
bénéfices. On ne peut pas dire qu’elles soient belles,
mais elles sont bien proportionnées et jouissent d'une
liberté d’action rare chez les femmes asiatiques.
Leurs maris ne paraissent pas jaloux, et les Afghans
prétendent que ces femmes profitent largement de
l’abandon où on les laisse.
Mourghâb.—27 juin.—4 farsangs de distance dans
une vallée très-fertile qui conduit à la rivière Mourghâb,
sur les bords de laquelle s’élève un village de deux
cent cinquante maisons, fermé d’une enceinte en
terre, autour de laquelle campent, sous latente, mille
familles de Hézarèhs nomades. Les cultures de cette
localité s’étendent au loin à plus de 5 farsangs ,
et tout le sol qui n’est pas cultivé jusqu’à 10 farsangs
au delà est couvert de belles prairies. Le
gouverneur de Mourghâb est Abdul-Aziz-Khan, frère
du Serdar Kérim-Dad-Khan. On m’avait beaucoup
vanté la bravoure de ce personnage, mais si elle
est aussi grande que son verbiage et que ses van-
teries, il n’y a effectivement rien qui puisse lui être
comparé. Son extérieur ne prévient pas en sa faveur,
et cependant il nous donna l’hospitalité d’une manière
excessivement large et désintéressée. Ses subordonnés
se louent beaucoup de lui, car quelque gros propriétaire
qu’il soit, ses revenus suffisent à sa dépense,
et la taxe qu’il leur impose n’est qu’une bagatelle.
Malgré la recommandation contraire que jelui en avais
faite, Feïz-Méhémed-Khan révéla ma qualité d’Européen
à Abdul-Aziz-Khan: je n’eus pas à me plaindre
de cette indiscrétion, dont j’avais redouté les suites;
elle contribua, au contraire, à me tirer d’une bien
mauvaise situation, comme on le verra plus tard. Lorsque
je fus obligé de retourner sur mes pas, pour revenir
à Hérat, je ne pus le faire qu’avec l’aide de deux
Hézarèhs qu’Abdul-Aziz-Khan me confia pour les
conduire à Kaboul, où leur présence était nécessaire
afin de terminer une affaire de succession. Cette adjonction
m’arrangea d’autant mieux qu’au delà de Meï-
mana, j ’allais me trouver seul, dans un pays dangereux,
tandis que dans leur compagnie je pouvais
voyager avec plus de sécurité.
Le Mourghâb est une petite rivière assez large
et très-poissonneuse, dans les eaux de laquelle on
pêche d’excellents barbeaux : c’est l’Epardus ou Mar-
gus des Grecs. Il arrose un pays plat et marécageux
dont les émanations engendrent des fièvres pernicieuses
; mais la contrée est tellement fertile que les
nomades se portent en foule sur les bords du Mourghâb,
malgré la mortalité qui y règne. Ce sont surtout
les Hézarèhs qui peuplent les rives de cette rivière, qui
est à peu près la limite de leur territoire. Ils sont là
mêlés à plusieursautres petites tribus d’Eïmaks de peu
d’importance qui, pour être protégées, s’allient avec
eux et prennent la dénomination de Hézarèhs. L’une
d’elles cependant, qui se compose de villageois et de
nomades, au nombre de douze à quinze mille familles,
n’aurait pas besoin de cette protection et pourrait se
dispenser d’échanger son véritable nom contre celui
de ses voisins, mais les nombreuses alliances que cette
tribu a contractées avec les Hézarèhs l’ont déterminé
à se considérer comme étant avec ceux-ci une seule et
même famille. Cette tribu est celle des Firouz-Kouhis,
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