
grecs. 11 était effectivement impossible qu’une Ville
aussi importante que l’est Héri par sa situation et la fertilité
de son sol ne fût pas utilisée par le conquérant macédonien,
qui dut en faire son entrepôt principal d’approvisionnements
de toute sorte, avant de s’avancer
dans l’Inde. Ce qui est moins vraisemblable, par exemple,
c’est la conviction des Hératiens de notre siècle,
qui assurent que leur ville n’a subi aucune transformation
depuis Alexandre le Grand. Ils prétendent même
que les fortifications qui la protègent aujourd’hui sont
les mêmes qui furent élevées par ce héros : leur propre
histoire est cependant là pour leur prouver complètement
le contraire. En la consultant l’on peut citer,
seulement pendant les derniers siècles qui viennent de
s’écouler, sept exemples au moins d’une destruction
presque complète de Hérat, tout au moins de bouleversements
qui nécessitèrent son entière réédiûcation.
La première catastrophe de ce genre que Hérat eut à
subir remonte au xne siècle. Sous le règne du Sultan
Sandjiar, vers l’an 1152 (547 de l’hég.), elle tomba
au pouvoir des Turkomans, qui y commirent d’affreux
ravages et n’y laissèrent pas pierre sur pierre.
La seconde destruction que Hérat eut à subir ne fut
pas moins déplorable ; on pourra en juger par le récit
suivant : « Cette v ille , dit d’Herbelot, était la plus
« considérable des trois capitales du Khorassan (les
« autres étaient Merv et Nichapour) qui furent as-
« siégées par Touli-Khan1; elle était défendue par
1 Touli signifie Miroir en langue mongole. Touli-Khan fut
ainsi nommé à cause de son extrême ressemblance avec sdn père
Djeiighiz-Khan.—Ed.
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« Mohammed-Gourgani, gouverneur de la province,
« qui avait une armée très-considérable pour la dé-
« fendre. En effet, pendant les sept premiers jours
« d u siège, ce gouverneur fit de si fréquentes et de
« si vigoureuses sorties, que les Moghols virent bien
« qu’ils ne viendraient pas aussi facilement à bout
« decetté entreprise que des précédentes; mais il
« arriva que ce seigneur, qui était également très-
« sage et très-vaillant, fut malheureusement tué d’un
« coup de flèche dans le combat.
« Après la mort du gouverneur, les assiégés com-
« mencèrent à perdre courage, et l’on parlait déjà de
« se rendre, lorsque Touli-Khan, qui avait été averti
« par ses espions, s’avança avec deux cents chevaux
« seulement vers une des portes de la ville pour atti-
« rer à une conférence ceux des bourgeois qui étaient
« le plus disposés à la paix. Il leur déclara que s’ils se
« rendaient volontairement à lui, qui était en état dé
« les y forcer, ils ne recevraient aucun dommage ni
« dans leurs personnes ni dans leurs biens, et qu’il se
« contenterait de recevoir d’eux la moitié seulement
« du tribut qu’ils payaient au Sultan du Khouarisme.
« Après que Touli-Khan eut donné sa parole, et
« confirmé par un serment solennel les conditions de
« la capitulation qu’il accordait aux bourgeois de Hé-
« rat, ceux-ci lui ouvrirent aussitôt leurs portes et lui
« firent une réception magnifique. Touli-Khan ob-
« serva exactement le traité qu’il avait fait avec eux,
« et ne souffrit pas que les Moghols leur fissent le
« moindre outrage. Il se contenta seulement de faire
« exécuter les soldats de la garnison avec lesquels il