
leur manqueront pas. Lé cultivateur, le boutiquier,
tous répondront à son appel, et arriveront montés
et armés à leurs frais pour aller combattre l'ennemi.
Dans ce cas l’avidité n’est plus que le mobile
secondaire de leur prise d’armes, car il s’agit
alors de défendre tout ce qu’ils possèdent contre
leurs voisins; ils ont aussi en perspective, il est vrai,
la victoire et le pillage de ceux qui voulaient les dépouiller,
etc’estlà un stimulant qui, à défaut d’autre,
est assez puissant dans cette contrée pour pousser un
homme à exposer sa vie. La ville d’Akhtchè est
gouvernée par Ichàne-Ourak, vassal de l’Émir de
Bokhara, et frère du gouverneur de Balkh. Le titre
d’ichàne est particulier aux Uzbeks, qui l’emploient
comme le mot Séyid, lequel signifie également descendant
du Prophète. Je n’entrai point dans Akhtchè;
après avoir déjeuné à l’écart, à l’ombre d’un arbre,
nous continuâmes notre route pour aller couchera
Meïlik.
. Meïlik. — 3 juillet. — h farsangs de marche à partir
d’Akhtchè : la route traverse une plaine marécageuse,
couverte de roseaux et d’une grande quantité d’arbres,
parmi lesquels dominent d’énormes tamarins. Ce village
renferme une population uzbeke de deux mille
cinq cents âmes environ et dépend du gouvernement de
Balkh.Le choléra-morbus, dont j’avais vu les premières
traces à Meïmana, et qui sévissait avec assez de force
à Chibbergân et Akhtchè, était à son maximum d’intensité
au moment où j’arrivai à Meïlik. Les habitants
décimés par ce fléau étaient tellement attérrés qu’ils ne
firent pas la moindre attention à moi, ce dont je fus
charmé, car il y a dans cette localité un grand nombre
de gens qui sont rétribués par les princes et chefs
de l’Afghanistan et du Turkestan, pour les tenir au
courant de tout ce qui se passe dans le pays. Meïlik
est un point central convenant parfaitement à un
observateur qui désire savoir les nouvelles du Turkestan.
Cette ville est en outre le ppint où se relient
plusieurs routes, aussi les voyageurs y affluent-ils de
toutes parts. Les ruines que l’on traverse, une heure
avant d’arriver à Meïlik, indiqueraient que cette ville
n’a fait que remplacer une ancienne cité de la Bac-
triane. Elles consistent en amas de briques cuites,
d’une origine évidemment très-ancienne; mais il
serait difficile de préciser à quel genre de construre
tions elles ont servi.
Balkh. — 4 juillet. — Parcours de 7 farsangs dans
une plaine fermée à gauche par une chaîne d’assez
hautes montagnes, d’où descendent de nombreux torrents,
coupant la route à chaque pas et formant, par intervalles,
des mares de boue du milieu desquelles nos
chevaux eurent toutes les peines du monde à se tirer.
Quand nous arrivâmes à 2 farsangs de Balkh,
mes Hézarèhs quittèrent la grande route et se dirigèrent
obliquement à gauche, à travers champs, en
m’invitant à les suivre. Ne comprenant pas dans
quelle intention ils agissaient de la sorte, je leur en
demandai l’explication. «Si vous voulez aller à Bok-
« hara, me dirent-ils, vous n’avez qu’à continuer de
« marcher droit devant vous. — Ceci me paraît singul
i e r , leur répondis-je, car Bokhara est à quinze jour-
« nées de distance d’ici et nous lui tournons le dos.