
lieu appelé Mussella, sur le point le plus élevé d’un
petit plateau, une magnifique mosquée et un collège
dont la construction fut commencée il y a plus de six
siècles (1192,588delTiég.) par G li y az-Eddin, troisième
Sultan de la dynastie des Gourides. Mahmoud son fils
l’acheva en 1 an 1212 (609 de l’hég.) et il y fut enterré
ainsi que son père et son oncle Châh-ab-Eddin. Cette
mosquée, qui souffrit beaucoup lors de la destruction de
la ville par les Mongols de Djengliiz-Khan, fut restaurée
ou plutôt réédifiée par Châh-Sultan-Hussein,
prince limouride qui régnait à Hérat vers la fin du
xvc siècle, et auquel cette ville est redevable, ainsi
qu’à Châh-Rokh, de tous les monuments remarquables
qu’elle a possédés et qu’elle possède encore aujourd’hui.
La mémoire de ces deux excellents princes est révérée
dans le pays; leur nom est connu partout, même dans
la plus pauvre chaumière, et il n’est jamais prononcé
qu’avec respect et vénération. La mosquée de
Mussella a des proportions colossales : Chàh-Sultan-
Hussein la destinait à renfermer les cendres de l’Imam
Réza, qu’il voulait faire transporter deMeched à Hérat.
On travaillait à cette mosquée depuis vingt-cinq ans
lorsque ce prince mourut : quoique les travaux fussent
alors très-avancés, elle ne fut jamais complètement
achevée, aucun de ses successeurs n’ayant repris
ce travail. Cependant, tel qu’il est aujourd’hui, ce monument
est encore un des plus imposants que j ’aie
vus en Asie; il est complètement recouvert de briques
vernissées, formant des dessins variés et pittoresques,
et sa structure est aussi élégante que hardie.
On remarque surtout la coupole, dont les dimensions
dépassent tout ce qu’on peut imaginer; plusieurs arceaux,
soutenus par des piliers en briques, égalent par
leurs proportions l’arc de Ctésiplion. Les sept magnifiques
minarets qui l’entourent sont pour ainsi dire
intacts, car leur partie supérieure seule est légèrement
endommagée. A côté de cette mosquée,
Châh-Sultan-Hussein en avait fait construire une
autre plus petite, destinée à recevoir sa dépouille
mortelle. Les murs seuls en sont restés debout, à huit
ou dix pieds de hauteur, et la coupole s’est complètement
écroulée : un mausolée de marbre noir, en tout
semblable à celui qui fit mon admiration à Kazerguiah,
est placé au milieu des décombres à l’endroit où l’on
présume que le prince a dû être enterré. Les eaux vives
coulent en abondance et dans toutes les directions sur
le plateau du Mussella; l’on voit encore les canaux à
travers lesquels on les dirigeait autrefois, pour alimenter
la vieille ville, qui forme aujourd’hui les
faubourgs de la nouvelle : bon nombre d’entre eux
sont desséchés. On les traverse sur de petits ponts en
briques cuites, très-rapprochés les uns des autres, et
aux trois quarts détruits *.
1 Un fakir mahoinétan, originaire de Delhi, s’était établi à
l’entrée de la grande mosquée de Mussella. C’était un homme
plein d’intelligence, ayant beaucoup voyagé- e t très-vénéré dans
le pays. Châh-Kamràne, toutes les fois qu’il passait à Mussella, ne
manquait jamais de descendre de cheval e t de passer une demi-
heure à causer avec ce fakir. Moi-même, lorsque je me promenais
avec le prince, sur son invitation, je quittais ma s e lle , pour
m’asseoir avec eux e t prendre p a rt à la conversation. Ordinairement
un des serviteurs du prince nous préparait alors une tasse de
th é .—L.