aussi oreillards, mais ce n’est point un défaut dans
cette contrée. Les innombrables troupeaux de chèvres,
de moutons, de buffles et de chameaux appartenant
aux Zeïdnats leur procurent une source
inépuisable de richesse. Ces animaux s’élèvent dans
les gras pâturages de Kalèh-Noouh, les plus admirables
de l’Asie.
Le joug imposé au Serdar Kérim-Dad-Khan par le
Vézir-Saheb n’est pas très-lourd à porter, et cependant
ce chef ne s’y soumet qu’à regret : il entretient
de secrètes relations avec Assaf-Dooulet, et lui promet
de l’appuyer dans le cas où les Persans se décideraient
à recommencer le siège de Hérat. 11 est
probable que si ceux-ci en venaient là, le Serdar *
se tournerait contre eux dès qu’ils seraient vainqueurs;
car, à l’exemple des autres chefs de ces
contrées, il éprouve bien moins le besoin d’être
indépendant que celui d’agiter, d’intriguer et de
se livrer à son penchant pour le pillage et la dévastation.
Sa sujétion au Hérat est tout à son avantage,
puisqu’il ne paye aucun impôt ; on ne peut
en effet appeler de ce nom quelques chevaux de
choix, qu’il envoie chaque année à Yar-Méhémed-
Khan et que celui-ci compense par des présents
de châles de Kachmir et des produits de l’industrie
européenne, d’une valeur toujours supérieure à celle
de ce qu’il a reçu. Le frère du Serdar, Méhémed-
Hussein-Khan, et les vingt-cinq chefs qui l’ont
accompagné à Hérat, y touchent de bons appoinie-
ments; il ne reste donc à sa charge que le contingent
de troupes qu’il doit fournir au Vézir-Saheb,
en cas de guerre, et je me haterai d ajoutei qu il
trouve une ample compensation à cela dans la protection
de ce dernier, qui le défend contre les Khans
uzbeks, ses voisins et ses ennemis de longue date.
La persistance de ces nomades à vivre dans une continuelle
agitation est vraiment inconcevable, et les
avantages les plus réels ne peuvent les y faire renoncer.
Le calme forcé dans lequel vivent les Zeïdnats
depuis quelques années a tourné au profit de la tribu
qui a développé son industrie des kourks, dont elle
fournit presque toute l’Asie : son bien-être s est
augmenté par là bien plus qu’elle ne pouvait 1 espérer
en continuant de se livrer au pillage. Le nombre
de ses habitants s’est tellement accru, qu’une
fraction d’entre eux a été obligée d’aller chercher ailleurs
un territoire où elle pût vivre moins à 1 étroit.
Quatre mille tentes sont établies à cette heure dans
une vallée, autrefois occupée par la tribu des Djem-
Chidis, vallée dont la fertilité n’est pas moins grande
que celle de la plaine de Kalèh-Noouh. — LesDjem-
Chidis qui étaient là avant eux, au nombre de dix mille
tentes, ont été enlevés à la suite d’un événement
malheureux, mais assez fréquent dans ces contrées.
Profitant des troubles qui agitaient la principauté du
Hérat pendant que les Persans faisaient le siège de
cette ville, en 1838, ils se déclarèrent d’abord indépendants
de Châh-Kamràne; puis, l’année suivante, ils
égorgèrent un seigneur que leur avait envoyé Yar
Méhémed-Khan pour les engager à rentrer dans le
devoir. Dès que ce dernier futinforméde cette action,
il marcha contre eux à la tète de ses troupes, les bat