
direction, le territoire soumis à son autorité commence
à Mazar et finit à Akhtchè. Cette dernière ville, bien
que reconnaissantlasuzeraineté de l'Émir de Bokhara,
n’en obéit pas moins au gouverneur de Balkh, qui, à
son tour se reconnaît vassal de l’Émir de Khoulm :
c’est là un singulier amalgame politique, mais il est
conforme à l’esprit qui règne parmi les chefs de cette
contfée ; agir avec ruse, fomenter des agitations, se
tromper les uns les autres, telle est leur occupation
continuelle et le bonheur de leur vie.
Balkh se trouve à 2 farsangs des hautes montagnes
qui s’élèvent au sud : elle est bàlio dans une
belle plaine se dirigeant quelque peu vers le nord,
jusqu’à l’Oxus qui la borne de ce côté. Cette position
est très-heureuse et favorise singulièrement le commerce
et l’agriculture; mais si sous ces rapports la situation
est avantageuse, elle est devenue politiquement
très-fatale à ce Khanat, parce qu’elle le rend un
motif de guerre continuelle entrel’Émir de Bokhara et
celui de Khoulm. Il ne se passe presque pas d’année,
depuis dix ans, sans que les armées de ces deux chefs
ne viennent s’en disputer la suzeraineté. Ichàne-Sud-
dour, gouverneur de Balkh, reconnaissait celle de
Mir-Wali de Khoulm en 1845 '. Il entretient deux mille
cinq cents cavaliers et mille fantassins; sa cavalerie
est une des mieux montées du Turkestan, les
chevaux de Balkh étant du reste une des meilleures
espèces de la race turkomane.
A huit heures du soir, nous trouvant suffisami
Balkh e st tombée au pouvoir de l'Émir de Kaboul en 1850.
ment reposés, nousYemotilâmes à cheval pour continuer
notre voyage : nous sortîmes des ruines sans
rencontrer âme qui vive sur notre passage. Je ne
puis exprimer la joie que j’éprouvai eu me voyant
hors de cette Bokharic, où venaient d’être si impitoyablement
égorgés Conolly, Stoddart et Nas-
seli. J’avais franchi les districts méridionaux de ce
pays avec de vives appréhensions, mais par bonheur
sans accident. Je le devais en partie à l’existence
du choléra, dont les habitants se préoccupaient trop
pour faire attention à moi. A vrai dire, la transformation
de mon costume, de mon physique et de
mes manières, éloignait tous les soupçons; pourtant
il m’eût été sinon impossible, du moins très-difficile
de traverser cette contrée sans être reconnu, si je
n’avais eu avec moi les deux Hézarèhs d’Abdul-Aziz-
Khan. 11 y .avait chez ces deux hommes un fond
de loyauté que j’ai rarement trouvé chez des Asiatiques,
et qui les portait à s’exposer à toutes sortes
de désagréments pour m’éviter les dangers dont j’é tais
menacé. Les Européens sont en effet traqués
comme des bêtes fauves dans la Bokharie, et si par
malheur j’avais été découvert et conduit à la capitale,
j’aurais certainement été assassiné par l’Émir
de cette ville, qui, au moment où je passai dans ses
États, soutenait contre ses voisins une double guerre,
qu’il n’aurait pas manqué d’attribuer à mes intrigues,
prétexte dont il s’était servi contre Conolly. Le Khan
de Cher-Sebz, Kodjah-Murad, et celui de Kokari,
musulman Tchelak Kirghiz, s’étaient entendus pour
agir simultanément dans leur prise d’armes : on