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 grolTe que le relie du corps, comme s’il manquoit quelque  
 chofe  à  la  difformité :  une  grande  gueule  garnie  
 de mâchoires raboteufes, mais fans dents; des paupières  
 gonflées, & des yeux affez gros, faillans & qui révoltent  
 par la  colère qui paroît fouvent les animer. On efl: tout  
 étonné qu’un animal qui ne femble pétri que d’une vile  
 & froide boue,puiffe fentirl’ardeur de la colère, comme  
 fi la Nature  avoit permis ici aux extrêmes de-fe mêler,  
 afin de  réunir  dans un  feul  être  tout  ce  qui peut  re-^  
 pouffer  l’intérêt.  Il  s’irrite  avec  force pour peu  qu’on  
 le  touche;  il  fe  gonfle',  &  tâche  d’employer  ainfi  fa  
 vaine  puiflance:  il  réfifte  long - tems aux  poids  avec  
 lefquels on  cherche à  l’écrafer ; &  il  faut  que  toutes  
 fes  parties &  fes  vaiffeaux  foient  bien  peu  liés  entre  
 eux, puifqu’on  a vu  des  crapauds qui,  percés  d’outre  
 en outre avec un  pieu j ont  cependant  vécu plufieurs  
 jours ,  étant  fichés  contre  terre: 
 Tout  fe  relient  de  la  groflièreté  de  l’atmofphère  
 ordinairement  répandue  autour  du  crapaud, &  dé  la  
 dilproportion  de fes membres: non-feulement il ne peut  
 point marcher,  mais  il  ne-  faute  qu’à une  très-petite  
 hauteur ;  lorfqu’il  fe  fent  preffé,  il  lance  contre  ceux  
 qu’il pourfuit,  les  fucs  fétides dont il  efl: imbu ;  il  fait'  
 jaillir une liqueur limpide que l’on dit être fon urine, (c) 
 [c)  Voyez  l’ouvrage  déjà  cité  de  M..  LaurentL 
 jif s' s  Q v a d  r u  p é  d  e  s  o v i p a r e s .  5 7 3   
 qui ,  dans  certaines  circonflances, efl plus ou moins  
 rtuifible.  Il  tranfpire  ‘de  tout  fon  corps  une  humeur  
 laiteufe,  &  il  découle  de  fa  bouche  une  bave  qui  
 peuvent infeéler  les  herbes &  les  fruits  fur  lefquels il  
 paffe ,  de  manière  à  incommoder  ceux  qui  en mangent  
 fans  lés  laver.  Cette  bave  &  cette  humeur  
 laiteufe  peuvent  être  un  venin  plus ou moins  aélif,  
 eu  un  corrôfif plus  ou moins  fort,  fuivant  la  température, 
  la faifon, & la nourriture des crapauds,  l’efpèce  
 de  l’animal  fur  lequel  il  agit ,  &  la  nature  de  la  
 partie  qu’il  attaque.  La  trace  du  crapaud  peut  donc  
 être,  dans  certaines  circonflances ,  aufli  funefte  que  
 fon  afpeét  efl  dégoûtant.  Pourquoi  donc  laiffer  fub-  
 fifter  un  animal qui  fouille  &  la  terre  &  les  eaux,  
 &  même  le  regard ?  Mais  comment  anéantir  une  
 efpèce aufli féconde  &  répandue  dans  prefque  toutes  
 les  contrées? 
 Le  crapaud habité pour  l’ordinaire  dans  les  fofles,  
 fur-tout  dans  ceux  où  une  eau  fétide  croupit  depuis  
 long-tems ;  on  le  trouve  dans  les  fumiers,  dans  les  
 caves,  dans  les  antres  profonds,  dans  les  forêts  où  il  
 peut  fe  dérober  aifément à  la  clarté qui  le  bleffe,  en  
 ehoififfant  de  préférence  les  endroits ombragés,  fom-  
 bres,  folitaires-,  en  s’enfonçant  fous  les  décombres,  
 &  fous  les  tas  de pierres :  &  combien de  fois  n’a-t-on-  
 pas  été faifi  d’une  efpèce  d’horreur,  lorfque  foulevant  
 Quelque  gros  caillou  dans  des  bois  humides,  on  *