
dnnées. Les Hératiens qui étaient passés aux Persans
ou aux Anglais pendant la dernière guerre ont été
amnistiés, et ils rentrent dans leurs foyers en assez
grand nombre. Actuellement (1845), la population
de Hérat est remontée au chiffre de vingt à vingt-deux
mille âmes; d’ici à dix ans, on ne s’apercevra plus des
désastres qui ont pesé sur elle pendant ces derniers
temps. Il est facile de comprendre avec quelle promptitude
les villes de l’Asie, construites en terre et habitées
par des populations à moitié nomades, sont détruites
et abandonnées; mais on doit se rendre compte,
par les mêmes raisons, de la facilité avec laquelle
elles se relèvent. Les matériaux se trouvent sur place
et ne coûtent rien; la plupart du temps ce sont les
individus d’une même famille, qui construisent de
leurs propres mains leur habitation. De la terre et
un peu de plâtre, voilà tout ce qu’il leur faut;
la porte et les croisées, objets d’une très-minime v a leur
dans ces contrées, sont seules en bois, car le
plafond est ordinairement une voûte aussi en terre. On
concevra facilement d’après cela comment Alexandre
le Grand a pu faire construire tant de villes par
son armée, dans l’Asie centrale. Avec des bras seulement,
et ils ne lui manquaient pas, il pouvait en dix
ou quinze jours bâtir des milliers de maisons: il n’est
pas étonnant qu’on ne retrouve plus aujourd’hui la
moindre trace de ces constructions, puisqu’en s’affaissant
sur le sol, par une cause quelconque, elles se
sont confondues avec lui et n’ont fait que lui rendre
ce qu’elles lui avaient emprunté.
Malgré l’accroissement continuel de la population
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hératienne depuis trois ans, il faudra de longues années
encore avant que la ville soit déblayée de ses
ruines, car c’est tout au plus si une maison sur cinq est
habitée ou en état de l’être. Les édifices de toute espèce,
caravansérails, bazars, maisons, etc., se sont
écroulés en 1838 souple poids des bombes persanes,
ou se sont affaissés d’eux-mêmes par suite de l’abandon
dans lequel leurs propriétaires les ont laissés.
Les défenseurs de la place les démolissaient alors et
se servaient des matériaux qu’ils en tiraient pour
boucher les brèches faites par l’artillerie ennemie
à leurs remparts. En 1845, rien n’était plus désolant
que l’aspect de cette malheureuse cité. Les destructions
commises par les troupes persanes dans ses
environs, auparavant si pittoresques, si fertiles et si
animés, sont vraiment incroyables. Des villages, des
jardins et de belles promenades, abritées par d’épais
ombrages, ont complètement disparu. Cent années
de guerre civile y avaient causé moins de désastres
que les dix mois de siège de Méhémed-Châh :
ses soldats ont tout ravagé; il ne reste plus un seul de
ces beaux arbres séculaires qui faisaient l’ornement
de cette contrée, tout est tombé sous la cognée de ces
Vandales qui ont complètement dénudé le sol, aujourd’hui
totalement désert et inculte, et n’offrant que
des ruines et l’image de la désolation.
La plus grande partie des bazars de Hérat sont
ruinés, il ne reste plus debout qu’une partie de ceux
désignés sous le nom de Tchar-Souk (les quatre rues).
Ce sont quatre rues voûtées, construites en briques
cuites, ayant une rangée de boutiques de chaque côté,