petits que lui , ou de poiffons qu’il va chercher au fond
des eaux ; mais, n’ayant pas la même grandeur , les
mêmes armes , ni par conféquent la même puiflance
que le crocodile, & pouvant manquer de proie bien
plus fouvent, il ne doit pas être fi difficile dans le choix
de fa nourriture ; il doit d’ailleurs chaffer avec d’autant
plus de crainte , que le crocodile auquel il ne peut
réfifter eft en très-grand nombre dans les pays qu’il habite.
On rapporte même que la préfence des caymans,
infpire une fi grande frayeur au Tupinambis , qu’il fait
entendre un fifflement très-fort. Ce fifflement d’effroi eft
une efpèce d’avertiffement pour le6 hommes qui fe
baignent dans les environs; il les garantit, pour ainfi
dire , de la dent.meurtrière du crocodile, & c’eft de-là
qu’eft venu au Tupinambis le nom de Sauvegarde ou
Sauveur, qui lui a été donné par plufieurs Voyageurs
& Naturaliftes. Il dépofe fes oeufs comme les caymans,
dans des trous qu’il creufe dans le fable fur le bord de
quelque rivière ; le foleil les fait éclore ; ils font a fiez
gros & ovales , & les Indiens s’en nourriffient fans peine
(e) ; la chair du Tupinambis eft auffi très -fuccu-
lente pour ces même? Indiens, & plufieurs Européens
» (u n Tupinambis) mangeant des oeufs dans fa baffe-cour. >1 Hifloin
générale des Voyages, tome 3 4 , page 430, édit, in-2 2.
( f) Hijloire générale des Voyages 3 tome 54 , page 430, édit, in-1 Z.
D E S Ç)VA D S V P È D E S O V I P A R E S . 255
qui en avoient mangé tant en Amérique qu’en Afrique,
m’ont dit l’avoir trouvée délicate.
Cet animal produit des bézoards, ainfi que le crocodile
& d’autres lézards ; ces concrétions reffemblent aux
bézoards dés crocodiles, quant à leur forme extérieure;
elles font de la grofl'eur d’un oeuf de pigeon & d’une
couleur cendrée claire tachetée de noir. On leur a
attribué les mêmes vertus chimériques quaux autres
Bézoards , & particulièrement à ceux du crocodile
& de l’iguane ( f ) .
La difette que le Tupinambis éprouve fréquemment,
a dû altérer fes goûts, tant la faim & la mifère dénaturent
les habitudes. Il fe nourrit fouvent de corps in—
feéts & de fubfiances à demi-pourries; ôv, lorfque cet
aliment abjed lui manque , il le remplace par des
mouches & par des fourmis. Il va chaffer ces infeétes
au milieu des bois qu’il fréquente ainfi que les bords
des eaux : la conformation de fes pieds dont les doigts
font très-féparés les uns des autres , lui donne une
grande facilité de grimper fur les arbres où il cherche
des oeufs dans les nids, mais où il ne peut fouvent que
vivre miférablement en pourfuivant avec fatigue des
animaux bien plus agiles que lui. Le feul Quadrupède
ovipare qu’on a cru devoir appeller Sauve-garde,iouffre
(ƒ) Séba, yoL a, pâge 140,