
mignon du Wali, et le lui avait enlevé en retournant
à Kaboul. Ce jeune adolescent avait trouvé
le moyen de s’échapper et de revenir à Khoulm
où Mir-Wali le faisait garder à vue, et le refusait à
Akbar qui le réclamait à grands cris. Ses refus
avaient amené la guerre qui existait. Les deux armées
avaient déjà eu plusieurs engagements avec des succès
variés. Celle de Kaboul, sous les ordres du Serdar
Akrem-Kban, frère d’Akbar, tenait le pays accidenté
situé en avant de Bamian, et celle de Khoulm
occupait en deçà de Sighàne, dans de fortes positions,
des défilés difficiles à enlever. Cette nouvelle me
contraria au dernier point, et en rentrant à noire
campement nous tînmes conseil sur ce qu’il y avait
de mieux à faire dans cette occurrence. La guerre avait
été si soudaine, si inattendue, que nous n’en avions
entendu parler pour la première fois qu’à Meïlik, encore
nous avait-on assuré en même temps que la paix
était conclue et que les troupes ne s’étaient pas déplacées
: notre déplaisir fut grand en apprenant le contraire.
J’eus un moment l’idée de gagner Kachmir en
traversant le Kaffiristan, habité par les Siàh-Pouchts,
mais les Hézarèhs ne m’y auraient pas accompagné ;
du reste, ils ne connaissaient pas la route, et le but de
leur voyage était Kaboul. Il fallait forcément quitter
l’incognito à Khoulm si je persévérais dans ce projet,
et il restait à savoir si quelqu’un s’y serait trouvé pour
me conduire à travers ce pays à peu près inconnu.
Dans cette extrémité, notre avis à chacun fut qu’il
fallait continuer d’avancer jusqu’à ce que nous vissions
l'impossibilité d’aller plus loin. Une fois ceci
arrêté, nous nous remîmes en route à travers un pays
désolé par l’armée et décimé par le choléra; mais nous
résolûmes de ne voyager que pendant la nuit close,
afin d’éviter les rencontres et les questions, auxquelles
on est tenu de répondre dans ces contrées,
sous peine de passer pour un malfaiteur et d’exciter
les soupçons. Et puis, à la faveur de l’obscurité,
je pouvais voyager sans être reconnu et mes Hézarèhs
avaient une version toute prête pour les curieux:
nous étions les gens d’un Khan uzbek que nous allions
rejoindre au camp de Sighàne.
Heïbak *. — 6 juillet.—Distance de 10 farsangs; on
marche d’abord pendant trois quarts d’heure dans
une plaine qui s’élève en pente douce et se termine
brusquement à une chaîne de hautes montagnes se
dressant presque à pic à une très-grande hauteur.
Nous nous y engageâmes à travers une passe étroite,
à l’issue de laquelle la vallée s’élargit un peu. On
rencontre un ou deux villages et des jardins de distance
en distance. Autant qu’on pouvait en juger
au milieu de l’obscurité, cette gorge nous parut
bien arrosée et assez fertile. Partis au coucher
du soleil, nous n’arrivâmes au gîte que vers
midi, le lendemain, nous étant arrêtés à moitié
chemin pour faire un somme de deux heures, et
i Heïbak e s tle point le plus reculé où p én é trè ren t les troupes
anglaises pendant la g u erre des Afghans. Un détachement du
corps commandé par le capitaine Hopkins, venu de Bamian, se
maintint à Sighàne e t àHeïbak pendant plusieurs mois, en mena-
çanldc la sorte Khoulm, où Dost-Mohammed-Khan avait d ’abord
établi son q u a rtie r général après son retour de Bokhara,— Ed,