
à l’horizon, préludait au crépuscule et nous permettait
à peine de distinguer les assaillants, qui s’avancaient.
contre nous en rampant. Lorsqu’ils se furent
assez approchés, les Hézarèhs firent rouler sur eux
plusieurs rangées de grosses pierres préparées à l’avance
pour la défensive; puis, quand les Firouz-Kouhis
se levèrent pour fuir, ils les fusillèrent par une décharge
générale.
Pendant toute cette lutte, les femmes se montrèrent
plus téméraires que les hommes; on les voyait
partout au premier rang, s’exposant à la fusillade
des fuyards et ripostant comme de vraies héroïnes.
Ces femmes montent à cheval comme les hommes,
et plus d’une parmi elles l’emporterait sur nos
plus hardis cavaliers d’Europe. Leur dextérité à conduire
leur monture est vraiment incroyable et leur
hardiesse n’est pas moindre. Elles font toujours nom-
bie parmi les combattants en temps de guerre, et les
vaincus redoutent beaucoup plus leur cruauté que
celle des hommes. Il n’y eut personne de tué ni même
de blessé de notre côté; quand le jour parut, les Hézarèhs.
allèrent visiter l’emplacement occupé par les
Firouz-Kouhis pendant l’escarmouche, et ils découvrirent
sur la terre plusieurs traces de sang indiquant
que quelques-uns de leurs coups avaient porté
juste.
Cependant le soleil venait de se lever, et Rabi,
qui aurait dû me rejoindre la veille au soir, n’avait
pas encore paru; j’étais très-inquiet sur son
compte, vu le désordre que la guerre entre les deux
campements avait jeté dans le pays; mais enfin
il arriva à six heures du matin, en compagnie d’un
naïb du Khan de Dooulet-Yar, qui était envoyé
pour arranger le différend des nomades chez lesquels
nous nous trouvions. Ce naïb me remit plusieurs lettres
de son chef, destinées aux commandants des
campements dans lesquels je devais me pourvoir
de chevaux, et me prévint que le Serdar de Dooulet-
Yar avait modifié mon itinéraire, parce que Hassan-
Khan, ben-Zohrab, chef des Hézarèhs Poucht-Kouhs,
près duquel je merendáis, au lieu de se trouver
dans sa résidence habituelle de Lar, s’était dirigé peu
de jours auparavant, à la tête d’un corps de troupes,
vers les montagnes de Djèvèdjè, dans la crainte que
l’armée du Hérat, qui venait d’envahir la province de
Gour, n’entrât aussi sur son territoire pour le piller.
Du reste, le naïb m’assura qu’il n’y avait aucune
différence entre les deux routes pour la sécurité. Le
Serdar de Dooulet-Yar me rendait un assez mauvais
service en changeant la direction de mon trajet, mais il
faisait tout pour le mieux. Je lui étais désigné comme
un serviteur du chef de Ser-Peul, se rendant pour
affaire près de celui des Hézarèhs; il croyait donc parfaitement
agir en me dirigeant vers le lieu où était ce
dernier. Mais moi qui prévoyais que cet incident allait
me jeter dans de nouvelles complications, je pestai de
bon coeur contre mon protecteur. En tout état de choses,
avancer était ce qu’il y avait de mieux à faire,
et je me remis en route avec les mêmes montures qui
m’avaient amené la veille, nos hôtes n’en ayant pas à
nous prêter. Nous nous trouvions à 3 farsangs de
Singlak, et il ne nous restait plus que 8 farsangs à