
franchir pour arriver à Kouhistani-Baba, où nous
devions coucher le soir.
Kouhislani-Baba.—14 juillet.—Distance de 11 farsangs
depuis Singlak. En quittant les grottes, nous
continuâmes à gravir la montagne, et, de crête en
crête, nous nous trouvâmes au point le plus élevé où
nous fussions encore parvenus dans cette contrée. La
route traversait un sol varié et fertile, planté de chênes
verts, de pins et d’épines-vinettes. Nous passâmes
plusieurs courants d’eau que mon guide m’assura être
les sources du Mourgliâb, Nous atteignîmes enfin
les neiges une heure avant d’arriver au point culminant
de notre ascension, et, malgré le soleil qui
dardait sur nos têtes, le froid devint tellement vif que
je dus me couvrir de mon manteau. Arrivé au faîte,
j’éprouvai un sentiment d’admiration indéfinissable à
la vue du magnifique tableau qui se déroulait à nos
yeux. Ce spectacle offrait des diversités dont il était
possible d’apprécier les détails avec assez de précision.
Devant nous, et à plus de 30 farsangs dans
le lointain, le magnifique pic du Tchalap-Dalàne semblait
toucher le ciel de sa cime blanchie par des
neiges éternelles; les montagnes très-élevées qu’il
fallait traverser pour parvenir jusque-là ressemblaient,
de la hauteur où nous étions placés, à de
petites collines boursouflant à peine le sol. Le pays
que nous venions de parcourir depuis Ser-Peul
paraissait derrière nous comme un point dans l’espace.
La chaîne de montagnes sur laquelle nous cheminions
s’étendait, de l’ouest à l’est, sur une longueur
telle que notre vue finissait par s’y perdre, sans
en voir la fin. Une infinité de-chaînons s’en détachaient
et couraient dans diverses directions en s’abaissant
vers le nord et laissant entre eux de belles vallées?
mouchetées en noir par les tentes de nomades et coupées
de cours d’eau serpentant comme des fils
d’argent au milieu de prairies verdoyantes. Tout cela
avait une animation et un charme qui me retenaient
malgré moi dans la contemplation.
Nous descendîmes tout au plus deux heures pour
arriver dans la belle vallée qui se déroulait sous nos
pieds : elle occupait 3 ou 4 farsangs en largeur
sur une longueur considérable. Suivant les habitants
du pays, elle commence aux sources de la rivière de
Balkh (le Dehas), aupieddel’Hindou-Kouch, et se prolonge
sans interruption jusqu’au delà de Hérat, étant
sur toute cette étendue fort peuplée et très-fertile.
Cette vallée incline de l’est à l’ouest, ainsi que l’indique
la direction qu’y suivent les eaux. Deux petites rivières,
le Ser-Djinguelâb et le Tinguelâb, prennent leurs
sources dans une chaîne de montagnes qui les sépare
du Dehas. Après avoir coulé indépendantes l’une de
l’autre sur un espace d’environ 25 farsangs, elles
se rejoignent à Dooulet Yar, et, sous le nom de Hé-
ri-Roud, ne forment plus qu’une seule rivière qui arrose
les campagnes de Chéhérek, d’Obèh et de Hérat.
La vallée où coule cette rivière est bornée au sud par
une chaîne de montagnes appelées Kouh-Siah (Monta-
gnes-Noires), par rapport à la teinte foncée des roches
qui la composent ; elle est un peu plus basse, mais aussi
étendue, de l’ouest à l’est, que celle que nous venions
de traverser, bordant cette vallée vers le nord, et qu’on