découvert un crapaud accroupi contre terre, animant
fes gros yeux, &■ gonflant fa mafle puftuleufe ?
C’eft dans ces diver-s afiles obfcurs qu’il fe tient
renfermé pendant tout le jour, à moins que la pluie
ne l’oblige à en fortîr.
Il y a des pays où les crapauds font fi fort répandus,
comme auprès de Carthagène, & de Porto-bello en
Amérique f que non - feulement lorfqu’il pleut ils y
couvrent les terres humides &. marecageules , mais
encore les rues, les jardins & les cours , & que
les habitans de ces provinces de Carthagène & de
Porto - bello ont cru que chaque goutte de pluie
étoit changée en crapaud, Ces animaux préfentent
même dans ces contrées du nouveau monde , un volume
confidérable ; les moins grands ont lix pouces de
longueur. Si c’efl: pendant la nuit que la pluie tombe,
}ls abandonnent prefque tous leur retraite, & alors ils
paroiiïent fe toucher fur la furface de la terre, qu on
dirait qu’ils ont entièrement envahie. On ne peut
fortir fans les fouler aux pieds, & on prétend même
qu’ils y font des morfures d’autant plus dangereufes,
qu’indépendamment de leur grofleur, ils font, ’ dit-on,
très - venimeux ( d ) . Il fe pourroit en effet que
l’ardeur de ces contrées , &. la nourriture quils
(d) Voyage de Don Antoine déVlloa, Hijloirc générale des Voyages ;
y cl. 5 3 j page yÿg , édit, ip-1% ■
y prennent, viciât encore davantage la nature de leurs
humeurs.
Pendant l’hiver , les crapauds fe réunifient plufieurs
enfemble, dans les pays où la température devenant
trop froide pour eux, les force à s’engourdir; ils fe
ramaflent dans le même trou, apparemment pour augmenter
& prolonger le peu de chaleur qui leur relie
encore. C’eft dans ce tems qu’on pourroit plus facilement
les trouver, qu’ils ne pourroient fuir, & qu’il faudrait
chercher à diminuer leur nombre.
Lorfque les crapauds font réveillés de leur long
aflbupiffement , ils çhoififlent la nuit pour errer &
chercher leur nourriture; ils vivent, comme les grenouilles
, d’infeétes, de vers, de fcarabées, de limaçons ;
mais on dit qu’ils mangent aufli de la fauge, dont ils
aiment l’ombre , & qu’ils font fur-tout avides de ciguë,
que l’on a quelquefois appellée le perfd du crapaud (e).
Lorfque les premiers jours chauds du printems font
arrivés, on les entend, vers le coucher du foleil, jeter
un cri aflez doux : apparemment c’efl: leur cri d’amour
; & faut - il que des êtres aufli hideux , en
éprouvent l’influence, & qu’ils paroiflent même le
reflèntir plutôt que les auttes Quadrupèdes ovipares
fans queue ? Mais ne ceflons jamais d’etre Hiftorien
fidèle ; ne négligeons rien de ce qui peut diminuer
(e) Matière médicale , cont. de Geoffroy , tome 1% ,page 148.