meaux, deux heures avant d'arriver à Sebz-Var. A partir
de ce moment, on voit d’immenses ruines qui s’é tendent
entre la route et le pied des montagnes ; elles
proviennent de constructions arabes, et l’on remarque
surtout des tombeaux faits avec un ciment très-
dur qui paraît être un mélange de gravier, de sable et
de chaux ayant parfaitement résisté aux effets destructeurs
du temps. Un minaret, semblable à ceux de
Damghân et isolé de toute construction, domine toutes
ces ruines, dont l’étendue est très-considérable puisqu’elles
s’étendent jusqu’à Sebz-Yar; elles proviennent
d’une grande ville qui, au dire des Persans, s’appelait
Khosrou-Guird. Il y a encore sur la gauche, et
à une demi-farsang de la route, un grand village qui
porte ce nom.
La petite ville moderne de Sebz-Varest très-animée,
et l’on reconnaît bien vite, en y entrant, à la bonne
tenue des bazars, à l’air de contentement qui règne
sur la figure des habitants, une administration paternelle
et bien différente de celle qui régit les provinces
de la Perse autres que le Khorassan. Cette ville
est le chef-lieu d’un riche district; sa banlieue, est
couverte de beaux villages, et, ce qui est rare en Perse,
de cultures dont l’oeil ne découvre pas la fin : c’était la
première fois que j’y voyais pareille chose. N’est-ce
pas là l’indice le plus sûr de la bonne administration
de son gouverneur général, Assaf-Dooulet? La ville est
petite, mais bien remplie; elle possède environ 1,200
maisons, des caravansérails, des mosquées, des bains
et de jolis bazars voûtés qui traversent la ville d’un
bout à l’autre. Sa citadelle est construite au nord,
sur une éminence de terres rapportées; elle est ceinte
d’une épaisse et haute muraille en terre et n’a pour la
défendre qu’une pièce de 4 de fabrique russe. La ville
elle-même ,est protégée par une muraille en terre et
un fossé sec , lequel cependant peut être inondé au
moyen des eaux qui descendent des montagnes voisines.
On se ressent moins qu’ailleurs, dans cette
localité, des pillages des Turkomans, parce qu’ils sont
obligés de faire un détour dangereux pour arriver jusque
là. Sebz-Var fut le théâtre de sanglants combats
pendant l’invasion afghane de 1721. Les troupes de
Mir-Mahmoud Ghaldjéhi la disputèrent longtemps à
celles de Mir-Malimoud Sistani. Elle finit par rester à
ce dernier, mais il en fut bientôt après dépossédé par
le fameux Nader, qui la releva quelque peu des ruines
que tant de guerres y avaient entassées les unes sur les
autres ; pourtant ce n’est que depuis dix ans qu’elle a
recouvré son ancienne prospérité. Hussein-Khan, l’un
des fils d’Assaf-Dooulet, et par conséquent cousin germain
du Châh, dont il a épousé une soeur, est gouverneur
du district de Sebz-Var.
Le pèlerin que j’avais pris à mon service à Héïvane-
Kièf, tout en étant assez bon diable au fond, était cependant
obligé, pour ne pas s’attirer les reproches de ses
compatriotes, de garder vis-à-vis de moi une espèce
de retenue fanatique qui me causait encore une foule
de désagréments. J’avais hâte d’en finir une bonne
fois en prenant un domestique en dehors de la catégorie
des pèlerins. Je crus avoir trouvé mon affaire en
louant un individu se donnant le nom de Sàdeuk, que
je rencontrai à Sebz-Var, et qu’il me sembla recon