
élevé que parcourt la route f nous franchîmes quelques
escarpements où le passage pourrait être facilement
intercepté : une poignée d’hommes suffirait à
sa défense ; mais, de même que le défilé de Serdari,
cette passe peut être tournée. En sortant de ce mauvais
passage, nous débouchâmes sur un beau plateau,
au milieu duquel se trouve Lasguird, entouré de
beaux jardins, à la base des dernières pentes des
monts Khali-Bar. A partir de cet endroit jusqu’à Hé-
rat, on voit aux environs des lieux habités, une foule
de petites tours dispersées dans la campagne, dont le
faîte est crénelé, et qui n’ont dans le bas qu’une seule
petite ouverture, par laquelle un homme ne peut
passer qu’en rampant sur ses genoux. Chacune d’elles
peut contenir de huit à dix personnes; elles servent de
refuge aux habitants des campagnes, lorsqu’ils sont
surpris au milieu de leurs travaux par une invasion
de Turkomans. Ces pillards sont toujours à cheval,
généralement armés de lances, et presque totalement
dépourvus d’armes à feu. Les cultivateurs, qui ne sortent
jamais de leurs villages qu’armés de fusils, les
tiennent facilement à distance, dès qu’ils sont enfermés
dans leurs tours, d’où ils les menaçent de faire
feu. D’autres tours, plus considérables et plus élevées
que celles dont je viens de parler, mais aussi beaucoup
moins nombreuses, s’élèvent sur les éminences qui
dominent et permettent de découvrir au loin le pays
et les voies de communication. Des vedettes restent
là continuellement en observation pour signaler les
bandes de Turkomans, et donner l’alarme à temps
quand elles arrivent, ce qu’elles font, le jour, en
détachant un d’entre eux qui se rend au galop dans
les villages, et la nuit, en allumant un grand feu au
haut de la tour. Cette crainte, inspirée par les Turkomans
dans celte contrée, a sans doute beaucoup contribué
à la manière dont Lasguird et quelques villages
voisins ont été construits. Ils représentent assez
bien la forme d’un cirque, sur les murs d’enceinte
duquel on aurait élevé deux étages de chambres :
les fenêtres et les balcons surplombent au dessus de
la base, et ont vue sur l’intérieur et l’extérieur de la
construction. L’escarpement circulaire et à pic qui
forme la base des maisons est fait de boue mêlée de
paille hachée. Le tassement qui s’est opéré avec le
temps a rendu cette matière extrêmement compacte,
et l’espace qu’oocupent les murailles, en hauteur,
depuis le niveau du sol jusqu’au premier étage des
chambres, n’a pas moins de treize mètres. Il y a une
seule porte d’entrée pour cette espèce de forteresse,
à laquelle on arrive en montant une rampe roide et
sinueuse, dont la largeur a été strictement calculée de
manière à pouvoir livrer passage à une seule bête de
somme. La cour intérieure de cette bizarre construction
sert de campement aux bestiaux. Au-dessous de
chaque logis on a pratiqué un trou employé comme
dégorgeoir aux fosses d’aisances, de sorte que le pourtour
de la muraille est tapissé d’excréments qui, tombant
ensuite dans une espèce de fossé, forment une
mare puante, bien faite pour opposer un obstacle
infranchissable aux Turkomans les plus courageux.
Vis-à-vis et à deux cents pas de Lasguird il y a, sur la
droite de la route, une vaste muraille d’enceinte, de