
plus loin la vallée s'élevant progressivement finit
par se rétrécir au point de devenir un étroit défilé
très-accidenté, dominé de cliaque côté par des escarpements
inaccessibles ; sur leurs sommités nous distinguâmes
des parcelles de murailles indiquant clairement
des traces de fortifications, grâce auxquelles,
à l'époque où elles étaient debout, ce passage devait
être sinon impossible, du moins très-difficile à forcer.
Ce défilé nous conduisit à un plateau encaissé dont le
centre avait jadis été occupé par une petite forteresse
carrée, avec des tours aux angles, sous le feu meurtrier
de laquelle on ne pouvait se dispenser de passer
pour arriver au revers de la montagne, où nous parvînmes
à une heure de là. Sur le point le plus élevé,
je remarquai un énorme bloc de rocher attenant au
sol ; sur sa face unie étaient sculptées plusieurs figures
et inscriptions. Les premières représentaient un roi
sur son trône,' rendant lajustice au milieu de sa cour
assemblée; un guerrier étendu par terre et enchaîné
est égorgé par son ordre, ainsi que semble l'indiquer
son bras étendu, tandis qu'un autre captif, délivré
de ses chaînes, jetées à côté de lui, et la figure
bouleversée par la terreur, s’est précipité aux genoux
du prince et semble implorer sa clémence. L'inscription
arabe, que je n'ai pu lire, m'a paru beaucoup plus
récente que le bas-relief et en avoir remplacé une
autre qui devait probablement exister un peu au-
dessus, dans un endroit où le roc concave indique
qu'il a été creusé afin de faire disparaître quelque
chose. Mon guide ne put rien m’apprendre à l'égard
de ces sculptures, sinon qu'on les attribuait dans le
pays à Sultan - Mahmoud le Gliaznévide. Il ajouta
encore qu’à 2 farsangs sur la droite et dans la plaine,
il y avait les ruines d’une assez grande ville dont
quelques masures étaient occupées par des pâtres
de la tribu mongole, soumise au Khan de Ser-Peul1.
Nous fûmes au pied de la montagne en moins d’une
demi-heure et nous continuâmes à avancer dans un
assez vaste steppe, où nous fîmes lever un grand nombre
de lièvres. Nous nous arrêtâmes, après avoir parcouru
10 farsangs en sept heures, dans le village fortifié
de Boudhi, situé à l'entrée des premières gorges
d'une haute chaîne de montagnes, sur un tertre conique.
Ses murailles sont en briques cuites et crénelées;
son importance a dû être bien plus grande
qu'aujourd’hui, au temps où l’Asie centrale était au
pouvoir des Mongols, car il protège au nord l’entrée
principale de laParopamisade. Les fortifications de ce
village et la plupart des ses maisons sont en ruines;
c'est tout au plus si 250 à 300 de ces dernières sont
habitées. Mourad-Beg, Uzbek, qui y commande au
nom de Mahmoud-Khan, de Ser-Peul, nous reçut très-
convenablement dans sa demeure, après avoir pris
connaissance de la lettre de son chef. Le lendemain,
dès le point du jour, il nous fit amener par un nouveau
guide des montures reposées, et nous partîmes
aussitôt.
i II est important de faire rem a rq u e r que l’auteur a rencontré
des Mongols dans ce pays, car axant lui on croyait qu’il n’y
avait de Mongols que dans une petite colonie placée aux confins
des montagnes de Gour, dans une direction éloignée au
S.-O. de Ser-Peul. — Ed.