
des pièges que l’on me tendit, et des tentatives qui
furent faites, je ne me départis point de la vérité que
j’avais dite tout d’abord; je ne cessai de leur assurer
que je me proposais de passer dans l’Inde pour chercher
à m’y faire une position personnelle ; j’eus beau
le répéter, on ne me crut point, et, jusqu’au dernier
moment, les Afghans restèrent persuadés que j ’étais
chargé d’une mission politique.
Le Sertip La’l-Méhémed-Khan, suivi de tout un état-
major de mines rébarbatives, vint me faire sa première
visite quelques heures après mon arrivée.
C’était un homme de quarante à quarante-cinq ans,
au type tartare très-prononcé, mais ayant malgré
cela une physionomie douce et bienveillante. Cette
première entrevue se passa en compliments de part et
d’autre, puis il se retira pour aller porter mes salutations
au Yézir-Saheb et vaquer ensuite aux occupations
de ses nombreuses charges. Cependant, avant
de me quitter, il laissa près de moi son mirza (écrivain)
et son frère le sultan (capitaine) Méhémed, pour
empêcher, disait-il, que je ne prisse de l’ennui; mais
son véritable but, en me faisant jouir de leur société,
était de faire épier mes actions et mes paroles. Ils ne
me laissèrent jamais seul une minute et m’accompagnèrent
dans toutes mes sorties. A la visite du Sertip
succéda celle de plusieurs seigneurs; puis arrivèrent-
les Ekim-Bachis (médecins), qui tiennent un rang
élevé dans la hiérarchie sociale, à Hérat*. Parmi eux
* L’influence qu’a eue naturellement le Ekim-Saheb dans
l'ambassade anglaise de Téhéran, et l’emploi de messieurs
Jukes, Campbell, Mac Neil, Riach, Bell, Lord e t autres médecins
étaient Mirza-Asker, Mirza-Méhémed-Hussein, Goulam-
Kader-Khan et YAthar-Bachi (chef des apothicaires),
Agha-Hussein, l’ancien confident de Châh-Kamràne.
Comme à leurs yeux tout Européen est un médecin, la
conversation ne cessa de rouler sur l’art qu’ils professaient,
et il me fallut entendre bien des sottises. Ils
voulaient tous individuellement me donner une haute
opinion de leur savoir, et faisaient dans ce but des
frais très-fatigants d’érudition afghane : ils avaient
apporté avec eux une partie de leurs pharmacies, afin
que je leur indiquasse l’emploi qu’il fallait faire de diverses
préparations chimiques qu’on leur avait envoyées
de l’Inde anglaise, et dont ils ne connaissaient
pas les effets. Ces médecins s’étaient contenté jusque
là de les administrer à leurs malades à des doses
progressives, jusqu’à ce qu’ils eûssent à peu près
reconnu les cas où ils pouvaient en faire 1 application.
Combien de malades avaient-ils tués avec un
pareil système? Je n’osais vraiment pas le leur demander
; mais Mirza-Asker combla la lacune, en me
montrant un flacon de cyanure de mercure, et en
me demandant quel diable de sel cela pouvait etre :
« Il n’a fait de bien à personne, me dit-il, car sur cent
malades à peu près auxquels j’en ai donné, il n y en a
qu’un seul qu’il ait guéri, tous les autres sont morts. »
Après la médecine, l’alchimie eut son tour, car un
dans différentes charges, a naturellement in d u itle sch e fsd e la ville
de Hérat à croire que les médecins occupaient dans les conseils
des Anglais une place plus importante que celle qui leu r est réellement
assignée, e t les Asiatiques a ttrib u en t la prospérité des
Anglais à l’influence qu’ils leu r supposent. L.