
soir même, au grand désespoir d'Ivan qui parut désolé
de recevoir des ordres réitérés, auxquels il n’osait
désobéir.
. Il y a environ 250 à 260 maisons à Cher-I-Bâne et
chacune d’elles est couronnée par quatre ou cinq nids
de-cigogne. Je n’ai jamais vu nulle part autant d’oiseaux
de cette espèce que dans cette localité.
Koz-Rabat. — 4 avril. — 4 farsangs, six heures de
route. On marche d’abord une heure et demie dans
une plaine à pente très-sensible ; puis l’on traverse
une montagne, sable et gravier, dont le versant
occidental est semé d’énormes blocs de rochers roulés.
Il faut une heure et demie pour la franchir; après
quoi l’on débouche dans une plaine , assez bien
arrosée, où se trouvent çà et là d’assez beaux pâturages.
En arrivant à Koz-Rabat, mon ami le Mollah Ali
faillit se rompre le col en faisant une chute. Lui et son
mulet roulèrent l’un sur l’autre et allèrent tomber
dans une mare puante où barbotaient des canards
qui s’enfuierent en criant. Le Mollah prit cet accident
pour un avertissement du ciel : il ne voulut pas traverser
le village et s’obstina à le contourner pour
arriver au campement. Je me rendis à son désir, ce
qui me mit à même de voir le mur d’enceinte de
Koz-Rabat, construit en épaisses couches de terre
superposées et durcifiées. Cette muraille paraît être
fort ancienne et doit avoir été celle d’une v ille , car
son développement est considérable. Du côté de l’Orient
, on remarque une porte d’entrée construite en
briques cuites, semblables à celles de Babylone. Ce
village existait certainement avant que l’Islamisme
se répandît dans cette contrée. Koz-Rabat compte environ
450 maisons.
Khanè-Kine, que les habitants du pays prononcent
Khanaki. — 5 avril. — 4 farsangs, six heures de
route, plaine parsemée de quelques collines peu
élevées.
Une caravane de pèlerins musulmans est une triste
société pour un voyageur chrétien qui rencontre toujours
en eux les musulmans les plus fanatiques. Ces
chiens, comme les qualifiait leur compatriote, le Mollah
Ali, tout en étant couverts de vermine et sentant
le rance de manière à suffoquer, s’effacaient pour me
laisser passer, évitant de se trouver sous le vent, afin
de ne point subir mon contact en aucune façon. En
ma qualité de chrétien, j’étais impur pour eux. J’avais
beau payer grassement, je ne pouvais obtenir le plus
léger service d’une foule de gueux, presque nus, qui
suivaient à pied la caravane, et c’était ceux-là même
qui m’adressaient le plus de propos offensants. lim e
fallait souffrir ces insultes sans mot dire, afin de ne pas
me compromettre. Ces pèlerins sont assourdissants
avec les exclamations religieuses et emphatiques qu’ils
ne cessent de répéter sans raison aucune, si ce n’est
pour faire croire à des sentiments pieux, dont il est
très- permis de douter, ils font régulièrement les
cinq prières prescrites par le Koran, et toutes les fois
que l’heure de les réciter est arrivée, la caravane s’arrête
jusqu’à ce qu’elles soient finies. J’étais le seul qui
ne la fît pas avec les autres : mon coquin d’Ivan, quoique
chrétien, s’accommodait avec tous ces gens là : il