  ne  pouvoient pas renoncer, même  pour  
 un tems très-court,  aux branches qu’elles ont habitées,  
 peut-être  parce  quelles  ont  befoin  d’y  aller  chercher  
 l’aliment  qui  leur  convient  le  plus  lorfqu’elles  font  
 entièrement  développées,  elles  choififtent  les  endroits  
 marécageux  entourés  d’arbres  :  c’eft-là  que  les  mâles  
 gonflant  leur  gorge,  qui  devient  brune  quand  ils  font  
 adultes, pouffent  leurs  cris,  rauques  &  fouvent  répétés,  
 avec  encore  plus  de  force  que  la grenouille  commune.  
 A  peine  l’un  d’eux  fa it-il  entendre  fon  coaffement  
 retenti fiant,  que  tous  les  autres  mêlent  leurs  fons  dif-  
 cordaus  à fa,  voix;  &.  leurs  clameurs  font  fi  bruyantes 
 A  a a  a  ij