
naître comme ayant été antérieurement au service
de la mission anglaise à Téhéran. Je me trompais
cependant, car je sus depuis que le gaillard était un
louli{c est ainsi qu’on appelle en Perse les mauvais sujets,
voleurs, assassins, etc.), nommé ïsmaël, ayant fui
la capitale, où je l’avais vu, afin de se soustraire à une
punition que divers méfaits lui avaient méritée. Naturellement,
le drôle me voyant favorablement disposé
en sa faveur se garda bien de me détromper, et
je le pris à mes gages. Cette facilité me coûta une
partie de mes ressources, ainsi qu’on le verra plus
loin, et aurait pu me devenir plus funeste encore. C’est
un exemple dont feront bien de profiter ceux qui se
proposeraient de voyager en Perse : ils ne sauraient
etre trop attentifs dans le choix qu’ils feront de leurs
domestiques, et je les engage à ne prendre ces gens-là
à leur service qu’autant qu’ils auront pour répondants
des personnes établies, lesquelles s’engageraient, par
un écrit, à assumer la responsabilité de tous les actes
de ceux qu’ils cautionnent.
Zafférani. 21 ma i.— 6 farsangs, huit heures de
marche par une route plate et facile, tour à tour argileuse
et sablonneuse. On circule entre plusieurs
villages, de belles cultures bien arrosées, et de nombreuses
ruinesjusqu’à mi-chemin de Zafférani, le reste
est désert. Ce gîte est un petit village fermé d’une enceinte
en terre, contenant U maisons habitées. Un
caravansérail-châh ruiné est placé vis-à-vis; c ’est un
dès plus vastes qui soient en Perse. S’il faut en croire
la chronique du pays, ibavait 1,700 chambres, renfermait
un bain, une mosquée et de vastes jardins. Je crois
cependant la chronique tant soit peu mensongère,
toutefois, la quantité de ruines qui entourent cet édifice
dénote clairement qu’il devait occuper un grand
emplacement. Les Persans aiment trop le merveilleux
pour qu’on puisse les croire en tout sur parole, et il leur
serait facile de s’apercevoir, aux caractères kufiques
et aux arabesques qui décorent ce caravansérail, qu’il
est d’origine arabe; mais ils préfèrent lui en assigner
une autre, et voici ce qu’ils disent : un Persan ayant
trouvé un immense trésor sur l’emplacement où existe
aujourd’hui ce monument, fit le voeu de l’employer en
bonnes oeuvres^ et la première fut la construction du
caravansérail. Les fondements venaient d’en être jetés,
lorsque passa par là un marchand qui, ayant chargé
en Khorassan 3 kharvars (900 kilog.) de safran, s’était
rendu à Bagdad dans l ’espoir de vendre avantageusement
sa marchandise : le commerce allant mal, il
ne vit que de la perte en perspective quand il arriva
dans la ville des kalifes, et préféra revenir dans son
pays avec ses charges, pour attendre des temps meilleurs.
Arrivé à Zafférani, le nouvel enrichi lui demanda
pourquoi il avait l’air si chagrin. Aussitôt qu’il en
connut la cause, il fit décharger le safran par les maçons
et leur ordonna de le mêler à la chaux qui servait
à la construction du caravansérail : lorsque ceci
fut fait, il remit au marchand étonné 3 kharvars
de pierreries en payement de ses 3 kharvars de
safran. Quelque absurde qu’elle soit, cette histoire
trouve créance auprès des Persans, même les plus
instruits, et la révoquer en doute, ce serait s exposer a
se faire une affaire avec le peuple. Bien que les bri